Les hannetons, un fléau pour les forêts. Tous les 4 ans, après 47 mois passés dans le sol à s'attaquer aux racines des arbres, les larves de ces coléoptères s'envolent. C'est ce mois-ci. Le seul moment pour compter les hannetons. Mais cette année, le confinement va perturber l'étude de l'ONF.
Depuis quelques jours, le bourdonnement des hannetons se fait entendre en fin de journée dans les forêts de Compiègne et de Laigue. Preuve que la période de reproduction a déjà commencé.
Le phénomène dure en général un mois. En commençant cette année avec près de 3 semaines d'avance, il devrait se terminer vers la mi-mai.
L'envol a lieu tous les quatre ans et se fait sous haute surveillance. Un moment décisif pour l'Office national des forêts (ONF). Le seul où les agents forestiers peuvent observer ces dangereux envahisseurs et ainsi recueillir les données nécessaires pour limiter le fléau qu'il représente pour la forêt.
Changement du protocole d'observation
Mais pour cet "envol 2020", l'ONF doit revoir ses plans. Le confinement lié à la crise sanitaire du Covid-19 ne permet pas d'organiser l'opération initialement prévue. Impossible en effet de solliciter les nombreux bénévoles dont ceux de l'association de Sauvegarde du patrimoine des forêts du compiégnois (SPFC)."Le confinement nous a perturbés dans la mesure où on souhaitait faire quelque chose de très participatif avec des associations, des écoles et un certain nombre de partenaires parce que ça permet de rendre les choses concrètes explique Bertrand Wimmers, directeur de l'ONF Picardie, il y a des gens qui sont très intéressés par ce qui se passe en forêt et qui ont envie de s'investir".
L'ONF regrette d'autant plus cette "force de frappe", qu'elle serait venue en appui des forestiers pour faire les suivis et qu'elle aurait permis d'avoir un quadrillage beaucoup plus important de la forêt.
Le protocole de surveillance a donc été réorganisé avec ses seuls agents forestiers, 25 au total.
Les quatre points à surveiller
Parmi les points d'observation, l'ONF retient en premier lieu la ponte. "On va essayer de tirer une cartographie de la présence du hanneton à partir des pontes sur 70 parcelles. Comme elles sont liées aux adultes et aux accouplements, c'est vraiment un décompte sur des pontes dans les parcelles".Autre test, le piégeage, notamment le piégeage lumineux. Celui-ci consiste à attirer les coléoptères avec une lumière en tirant un drap afin de les faire tomber dans des bacs récupérateurs.
Mais avant de les installer, les forestiers vont étudier la protection mécanique du sol. Ce test vise à s'assurer que le piégeage est techniquement et économiquement possible, car il ne s'agit pas de bâcher d'importantes surfaces forestières.
Enfin, dernier point d'observation : le suivi de la défoliation des arbres. C'est là, lors de la phase adulte que le hanneton consomme des feuilles. Pour suivre le phénomène, les techniciens utilisent de nouveaux outils de détection et des images satellites.
"Cette méthode permet de visualiser et de suivre dans le temps, à intervalles réguliers, la présence de hannetons ou l'impact sur la défoliation. et comme on peut récupérer les images de 2016, on pourra les comparer à celles de 2020 et par la suite aux événements suivants".
C'est à ce jour, le seul moyen de calculer avec précision la répartition géographique du hanneton.
Le hanneton, l'ennemi invisible
Dans les forêts, la larve du hanneton est une calamité. Les jardiniers l'appellent "le ver blanc".On ne peut rien contre lui. Implacables, les larves mangent les racines des arbres et les jeunes pousses meurent de soif.
Après 47 mois passés dans les sols sableux des forêts du Compiégnois sous forme de larve, le hanneton femelle prend son envol fin avril à la tombée du jour et durant un mois, il s'accouple dans le feuillage qu'il consomme. Il replonge ensuite dans le sol pour pondre, jusqu'à 300 oeufs par individu et par saison.
Et le cycle peut recommencer.C'est cette consommation racinaire qui cause des dégâts. En s'attaquant aux jeunes pousses, les larves compromettent le renouvellement de la forêt. Les forêts du sud de l'Oise en sont infestées depuis environ 5 ans.
Pas de solution miracle
D'autres pays sont confrontés au problème. Certains depuis plusieurs dizaines d'années : Allemagne, Pologne, Autriche, Hongrie, République Tchèque ...Pour autant, aucun n'a trouvé de solution miracle au phénomène.Si l'impact sur les arbres adultes et l'accélération de leur dépérissement n'a pas été établi scientifiquement, les forestiers ne l'écartent pas. Ils espèrent trouver des pistes et des solutions fondées sur la nature.