Afin d'apaiser la colère des agriculteurs et à la veille des élections professionnelles, le Premier ministre a reçu ce lundi 13 janvier les syndicats à Matignon. Parmi eux, un Marnais, Christophe Van Hoorne, secrétaire national de la Confédération paysanne, éleveur et maraîcher. Il s'est dit déçu par François Bayrou, qui semblait découvrir les dossiers.
La colère des agriculteurs couve. A la veille des élections dans les chambres d'agriculture, le nouveau Premier ministre a organisé une rencontre avec les syndicats professionnels à Matignon. Si la FNSEA, les Jeunes Agriculteurs (JA) et la Coordination Rurale sont ressortis plutôt rassurés par les engagements de François Bayrou et attendent avant de se prononcer, la Confédération paysanne se dit déçue. Selon son secrétaire national, le Marnais Christophe Van Hoorne, cette rencontre n'a servi à rien.
Nous n'avons rien obtenu
Christophe Van Hoorne, secrétaire national de la Confédération paysanne
La Confédération paysanne est sortie très déçue de sa rencontre avec François Bayrou. Son secrétaire national dénonce une rencontre qui n’a pas permis d’avancer et un Premier ministre qui ne semblait pas connaître les problématiques des agriculteurs. "Nous avions rencontré les trois précédents Premiers ministres, et j'avais senti davantage d'écoute qu'avec Francois Bayrou. De la nécessité de revoir la loi d’orientation agricole à nos propositions sur le bio ou à nos demandes de revoir le système d’élection des chambres d’agriculture, rien n’a été entendu".
Pas de proportionnelle dans les chambres d'agriculture
La Confédération paysanne en fait une priorité : instituer la proportionnelle dans les chambres d’agriculture pour que tous les paysans soient représentés, quels que soient leur type d’exploitation et le modèle d’exploitation. Christophe Van Hoorne se montre très critique à l'égard du système actuel qui donne le monopole à un syndicat, en l'occurrence la FNSEA-JA. "Le système actuel donne une large majorité au syndicat qui arrive en tête, et impose un seul modèle agricole à tous. Nous voulons que toutes les formes d’exploitation soient possibles. Que l’on aide tous les agriculteurs, des plus petits aux plus gros".
Au sein des chambres d'agriculture, c'est la liste arrivée en tête qui obtient la majorité des sièges puis le reste des sièges est réparti à la proportionnelle. Cela entraîne une hégémonie du syndicat majoritaire, la FNSEA-JA, qui gère tous les services et représente le monde agricole. Avec un système proportionnel, "tous les syndicats seraient représentés dans le bureau et donc diverses conceptions de l'agriculture".
Sur ce point, François Bayrou n'a pas donné suite, arguant "que la proportionnelle n'était pas adaptée aux chambres d'agriculture".
Pas de remise en cause de la loi EGalim
Même fin de non-recevoir pour ce qui concerne la loi EGalim, loi du 30 octobre 2018 qui régule plusieurs aspects de l'alimentation et du secteur agroalimentaire. "Nous avons proposé une révision de l'estimation des prix dans la loi EGalim car actuellement, elle ne permet pas de payer les agriculteurs au juste prix". Il rappelle que les difficultés des agriculteurs sont réelles. Même des exploitations céréalières de 250 hectares connaissent des difficultés à cause de cette absence de prix garanti. Il argumente: "Il faut que le prix des produits soit fixé par les agriculteurs et que l'on fixe un prix minimum garanti, qu'il s'agisse du lait ou d'autres produits. C'est une façon de garantir le revenu des agriculteurs".
La Confédération paysanne est d'autant plus déçue qu'Emmanuel Macron et Michel Barnier avaient semblé l'avoir entendu. François Bayrou, lui, n'a pas répondu. "Ca n'a rien donné" déplore le leader syndical.
Aides à l'installation confirmées
Si les autres syndicats sont pourtant sortis relativement satisfaits de l'entretien avec le Premier ministre, c'est que François Bayrou s'est engagé à verser l'argent promis par son prédécesseur Michel Barnier dans le cadre de la LOA, la Loi d'Orientation Agricole. Cet argent accompagnera l'installation et la transmission d'exploitations par des exonérations fiscales. Par ailleurs, les aides sur le gazole non routier (GNR), le soutien à l’embauche de salariés et le calcul de la retraite sur les 25 meilleures années ont été confirmés.
Contrairement aux autres syndicats, la Confédération paysanne reste critique. Selon elle, ce sont toujours les mêmes types d'entreprises qui sont aidées. "En Champagne-Ardenne, si vous ne suivez pas le modèle agricole dominant, si vous voulez travailler autrement, vous ne serez par aidé Actuellement, il est impossible pour un éleveur de lapin d’obtenir des aides des services de la chambre d’agriculture, tout simplement parce qu’il ne correspond pas au modèle dominant".
Prochaine étape, les élections
Ce sont bien des conceptions de fond du modèle agricole qui s'affontent. Prochaine étape, les élections dans les chambres d'agriculture qui se déroulent du 15 au 31 janvier.
La Confédération paysanne compte y défendre ses priorités: la limitation des produits phytosanitaires, la préservation de l'environnement, notamment des forêts, et la prise en compte de la répartition des aides.
Seconde étape, le salon de l’Agriculture, qui est prévu du 22 février au 2 mars prochain à Paris.