1 espèce de mammifère sur 5 menacée de disparaitre en Normandie

Selon une Liste Rouge parue à la fin de l'année dernière, 20,9% des mammifères de Normandie sont considérées comme menacées. Le Loir Gris et le Rat Noir sont en « danger critique ». Pour l'établir, 151 000 données ont été recueillies pendant 10 ans et analysées pendant 1 an.

Une seule fois. Sur 151 000 observations de mammifères réalisées depuis 2011 en Normandie, le loir gris n’a été vu qu’une seule fois. Résultat, cette espèce est considérée « en danger critique d’extinction » dans notre région. Lorsque sera publiée la prochaine Liste Rouge par l’Agence Normande de la Biodiversité et du Développement Durable (ANBDD), il y a des grandes chances pour qu’il soit classé « espèce disparue ».

Sur cette Liste Rouge 2022, le loir gris et 13 autres espèces de mammifères sont considérées comme menacées, soit 20,9% des espèces de mammifères de la Région.
Sur les 67 espèces évaluées, 33 sont classées en préoccupation mineure comme le campagnol des champs, le hérisson d’Europe ou la pipistrelle commune et 16 espèces sont quasi menacées (NT) comme le muscardin, le lapin de garenne, ou le marsouin commun. A ce jour 3 espèces de mammifères sont considérées comme disparues (RE) en Normandie : le castor d’Eurasie, le chat forestier et le vison d’Europe.

Le campagnol fait de la résistance, la loutre et l’hermine en souffrance

Prenons le cas du campagnol souterrain. On constate une « diminution des populations en lien avec celle des surfaces en herbe (retournement des prairies), des changements de pratiques agricoles et de la forte régression du bocage, notamment dans la partie armoricaine de la Normandie. » La population des campagnols souterrains a ainsi baissé de 30%.

Le campagnol souterrain est considéré comme « quasi menacé ». Pas d’inquiétude, ce petit rongeur est encore répandu en Normandie. Mais la baisse de sa population a un impact sur celle… de l’hermine. Si la Mustela Erminea « semble de maintenir dans le Cotentin et les Marais de la Dives », le rapport note que « la raréfaction de ses proies principales que sont le Lapin de garenne et les campagnols » font d’elle une espèce « en danger ».

Avant la seconde moitié du XXe siècle, l’hermine était pourtant répandue. Même constat pour la loutre d’Europe, elle aussi classée "en danger". Pourtant, celle-ci a enclenché une « phase de reconquête » en recolonisant les rivières bas-normandes au début des années 2000. Mais depuis 2016, la population décline de nouveau.

10 ans d’observation, 1 an d’analyse

Pour réaliser cet état des lieux espèces par espèces, un travail immense a été mené. Déjà, il a fallu recueillir des une montagne d’observations : 225 000, en tout, constituaient la base de données initiale. Une "observation" d’un animal, c’est tout simplement « une date et une localisation », explique Romain Matton, de l’AMBDD. Pour en recueillir autant, l’agence a pu compter sur ODIN, une plateforme partagée pour la diffusion des données naturalistes. Mais surtout, un important volume de données privées a été récolté par des naturalistes salariés ou bénévoles d’une multitude d’associations.

Sur ces 225 000 observations, 151 000, recueillies entre 2011 et 2020, ont été retenues et passées au crible. Ce travail d’expertise dantesque, qui a duré 1 an, a été réalisé par le GMN, Groupe Mammalogique Normand, pour ce qui concerne la Liste Rouge des mammifères. « Un tel travail est réalisé tous les 10 ans », explique M. Matton. « C’est la première publication à l’échelle de la région réunifiée ».

L'activité humaine comme principale menace

En tout, ce sont 6 Listes Rouges qui ont été publiées par l’ANBDD, coordinatrice du projet. Outre les mammifères, des rapports ont été rédigé sur les menaces qui pèsent sur les libellules, les amphibiens, les papillons de jour, les criquets-sauterelles et les reptiles. La Liste rouge des amphibiens de Normandie est particulièrement alarmante, puisque sur les 17 espèces analysées, 10 sont considérées comme menacées en Normandie

Six listes différentes, mais un point commun : les menaces qui pèsent sur toutes ces espèces sont les mêmes. Intensification de l’exploitation forestière, forte régression du bocage et importante diminution des surfaces en herbe, usage des pesticides, artificialisation des sols, urbanisation, multiplication des infrastructures de transports, pollution lumineuse... Cette liste-là est encore plus longue, mais elle pourrait se résumer en deux mots : l’activité humaine. Voilà ce qui cause le plus de dégâts sur la biodiversité.

Et le changement climatique ? Pour l’instant, on ne quantifie pas son impact sur la disparition des espèces normandes. Mais selon Romain Matton, il y a déjà des signes. « Par exemple pour les reptiles, certaines espèces remontent vers le Nord » à cause de la montée des températures. « Avec la baisse des précipitations, on a des mares qui se retrouvent à sec et une température de l’eau plus élevée : ça va poser des problèmes pour la reproduction des libellules par exemple. »

Que peut-on faire pour aider ces espèces en danger ? Outre les gestes écolos connus de tous pour agir en faveur de l’environnement, Romain Matton appellent les personnes qui le souhaitent à s’engager dans des associations naturalistes. Cela permet de mieux connaitre la biodiversité, d’une part, et d’autre part de contribuer à l’établissement de ces Listes Rouges. Car mieux on connait la menace qui pèse sur une espèce, plus on peut surveiller son évolution et identifier des priorités d’action pour la sauvegarder.

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