Première région française pour son pourcentage de couverture agricole (70%), la Normandie interroge ses pratiques agricoles. Elevage laitier intensif et grandes cultures conventionnelles laissent (un peu) d'espace aux exploitations plus vertueuses pour l'environnement. Mais quel chemin reste à parcourir pour que tous adoptent des pratiques plus raisonnées? Nous avons été accueillis par des exploitants aux confins de la plaine de Caen, autour de Saint-Pierre-en Auge, où les céréales se partagent l'espace avec la polyculture et l'élevage.
Quelques étals où s’accroche un brouillard piquant se pressent autour de la halle médiévale, édifiée en pierres calcaires. L’hiver, les allées du marché de Saint-Pierre-en-Auge restent clairsemées. Seuls les clients fidèles sont venus échanger quelques nouvelles. Et remplir leurs cabas et autres chariots à roulettes. Ici la proposition de Myriam, 52 ans, pour l’opération #maFrance2022 ne semble pas trouver si facilement un écho dans les esprits. Vous êtes pourtant nombreux à y avoir réagi.
"Il faut aider les agriculteurs à la transition en terme de pratiques pour passer de l’agriculture intensive à l’agriculture raisonnée"
Sur son étal, les légumes d’Eric Larose sont témoins des commandes lancées à la volée. Ce petit producteur de carottes de la Manche se plaît à affirmer que « mes clients sont un peu devenu ma famille ! ». Pierre qui vient de choisir ses poireaux, panais et carottes rebondit aussitôt : « ça vient de la Manche, on peut faire confiance. Quand on achète chez Eric, on voit que c’est bon. » Pour cet éleveur de race à viande à la retraite, la seule chose valable pour ce qui est de l’alimentation et de l’agriculture, c’est de « manger sainement. Pas forcément bio mais varié. »
L'agriculture raisonnée, vous savez, c'est un peu partout aujourd'hui, tout est tellement contrôlé
Eric Larose
Eric me confie que « les clients, ils ont arrêté de me demander si c’est bio. C’est pas écrit donc c’est pas bio. Et ils ne me demandent pas si c’est sain, ils connaissent, c’est tout. » Une manière de balayer la question sur les produits chimiques utilisés dans la culture de carottes des sables. « L’agriculture raisonnée, vous savez, c’est un peu partout aujourd’hui, tout est tellement contrôlé », poursuit-il entre deux clientes.
L'avis de consommateurs sur le marché de Saint-Pierre-en-Auge
Que les légumes sur les étals proviennent d’une agriculture conventionnelle ou raisonnée, ici ça ne se pose pas vraiment comme question. Martine patiente pour acheter des endives, des boules d’or. Et des carottes, bien sûr. J’en profite pour lui demander ce qu’évoque pour elle l’agriculture conventionnelle. « C’est le glyphosate. C’est aussi la faune sauvage qui s’éteint, en lien avec l’abattage des haies. » Elle s’interrompt et s’adresse à Eric, le vendeur de légumes : « pas besoin de sac plastique, on va éviter ! ».
A côté, Rose-Marie attend au stand de sandwicherie. Les haies, elle les évoque elle aussi, un peu comme un souvenir ancien que l’agriculture conventionnelle a chassé. « Quand j’étais enfant, j’allais cueillir des mûres dans les haies avec ma mère, mais elles ont toutes été coupées, on voit la différence aujourd’hui. C’est à cause des machines ça, il faut plus de rendement. ». Depuis 50 ans, 75% des exploitations normandes ont en effet disparu.
La fille de Rose-Marie, Santana, entourée de ses deux fils, n’est « pas sensibilisée à l’agriculture raisonnée, ni aux produits chimiques. Mais je n’achète pas mes légumes en grande surface. Je vais sur le marché ou chez le primeur, ils sont meilleurs. »
Saint-Pierre-en-Auge se revendique porte d’entrée du Pays d’Auge, couvert de parcelles vallonnées et encadrées de haies si typiques de la Normandie. On peut aussi voir Saint-Pierre-en-Auge comme l’un des territoires où vient mourir la plaine Sud de Caen. Plaine où l’horizon se confond avec la terre. Où l’œil est seulement réveillé par la succession des cultures. L’hiver, les premières pousses de blé ou d’orge côtoient des sols parfois nus. Ici on est cœur des grandes cultures, parcelles remembrées de blé, de maïs, d’orge ou de colza. Au cœur d’une pratique conventionnelle de l’agriculture.
L'agriculture intensive, une agriculture de grand-père?
Pourtant quand je rencontre sur son exploitation Geoffroy de Lesquen, le terme d’agriculture « intensive » le dérange. Il est installé depuis 2008. C’est aussi le vice-président de la FDSEA, et il est élu à la chambre d’agriculture du Calvados. « Intensif, cela signifie dans l’esprit des gens que l’agriculteur va assurer quoiqu’il arrive sa production en balançant le maximum de ce qu’il peut mettre en produits phytosanitaires, ça veut dire balancer la sauce. Mais l’agriculture de grand-père c’est fini ! ». Ça sonne comme une référence aux quantités de produits chimiques épandus par une agriculture productiviste - alors peu regardante sur les effets de la chimie - qui devait nourrir les enfants du baby-boom d’après-guerre.
Le conventionnel raisonné ou l'agro écologie
Selon Geoffroy de Lesquen, « 90% des exploitants normands sont déjà passés au raisonné. » C’est là que la définition de ce terme arrive dans la discussion. «Le « raisonné » c’est faire attention à tout ce qu’on met comme produits phytosanitaires. De toute façon, en plus d’une réglementation drastique, il y a une forte pression de la société : les concitoyens sont attentifs. ». Mais officiellement, aucune charte ne vient fixer de seuils, de normes à respecter. La palette de l’agriculture raisonnée est donc, en terme de pratiques, très large, comprise entre l’intensif d’un côté et le bio de l’autre.
Pour sa part, Geoffroy de Lesquen est passé depuis 5 ans à l’agro-écologie. Le but : rendre le sol plus fertile et vivant afin de se limiter les recours à la chimie. Il m’indique son semoir, aux disques encore encombrés de terre, qui dort sous un hangar. « Cet engin permet de semer sans labourer le sol, les disques fendent la terre et les graines y sont déposées. Ça maintient la vie et les micro-organismes dans le sol. Et ça permet aussi de semer alors qu’une couverture végétale est encore présente. » La herse déposée juste à côté est un outil utilisé en agriculture biologique.
"Mais cela ne m’empêche pas d’utiliser du glyphosate. C’est devenu un symbole, mais il y a des produits bien plus dangereux que celui-là. Tout dépend comment on l’utilise. Je pulvérise deux litres par hectares au bon moment, quand le blé est encore en graine. Le produit ne se retrouve pas dans les plants de blé. Ça permet de détruire les plantes qu’on a laissées grandir sur le sol pour le couvrir et servir d’engrais naturel. »
Et pourquoi pas aller plus loin que du « raisonné » ? L’étape ultime, c’est le bio… Alors là, très peu pour lui. « Si je devais aller vers le bio, mes rendements tomberaient de 8 tonnes de blé par hectare à 3 tonnes. Le but c’est quand même de vivre de mon travail.» Les produits phytos représentent aujourd’hui 15% de ses dépenses. Il lui a fallu deux ans pour adopter ces pratiques d’agro écologie. « Ca ne s’apprend pas à l’école, il y a pas mal d’empirisme. Mais déjà pour inciter les exploitants à faire plus de raisonné, une aide pourrait être pertinente : une aide financière mais aussi sous forme d’informations et de conseils», note-t-il.
Accompagner les agriculteurs pour aller vers des cultures plus raisonnées
Etre informée et accompagnée, Marianne Lombard n’aurait rien contre l’idée. Bien plus au nord, en quittant la plaine, cette agricultrice a à faire : elle s’occupe de 125 hectares de terres et d’un cheptel de 100 têtes, en race à viande. Elle s’est lancée dans le métier à 24 ans. « Je suis, je pense dans une pratique conventionnelle parce que pour moi, si on ne met pas de phyto, on n’a rien. En céréales, je ne vois pas comment je pourrais m’en sortir. Certains autour de moi se lancent dans le bio, j’attends de voir comment ça peut marcher. Et si ça fonctionne, pourquoi pas…»
Aujourd’hui, elle se questionne surtout sur l’image que lui renvoient ses concitoyens.
«
Quand je pulvérise, je ne le fais pas pour le plaisir. Parfois on balance juste des oligo-éléments, mais les gens depuis quelques années sont sensibilisés. Ils se bouchent le nez quand ils voient mon tracteur avec le pulvérisateur
Marianne Lombard, agricultrice
Elle poursuit : "Certains qui vivent dans un lotissement à côté d’un de mes champs sont allés se plaindre à la mairie des épandages ! » Situation d’autant plus incompréhensible pour elle qu’« avant, on en mettait beaucoup plus et les gens ne disaient rien. Avec mes amis on parle de nos pratiques et on n’a pas les mêmes, mais chacun respecte. » « Utiliser des phytos tout en étant raisonnable, ça rassure parce qu’on a un minimum de rendement et de récolte. »
Des exploitations à Haute Valeur Environnementale
Christophe Lebaron, lui, a accepté de ne pas se rassurer et de prendre un risque –mesuré. Retour dans la plaine céréalière au sud de Caen. Le brouillard est toujours confortablement installé dans les parcelles, et masque les arbres qui rompent la monotonie de l’horizon. C’est à leur pied que je retrouve l’exploitant. Il a décidé de relever le défi d’une certification. Celle de la HVE ou Haute Valeur Environnementale. Si cela vous parle, c’est que vous l’avez peut-être déjà vue inscrite sur une étiquette de bouteille de vin. Ce certificat existe aussi pour les céréales –même si la HVE ne représente que 2% des grandes cultures.
Petite définition officielle de ce qu’est la HVE, donnée par le ministère de l’agriculture:
La Haute valeur environnementale (HVE) garantit que les pratiques agricoles utilisées sur l'ensemble d'une exploitation préservent l'écosystème naturel et réduisent au minimum la pression sur l'environnement (sol, eau, biodiversité...). Il s'agit d'une mention valorisante, prévue par le Code rural et de la pêche maritime, au même titre que « produit de montagne » ou encore « produit à la ferme
Ministère de l'agriculture
La différence avec le bio ? Des contraintes bien moins fortes. L’agriculteur au regard franc me montre une bande qui longe son champ. Il y a semé de la phacélie, des pois, de l’avoine et des trèfles. "Je dois m’engager à laisser sur 6 mètres de large la végétation pousser, tout au long de la parcelle, pour que la faune s’y installe. Ces plantes abritent aussi des insectes, qu’on appelle des auxiliaires. Il faut quelques années de patience mais l’an dernier, les insectes qui ont colonisé les bordures se sont bien développés, et je n’ai pas eu besoin de pulvériser mon colza en insecticide".
Compter les insectes avant de pulvériser - ou pas
Les carabes sont amateurs d’altises – ennemi juré du colza. Les chrysopes quant à elles préfèrent les pucerons. Les quelques arbres alentour abritent aussi des oiseaux qui apprécient les insectes. Avant de penser à pulvériser, Christophe effectue des comptages d’insectes, afin de déterminer si le seuil est franchi et s’il faut déclencher un traitement. « Avant quand j’étais en conventionnel, je pouvais traiter mon colza 2 à 3 fois par hiver. Cette année, depuis août, je n’ai pas eu à le faire » constate-t-il. Il est aidé par des techniciens de Terres inovia qu’il rencontre une fois par mois, « Je suis contrôlé aussi sur la largeur des bandes fleuries, et sur la quantité de produits phytosanitaires utilisés. Je n’ai pas le droit d’abattre un arbre de la haie. »
Un faisan s’envole à quelques mètres de là, visiblement dérangé par notre conversation. « Pour le moment je ne mesure pas vraiment les effets des changements que j’ai initiés. C’est du long terme, et sans certitude… Faut avoir de la conviction ! Mais le matin quand j’arrive dans mes parcelles et que je constate que des lièvres, des faisans et autres oiseaux se sont installés, ça motive. Ca a plus de sens d’entretenir le milieu et de travailler avec du vivant. »
La motivation, mais pas que ça : son basculement vers le certificat HVE a des causes plus rationnelles : « certains industriels de l’agroalimentaire demandent de plus en plus la certification Haute Valeur Environnementale. Et la Politique agricole commune version 2023 a prévu des aides financières selon l’engagement environnemental. On va aussi avoir des problèmes d’approvisionnement en engrais, la production a baissé en Chine et aux USA. Alors on doit faire un travail de précision, savoir comment baisser les quantités épandues sans perdre en rendement. »
Le raisonné : de la pure communication?
Des considérations qui ont de quoi agacer un paysan-meunier-boulanger qui cultive ses parcelles de blé en bio, à 12 petits kilomètres de là. Emmanuel Marie se contente de 23 hectares, bien loin derrière ses collègues qui travaillent en conventionnel, pour fabriquer sa farine puis ses pains. « Je veux montrer que c’est possible de faire simplement des choses bonnes pour la santé et l’environnement. »
Pour lui, « une agriculture raisonnée, ça ne veut absolument rien dire du tout ! Ce n’est que de la communication. Tant que les quantités de produits phytosanitaires autorisées en « raisonnée » ne seront pas définies officiellement, ça ne sera que de la com. » « Forcément, on est tous raisonnables, moi je ne fais pas n’importe quoi. Ça masque tout simplement le fait que les gens ne changeront pas réellement leurs pratiques dans l’agriculture conventionnelle. C’est tout un système agricole qui arrive à sa fin et en créant une Haute Valeur Environnementale, c’est un moyen de faire perdurer le système. Or, il faut en changer ! ». Le discours est véhément. Emmanuel Marie représente les idées de la Confédération Paysanne, syndicat agricole en rupture avec la FNSEA. Il reconnait cependant que « la Haute qualité environnementale est un bon outil, ça pourrait être une mesure intéressante, mais ce qui est rageant c’est qu’elle a été faite comme toujours a-minima, sans être réellement contraignante. Ça ne fera pas vraiment bouger les lignes. » Du côté de l’élevage laitier, la question de l’intensif, du raisonné et du bio se pose aussi.
A quelques kilomètres de chez Emmanuel Marie, à Mézidon-Canon, Loïc et Louis viennent de s’associer en Gaec. Celui du bois de Canon. Loïc est installé en bio depuis longtemps. Cet ancien vendeur en pâtisserie industrielle a fait le choix d’un petit troupeau de race normande. Louis et lui connaissent toutes leurs bêtes par leur prénom.
Ici les vaches ne sont pas des numéros !
Louis, 27 ans, éleveur laitier bio
Leurs 30 vaches produisent 110 000 litres de lait par an, transformés à 75 % en tome. Cette transformation à la ferme reste rare dans le paysage (moins de 1% des exploitations en Normandie). « On est une exploitation atypique : on n’a que 30 vaches, 52 hectares et on travaille à 2 associés plus un salarié à temps plein. C’est viable. » constate Loïc. Ici on est bien loin de l’élevage intensif.
Si eux ont fait le choix du bio, de là à guider tous les agriculteurs vers des pratiques raisonnées, il y a un fossé qu’ils ne sont pas prêts à franchir. Loïc me dit que « si vous allez voir 1000 fermes, vous verrez 1000 pratiques différentes. Evidemment, sensibiliser à la protection de notre planète et utiliser moins d’engrais et de phyto, c’est bien. Mais il ne faut pas obliger les gens à faire des trucs. De toute façon, ajouter des labels ça risque de perdre les consommateurs encore plus. Il faudrait au contraire clarifier les choses ». Reste tout de même qu’ « on marche sur la tête : tous les ans, on doit payer 800 euros pour avoir le logo du label bio. On doit payer pour prouver qu’on bosse bien, ça devrait être l’inverse ! » s’agace-t-il.
L'évolution des pratiques vue par les futurs exploitants agricoles
Les fermes en agriculture biologique représentent dans la région 8% des exploitations, mais depuis 2010, les installations ou conversions en bio ont plus que doublé. Les pratiques agricoles ont évolué ces dernières années. Qu’en est-il des agriculteurs de demain, de ceux qui sont formés actuellement dans les établissements d’enseignement agricole ?
Retour à Saint-Pierre-En-Auge, où l’établissement public agricole Le Robillard forme aux métiers du monde agricole des lycéens, des étudiants mais aussi des adultes. Quand j’arrive sur la ferme du lycée Robillard de Saint-Pierre-en-Auge, c’est pour assister à un cours avec des élèves de BTS de production animale. Ce matin, manipulation et déplacement des bovins (ceux restés en stabulation, les vaches laitières sont déjà à l’herbe) et échographies un peu plus tard. On va donc parler zootechnie. C’est le cours de science de l’élevage et de la reproduction.
Il ne peut pas y avoir qu'un mode d'agriculture
Camille Laurens"
Parmi les élèves en deuxième année de BTS, Camille Laurens se destine à devenir enseignant dans le domaine. Faire du raisonné dans l’élevage, selon lui, Camille l’apprend déjà ici. « Le raisonné dans l’élevage bovin, c’est quand on observe avant d’agir. Ici on apprend à faire des diagnostics pour éviter les intrants. Il faut comprendre la physiologie de l’animal pour réagir au plus vite et faire mieux. »
Quant au regard parfois désapprobateur porté sur les pratiques agricoles intensives : « Un bon agriculteur n’est pas forcément en bio. J’ai des amis ils ne sont pas en bio, ils sont en élevage laitier Holstein, et c’est pas pour autant qu’ils sont mauvais avec leurs animaux, que c’est de l’intensif pur. On peut avoir un bon intensif. Les gens ont surtout des idées reçues parce qu’ils ne connaissent pas. » En somme, encourager tous les agriculteurs à abandonner les pratiques conventionnelles ou intensives, Camille n’y croit pas du tout.
Aline Ruelle se destine à être salariée agricole ou technicienne ; pour elle, « tout système a ses avantages et inconvénients. Le raisonné, c’est entre le conventionnel et le bio, c’est réduire au max les intrants, les antibiotiques mais il n’y a pas de système parfait. » Ses parents sont en polyculture élevage conventionnel.
L’air frais du raisonné souffle avec force du côté des enseignements. Le support pédagogique qu’est la ferme a évolué ces dernières années : les vaches laitières Holstein ont été échangées contre des races normandes, le maïs a disparu au profit de l’herbe et du foin. Le lait est transformé localement en fromage. Bref, le système de production s’ancre dans une Appellation d’Origine Protégée. Autrement dit dans une forme d’agriculture raisonnée.
L'avis des enseignants sur l'évolution des pratiques agricoles
Depuis plus de 10 années qu’il est au lycée, d’abord comme élève puis responsable du troupeau, Clément Debargue a vu les attentes des élèves évoluer. « Les étudiants sont de plus en plus intéressés par les méthodes alternatives et l’agroécologie », souligne-t-il. « Ils demandent beaucoup de pratique, faire des manipulations, comprendre le fonctionnement des ruminants et arrêter de travailler sans savoir pourquoi et pour qui. Ils veulent redevenir maîtres de leurs produits –même si derrière on ne maitrise pas tout sur le prix de viande ou prix du lait, c’est la grande tristesse du monde agricole …»
Pour répondre à la fois aux demandes des élèves et aux directives du ministère de l’agriculture dont dépend le lycée, de nouvelles filières ont vu le jour. Céline Lemignier est responsable de la filière «Enseigner à produire autrement ». Ça consiste explique-t-elle à « mettre l’agro écologie au centre des pratiques agricoles. Ce qui implique de préserver les ressources comme l’environnement et l’eau, diminuer l’impact carbone et améliorer le bien-être animal.» Trois licences professionnelles ont été mises sur pied il y a 4 ans. « Les jeunes sont sensibilisés à la cause environnementale et au réchauffement climatique. Ils sont moteurs aussi dans le bien-être animal. On apprend aussi aux futurs agriculteurs à débattre, communiquer et se parler. C’est essentiel d’instaurer des liens avec l’entourage pour apprendre à produire autrement. »
Expliquer et se faire comprendre aussi de la société. Pour la plupart des agriculteurs rencontrés, il est urgent de changer le regard porté par les Français sur leur travail.