Le 11 mars 2024, la Région Normandie a décidé de ne plus soutenir financièrement les fêtes qui programment des présentations d’animaux sauvages. Dans le viseur des élus : les fauconniers et leurs rapaces. Victoire pour les associations animalistes, incompréhension pour les organisateurs de spectacles.
C'est une première en France, mais ce fauconnier basé depuis 35 ans à Cintray dans l'Eure se serait bien passé de cette décision.
Depuis un mois, Patrice Potier peste contre le nouveau dispositif adopté par la Région Normandie, qui vise à ne plus subventionner les spectacles mettant en scène des animaux sauvages, notamment lors des fêtes médiévales.
Une décision prise pour le bien-être animal et pour lutter contre la maltraitance, selon la Région.
Lutter contre la maltraitance
Un non-sens pour ce professionnel qui présente quatre-vingts spectacles et partage sa passion pour les animaux partout en France.
"Notre métier n'est pas de maltraiter les animaux. Nous sommes suivis et contrôlés par des services vétérinaires, nous travaillons avec le monde scientifique", se défend Patrice Potier, Fondateur des Ailes de l'Urga et Vice-président de l'Association Nationale des Voleries Itinérantes.
Contactée, la région indique que cette décision, inédite en France, anticipe la loi sur l’interdiction de programmer des animaux sauvages dans les spectacles itinérants à compter du 1er décembre 2028.
Une loi dans l'air du temps
"Je dirais que c'est une décision qui va dans l'air du temps, estime Nathalie Porte, vice-présidente en charge du tourisme et de l'attractivité à la Région Normandie. Ce que l'on a constaté, c'est que les démonstrations d'animaux sauvages choquent certains publics, et qu'il y a la possibilité de faire d'autres propositions."
La Région souhaite ainsi priviléger des manifestations pour le grand public, notamment familial, de plus en plus, opposé à l'exploitation d'animaux sauvages dans les spectacles.
Région Normandie
Mais dans la famille Potier, fauconnier de père en fils, cette décision va à l'encontre de ce qu'ils défendent.
"Cette décision est hâtive car elle se base sur la loi de maltraitance animale, mais dans son rapport, la loi stipule que la fauconnerie et les spectacles de rapaces ne sont pas considérés par cette loi-là", pointe du doigt Simon Potier, trésorier de l'Association Nationale des Voleries Itinérantes. "La loi ne nous concerne pas", martèle-t-il.
Une victoire pour l'association Paz
Cette prise de position, votée en Commission permanente le 11 mars dernier, est une victoire "historique" pour l'association de protection animale PAZ.
"S’opposer aux spectacles mettant en scène des animaux sauvages, c’est reconnaître leur sensibilité et leurs besoins. Nous nous réjouissons de cet engagement de la Région Normandie", a réagi, dans un communiqué, Amandine Sanvisens, cofondatrice de l'association PAZ (Paris Animaux Zoopolis).
🎉La @RegionNormandie devient la première Région à adopter une délibération qui prévoit de ne pas subventionner les évènements qui présentent des animaux sauvages, dont les fêtes médiévales⚔️🦅🦉
— PAZ (@paz_zoopolis) March 20, 2024
👏Bravo la #Normandie @Herve_Morin @nathporte !https://t.co/zRooMthcH3 pic.twitter.com/fkrYDDe76R
L'association précise qu'en 2023, 22% des fêtes médiévales normandes ont fait appel à des spectacles de fauconnerie (à Falaise, Harcourt, Pontorson, Cerisy-La-Forêt, Thietreville et Rouen).
Des fauconniers en colère
Mais les fauconniers que nous avons rencontrés estiment que la Région Normandie a voté cette mesure, en se basant uniquement sur une audition de membres de l’association animaliste Paz, pas en écoutant les professionnels du spectacle.
"On ne va pas chercher les animaux dans la nature pour les dresser et les exploiter pour faire de l'argent, comme le dit l'association", proteste Patrice Potier.
Voici le reportage tourné par Frédéric Lafond et Eric Lombert dans l'Eure :
Cette décision de la Région Normandie pourrait faire jurisprudence et être adoptée par plusieurs Régions en France. L'association Paz compte sur l'effet dissuasif de l'arrêt des financements régionaux pour pousser les organisateurs à renoncer d'ores et déjà aux animaux sauvages.