Avant la signature de l'accord sur la pêche à la coquille prévu vendredi, Dimitri Rogoff nous explique en quoi il s'agit-là d'un bon accord pour la pêcherie normande, " un bon point de départ ".
Mercredi, suite à des affrontements en mer au retentissement international entre pêcheurs français et britanniques, un accord sur la pêche de la coquille Saint-Jacques dans la baie de Seine, au terme de plusieurs heures de discussions à Londres, a été trouvé.
Il s'agit d'un renouvellement de l'accord de 2017 concernant les bateaux de plus de quinze mètres avec un accord de principe pour les moins de 15 mètres en échange de compensations pour les pêcheurs britanniques encore à définir.
De son côté, Jim Portus, directeur général de South Western Fish Producers Organization, à nos confrères de la BBC s’est dit heureux de l’accord « qui respecte l’honneur des pêcheurs des deux côtés ». Mais il prévient : l’accord ne sera finalisé que si les pêcheurs britanniques ne sont pas perdants." C'est un pied de nez au Brexit, c'est un bon accord, on a réussi à faire en sorte que tout le monde y trouve son compte (...) Maintenant on a intégré toute la flottille anglaise dans l'accord (bateaux de plus et moins de 15 m), il y avait un espèce de blocage avec ça depuis 5 ans, on va peut-être maintenant parler d'une vraie gestion de la ressource ". Dimitri Rogoff, président du comité régional des pêches en Normandie
Gestion durable de la ressource
Les pêcheurs français et britanniques se disputent une des zones de pêche de la coquille située dans la baie de Seine. A leur initiative, les pêcheurs normands n'y pêchent la Saint-Jacques que du 1er octobre au 15 mai. " Ils ont du mal à comprendre ça et qu'en plus, ces règles, ces restrictions viennent de la base elle-même, les Britanniques ont une approche libérale de la pêche, ils pensent qu'on est un peu fous de mettre en place une organisation qui bride les gens".
Depuis plusieurs années, les pêcheurs français ont en effet mis en place un système de gestion avec un encadrement strict, qui se traduit par une ouverture de la pêche entre octobre et mai, une limitation du nombre de jours de pêche par semaine, des quotas journaliers, des mesures techniques restrictives pour les engins, etc...
L'ombre du Brexit
Pour les Britanniques, l'accord en vigueur jusqu'en 2017 les obligeait à respecter le calendrier français mais ne concernait que les bateaux de plus de 15 mètres. C'est ce qui a provoqué l'affrontement. L'accord défini mercredi devrait s'appliquer jusqu'à la fin 2018. « C'est le meilleur des cas pour les deux parties (...) dans la mesure où les Britanniques étaient bien dans leur droit. C'est un point de départ pour travailler tranquillement les semaines à venir. "
Côté britannique, Jim Portus, représentant de l'industrie britannique de la coquille Saint-Jacques durant les négociations, a affirmé à la presse que l'accord ne valait que pour 2018. Pour rappel, le calendrier de sortie du Royaume-Uni de l'UE est prévu fin mars 2019.
"Le Brexit est une chape de plomb qui pèse dans toutes nos discussions" explique Dimitri Rogoff. Il y a cette idée chez les pêcheurs britanniques de récupérer la mainmise sur les eaux. Ils sont totalement instrumentalisés".
Et d'ajouter: " Faut pas que les 27 se loupent sur la question de la pêche, sinon c'est un échec européen"." Si c'est un galop d'essai ce qui se passe, cet accord, c'est un pied de nez au Brexit même s'il va peut-être tout mettre à plat l'année prochaine. Mais le Brexit, c'est pas tout, Brexit ou pas, on se croise en mer tous les jours et faudra bien qu'on travaille ensemble"
Les accords, une longue histoire
L'accord devrait être signé vendredi. L'histoire de la pêche à la coquille est faite d'accords réguliers entre nations. Ainsi, sur la page facebook de Dimitri Rogoff, on remonte aux origines du tout premier accord, en 2012, entre pêcheurs français et britanniques où déjà les caméras de France 3 Normandie étaient présentes lors d'affrontements en mer.
Cette année, les pêcheurs britanniques étaient restés insensibles aux propositions de gestion commune de la zone, s’appuyant sur leur droit de pêche.
" Il y a toujours eu des accords dans le monde de la pêche, quelque soit le type de pêche et il faudra bien que ça continue"
Pour exemple, ce reportage de 2011 où l'on voit pêcheurs normands, britanniques, anglo-normands, bretons, hollandais et belges autour d'une même table à Cherbourg afin de renouveler, l'accord dit "Manche central" vieux de 40 ans, un accord qui règle la cohabitation entre caseyeurs et chalutiers.