Depuis l'hiver dernier, plusieurs dizaines de Normands ont fait analyser leurs urines pour en évaluer le taux de glyphosate. L'herbicide classé "cancérogène probable" a été retrouvé chez tous les volontaires. Contrairement à trois adhérents de la FDSEA, qui dénonce des analyses biaisées.
Le 24 avril dernier, 35 "Pisseurs volontaires" ont déposé plainte auprès du TGI de Caen. L'analyse de leurs urines, prélevés devant huissier en février dernier, a révélé la présence significative de glyphosate. Tout comme d'autres participants normands à La Campagne glyphosate, initiée par Europe Ecologie les Verts et d'autres associations militant pour une agriculture sans pesticide. S'estimant pointés du doigt, une partie de la profession agricole a décidé de contre attaquer. La FDSEA du Calvados participe au débat avec les analyses d'urine de trois de ses adhérents, chez qui l'herbicide est "non détectable".
Le glyphosate est aujourd'hui l'herbicide le plus utilisé au monde. Selon l'INRA, "il représente 9100 tonnes produites en 2016" en France. Son utilisation fait débat sur la scène politique, tout comme sa nocivité pour la santé au sein de la communauté scientifique. "Le caractère cancérigène probable du glyphosate c'est parce que c'est cancérigène chez la souris, ça a des effets génotoxiques sur des cellules en laboratoire mais on n'a pas suffisamment de données épidémiologiques pour dire que c'est cancérigène, certainement, pour l'homme", expliquait en février dernier, conseillère régionale écologiste. D'où l'organisation de prélèvements à grande échelle pour pousser les pouvoirs publics à lancer des programmes de recherche sur le sujet.
La FDSEA du Calvados appelle à son tour les pouvoirs publics à se saisir du dossier mais pour apporter des réponses aux questions que posent, selon elle, les analyses des "pisseurs volontaires". "Ce sont plutôt des citoyens avertis, qui ont une alimentation très saine, voire bio, qui vivent dans un milieu urbain", indique Xavier Hay, secrétaire général de la FDSEA du Calvados, avant de s'interroger: "Comment se fait-il qu'ils puissent avoir des taux parfois dix fois supérieurs aux notres alors que nous, nous sommes des utilisateurs raisonnés du glyphosate ? C'est incompréhensible."
"Agri-bashing" pour la FDSEA
Les adhérents du syndicat agricole perçoivent "la Campagne glyphosate" comme une attaque contre leur profession et plus particulièrement contre l'agriculture française. "Nos collègues américains, sud-américains ou asiatiques épandent des doses massives de glyphosate sur des cultures comme le maïs ou le soja qui sont ensuite récoltées. Nous, on l'utilise en interculture, c'est à dire avant de semer du blé, par exemple. A aucun moment, on met du glyphosate sur du blé", plaide Geoffroy De Lesquen. Et d'expliquer la présence de l'herbicide dans les urines des "pisseurs volontaires" par "la lécithine de soja ou l'amidon de maïs dans notre alimentation aujourd'hui qui sont issus à 95% de plantes importés."Autre piste avancée par la FDSEA du Calvados pour expliquer les résultats recensés par la "Campagne glyphosate" en Normandie, celle des produits d'entretien, sans aucun rapport avec l'alimentation. "Les analyses recherchent l'ampa, l'acide aminométhylène-phosphonates, le porduit de dégradation du glyphosate mais aussi celui d'un grand nombre de détergents et de lessive. Est-ce que l'origine de cet Amap est alimentaire ou est-ce que ça vient des produits d'entretien ?", demande Geoffroy De Lesquen.
Si le syndicat agricole et les associations écologistes n'arriveront visiblement pas à se mettre d'accord sur l'utilisation des pesticides, les deux parties semblent en revanche d'accord pour que la recherche scientifique fasse toute la lumière sur ce sujet.