Lutte contre le racisme et l'antisémitisme : comment agir efficacement auprès des plus jeunes ?

A l’occasion de la semaine de lutte contre le racisme et l'antisémitisme, des centaines d'actions sont organisées partout en France, notamment pour les collégiens et lycéens. Des initiatives essentielles, mais quelle est leur efficacité et leur portée réelles auprès des plus jeunes ?
 

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"Y a des gens qui sont contre les Juifs ou contre les arabes et c’est pas bien. On est tous égaux"."C’est immonde que des gens n’aiment pas d’autres personnes qui sont égales à eux-mêmes". Glanées le 18 mars dernier dans la cour du collège André Malraux de La Farlède (Var), ces réactions d'élèves sont rassurantes. Elles semblent prouver que les plus jeunes se révoltent face aux actes racistes et antisémites. Il faut dire que ce jour-là, il y avait beaucoup d’émotion : un olivier était planté en hommage à Ilan Halimi, victime du gang des barbares en 2006 parce qu'il était juif.

 

L'importance des symboles

Regroupés autour de l’arbre, les collégiens - dont certains portent l’écharpe tricolore - chantent la Marseillaise. Le moment est solennel et on perçoit qu’il touche ces jeunes adolescents. Mais une fois l’émotion collective passée, que restera-il de tout cela ? Planter un arbre dans une cour d’école suffit-il à changer les choses ? Tout dépend ce que l'on en fait si l'on en croit Emmanuel Ethis, le Recteur de l'académie de Nice, présent lors de cette cérémonie.

Il n’y a pas de naïveté. Ce n’est pas parce qu’un jour on va déposer une fleur ou un arbre que simplement les choses changeront. Elles changeront quand on se rappellera ce que cet arbre et cette fleur représentent. C’est très important d’imaginer que les symboles que nous portons doivent être portés au quotidien. 

Des actes qui se banalisent

Car c’est bien au quotidien, dans la vie de tous les jours que s’insinue une forme de racisme ou d’antisémitisme "ordinaire", à travers des petites blagues ou des stéréotypes largement relayés par les réseaux sociaux. "L’idée que les juifs possèdent plus que les autres reste très présente dans les lycées" confie ainsi La vice-présidente de la Fédération indépendante et démocratique lycéenne (Fidl), Saphia Ait Ouarabi à nos collègues de La Croix.

Une mémoire qui se perd

Plus préoccupant encore selon elle, la "perdition de la mémoire du génocide". Sur les réseaux sociaux, le discours négationniste est par exemple très répandu". Les chiffres semblent le confirmer : selon un sondage de l’Ifop réalisé en 2018, chez les 18-24 ans, 21% n'ont jamais entendu parler de l’extermination de six millions de Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale.

La force des témoignages 

On comprend mieux alors l’importance et l’urgence de cette visioconférence nationale organisée le 18 mars : plus de 4000 élèves répartis dans 150 établissements français ont pu écouter le témoignage de 5 rescapés des camps de concentration. Chacun à leur tour, Elie, Raphaël, Ginette, Victor et Esther ont raconté leur enfance et leur survie. Malgré la distance instaurée par l’écran, l’émotion est bien palpable. Et la prise de conscience réelle. A l’heure des fake news et du complotisme à tout va, ces témoignages vont à l’essentiel. Et pour Valentin, lycéen de la région parisienne, c’est vraiment important. 

On est à la source et c’est vraiment important car on est une des dernières générations à pouvoir avoir ce genre de témoignages.


Et pour bien rappeler aux élèves que la folie qui s’est emparée des hommes en 1940 n’est pas une histoire ancienne, une rescapée des camps confie cette phrase glaçante :

J’ai  l'impression de me retrouver comme en 1940, et d'entendre les mêmes propos antisémites et racistes.

Ces visioconférences ont ainsi permis d’aborder l’actualité et un  contexte marqué par une série d’actes antisémites (le visage de Simone Veil barré de croix gammées, l’arbre de mémoire d’Ilan Halimi sectionné, les tags sur les DAB). Pour Emilie Germain Professeur d'histoire au lycée Jules Ferry de Versailles, dans cet échange, "il y avait une dimension historique, mémorielle  mais aussi une dimension civique, sur la responsabilité individuelle des élèves pour que de tels évènements ne se reproduisent plus."

Au-delà des belles phrases un peu abstraites sur le vivre ensemble, il faut donc la force du témoignage et du vécu pour confronter les plus jeunes aux dangers d'une intolérance qui se diffuse lentement mais sûrement, et cela dès la cour d'école.

"Tout commence par l’éducation !"

Pour lutter contre ça, Sam Badri a décidé d'aller directement dans les établissements scolaires. Chaque semaine, ce metteur en scène vient retrouver les enfants de CE2 de l'école Simone Veil à Hérouville-Saint-Clair (Calvados). Avec eux, il prépare un spectacle sur le thème de la diversité et du racisme. Originaire d’Iran, Sam a fui son pays à l’âge de 19 ans après l’arrivée au pouvoir de Khomeini.


Pour monter son spectacle "Vivre sa diversité", il est allé écouter ce qui se disait dans les cours de récréation. Et ça donne ça : "Est-ce que je peux jouer avec toi Joris ? Non je ne joue pas avec toi 'chocolat' !". Un échange et des mots qui se banalisent si on n'y prends pas garde. Mais Sam est confiant sur la capacité des enfants à se mobiliser pour peu qu'on leur montre le chemin. 

Les enfants ils apprennent tout. Même s’ils n’en parlent pas devant vous, ils réfléchissent sur le mot racisme, sur la solidarité, le partage, le respect…Petit à petit, ça rentre dans le cerveau. Tout commence par l’éducation !".

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