Dans un jugement publié le 6 février 2023, le tribunal administratif de Lille demande à la région des Hauts-de-France de reconsidérer ses objectifs fixés de développement de l’éolien. Un dossier brûlant lorsqu’on connaît l’opposition de Xavier Bertrand à la construction de nouveaux mâts dans la région.
Un camouflé dont le président de région se serait bien passé. Farouche opposant au développement de l’éolien terrestre dans les Hauts-de-France, Xavier Bertrand va semble-t-il devoir adapter sa position.
Dans un jugement publié le 6 février 2023, la justice pointe du doigt la non-justification par la région du souhait de développer les énergies renouvelables en laissant de côté l’éolien.
"Développer les énergies renouvelables autre que l’éolien"
Le tribunal administratif de Lille vient d’annuler partiellement le SRADDET, le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires de la région. Servant à fixer les grandes orientations en termes d’aménagement du territoire pour les années à venir, il avait été voté le 30 juin 2020 par le conseil régional et approuvé par le préfet un mois plus tard.
La question du développement des énergies renouvelables y occupait une place importante. Ainsi, la région affichait comme objectif de privilégier le "développement des énergies renouvelables (…) autres que l'éolien terrestre".
Un choix politique justifié par le fait que les Hauts-de-France sont la première région en termes de puissance éolienne installée et de production d’électricité d’origine éolienne. Avec plus de 2 100 mâts installés dans les cinq départements entrainant selon la région un "phénomène de saturation des paysages régionaux", il fallait stopper le développement du parc, qui représentait 28% de la puissance installée en métropole fin 2021.
Face à cette décision, l’association France Energie Eolienne avait demandé au tribunal administratif de Lille d’annuler dès octobre 2020 l’arrêté pris par le préfet. Plus de deux ans plus tard, c’est désormais chose faite au motif que le SRADDET "ne comporte pas de justification de l’absence d’objectif de développement de l’éolien terrestre".
Les écolos satisfaits
Du côté des écologistes, la décision du tribunal administratif donne le sourire. "On se réjouit", réagit Katy Vuylsteker, conseillère régionale écologiste en charge des questions d’aménagement du territoire. "Vous savez, il y a une obsession anti-éolienne de Xavier Bertrand qui l’a poussé à utiliser le SRADDET pour bloquer les installations éoliennes en instrumentalisant les outils mis à sa disposition. Or, on ne peut pas pénaliser certaines énergies renouvelables par rapport à d’autres".
Selon l’élue écologiste, cette décision va dans le bon sens. "On se réjouit, non pas parce qu’on veut créer des milliers d’éoliennes sur le territoire mais on pense que tant qu’il n’y a pas une vraie prise en charge du sujet de la part de la région, les constructions se poursuivent de manière archaïque".
Avec son groupe, Katy Vuylsteker milite notamment pour le repowering éolien, une technologie qui consiste à remplacer d’anciennes machines par des turbines plus performantes. "Mon but, c’est qu’on produise de l’énergie propre, résume l’élue, et pas qu’on finance des associations anti-éoliennes". En 2022, une délibération a octroyé une subvention de 170 000 euros à la fédération stop-éoliennes Hauts-de-France.
La région va faire appel
Dans les rangs de la majorité régionale, les élus préfèrent relativiser. "Nous avons été attaqués par les industriels de l’éolien qui ont mis 9 objections à une des règles du SRADDET en lien avec l’énergie, et notamment l’éolien, explique Christophe Coulon, vice-président LR en charge de la ruralité. L’argument retenu par le tribunal consiste à dire que les collectivités locales doivent toutes participer au développement des énergies renouvelables".
Il y a 5 fois plus d’éoliennes dans la région par rapport à la moyenne en France métropolitaine.
Christophe Coulon, vice-président LR des Hauts-de-France en charge de la ruralité
Fervent opposant à la multiplication des mâts dans la région, l’élu tient à rappeler pourquoi la région souhaite limiter le développement de l’éolien, en prenant un exemple chiffré. "La région, c’est 30 000 km2, soit 6% de la surface de la France. Sur cette surface, on a 30% des mâts français en service ou autorisés. Il y a donc 5 fois plus d’éoliennes en proportion chez nous que ce que nous pourrions accueillir si chacun faisait son effort". Selon lui, certains territoires sont "submergés, saturés » et il est nécessaire de « stabiliser l’éolien terrestre" dans les Hauts-de-France.
Christophe Coulon annonce que la région va faire appel de cette décision. Selon lui, l’argument retenu par le tribunal est discutable. "Les industriels ne veulent pas que la décision que nous avons prise dans le SRADDET face jurisprudence en France, mais nous allons leur prouver le contraire", conclut-il.