Le pari d'une cuisine 100% bio, locale et sans gaspillage à la cantine : "nous pouvons manger du fait maison sans exploser les coûts"

Dès la rentrée, la mairie de Margny-les-Compiègne a lancé la première cantine scolaire 100 % bio et "fait maison" des Hauts-de-France. Un pari pour nourrir les enfants avec une alimentation plus saine sans augmenter les coûts.

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Une salade niçoise aux légumes de saison, un poulet rôti de plein air bio de Brétigny, et un gâteau aux haricots rouges, le tout 100% bio et local. Nous ne sommes pas dans un restaurant gastronomique branché, mais bien dans la cantine d’une école à Margny-les-Compiègne, dans l’Oise.

Un chef à la tête de la cantine

Ce mercredi matin, les cuisiniers s’activent autour de Sylvain Nalpon, le nouveau chef cuisinier, recruté pour la rentrée par la mairie de la commune. Il a déjà une longue expérience de chef cuisinier dans des restaurants gastronomiques parisiens. C’est son premier poste dans la restauration collective. "Avant, je cuisinais pour des personnes qui venaient pour le loisir, le soir. Aujourd’hui, je fais le même métier pour quelque chose d’indispensable. On nourrit les enfants. Je me sens utile", se réjouit le chef.

Je ne suis plus coupé du produit, je rencontre chaque producteur et je les choisis.

Sylvain Nalpon, chef cuisinier de la cantine scolaire de Margny-les-Compiègne

Dans cette cuisine, on coupe, on taille, on cisèle, on cuit, on agrémente, on concocte de petits plats. La cantine n’est plus livrée par un prestataire de plats froids à réchauffer. Tout est désormais "fait maison", avec des produits locaux et biologiques. C’est ce qui a séduit Sylvain, qui établit les menus, cuisine, gère les coûts et se charge également de trouver les producteurs fournisseurs. "Le poulet de ce midi vient de Brétigny. C’est un petit élevage à une demi-heure d’ici. Toutes les commandes sont faites à proximité. Avant, j’avais un rapport aux produits bien différents. Ils ne représentaient qu’une ligne sur une liste. Maintenant, je ne suis plus coupé du produit, je rencontre chaque producteur et je les choisis", explique le chef.

Une cuisine alternative et saine

Durant les vacances scolaires, la cuisine a été réaménagée et les six agents sont formés aux techniques de valorisation des produits bio, locaux et de saison. Tous les jours, l’équipe doit fournir 550 repas dans les écoles de la commune.  Pour cela, elle est accompagnée par la société Nourrir l’avenir, qui aide les collectivités à adopter les bonnes pratiques. "On a transformé cette salle qui servait uniquement à réchauffer les plats en cuisine de production. Le "bien manger" est notre priorité. On connaît la provenance des produits. C’est bon pour l’environnement et pour la santé", explique Hervé Mouchard, formateur cuisinier pâtissier à la société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) Nourrir l’avenir.

Nous réutilisons les produits non consommés. Tout est recyclé.

Isabelle Bretegnier, diététicienne et nutritionniste, présidente de la SCIC Nourrir l’avenir

En cuisine, une diététicienne conseille le personnel pour la préparation de plats équilibrés et la maîtrise des dépenses. "Les produits bio coûtent cher donc nous faisons attention à la quantité de viande que nous réduisons. Nous utilisons moins de protéines animales et favorisons les végétales. C’est une cuisine vertueuse et plus économique", soutient Isabelle Bretegnier, diététicienne et nutritionniste, présidente de la SCIC Nourrir l’avenir.

La lutte contre le gaspillage alimentaire est aussi une solution à la réduction des coûts. "Au niveau national, le gaspillage alimentaire est insoutenable. Nous réutilisons les produits non consommés. Tout est recyclé. Par exemple, ce midi, nous proposerons aux enfants une compote agrémentée des restes d’un gâteau servi hier et nous réutiliserons les carcasses des poulets pour faire du bouillon et éviter les fonds de sauce en poudre industriels. Nous ne pouvons pas faire ça dans les grosses cuisines centrales. C’est gourmand et créatif. Nous prouvons ainsi que nous pouvons manger 100% bio et "fait maison", de très bons produits, cuisinés au dernier moment pour les enfants sans exploser les coûts", ajoute-t-elle.

Des tarifs maintenus

La réduction des coûts est un sujet important pour la mairie de Margny-les-Compiègne, qui a travaillé deux ans sur le projet. Cette volonté politique a également été encouragée par la loi Egalim. Depuis le 1er janvier 2024, elle impose à tous les restaurants collectifs, y compris les cantines scolaires, de proposer des repas avec au moins 50 % de produits durables et de qualité, dont au moins 20 % de bio. La plupart des établissements et villes peinent à respecter cette réglementation. Mais à Margny-les-Compiègne, on est fier d’être la commune pilote dans les Hauts-de-France. "Nous avons la chance d’être sur une terre de maraîchers. Cela aurait été dommage de ne pas donner de la qualité à nos assiettes. Nous renforçons le tissu économique local avec le circuit-court et nous nourrissons les enfants avec des produits de qualité et locaux", explique Bernard Hellal, l’édile de la commune.

Nous n’avons pas de perte et on peut maintenir nos tarifs des cantines pour les familles.

Bernard Hellal, maire de Margny-les-Compiègne

Une économie responsable et solidaire qui permet d’équilibrer les coûts. "On a une maitrise des coûts de production. Nous n’avons pas de perte et on peut maintenir nos tarifs des cantines pour les familles. Les enfants de plus de 100 familles de la commune mangent pour un euro. Il vaut mieux commencer par la nourriture que par l’uniforme", ironise le maire.

À midi, les enfants, de la maternelle au CM2, sont tous installés dans la salle. Mélissandre, 10 ans, déguste la salade de crudités. "C’est très bon. J’ai beaucoup aimé aussi les rillettes au persil." Des plats dignes d’un restaurant alternatif que les enfants découvrent avec parfois une petite hésitation. "J’aime beaucoup, mais je n’ai pas l’habitude manger ça. C’est la première fois", lance Liam. Pour la plupart, c’est une découverte de nouvelles saveurs.

Cette formule de cantine scolaire fait boule de neige sur le territoire. "Compiègne et toutes les communes de l’agglomération vont se lancer dans l’aventure. On va pouvoir mutualiser le poste de la diététicienne et donner des débouchés aux producteurs locaux", annonce Bernard Hellal. La ville espère servir d’exemple et prouver qu’une autre restauration collective est possible.

Avec Claire-Marine Selles / FTV

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