Des militants pour le climat du mouvement Scientifiques en rébellion ont bloqué le port du Havre vendredi 12 mai 2023 afin de dénoncer le projet de terminal méthanier "Cape Ann". Ils écopent d'amendes à l'issue de leur garde à vue mais ne veulent pas se laisser impressionner.
Ils étaient dix-huit militants, vendredi 12 mai 2023, a s'être mobilisés sur l'écluse François 1er pour bloquer le port du Havre. Il s'agit d'une action de désobéissance civile menée par les collectifs d'Extinction Rébellion, Dernière Rénovation et Scientifiques en rébellion. Les militants de ce dernier collectif étaient facilement reconnaissables à leurs blouses blanches, symboliques de leurs fonctions.
Ce collectif est né en 2020 suite à un appel à la désobéissance civile de 1 000 scientifiques, paru dans le journal Le Monde. Ces scientifiques, venant de différentes disciplines, "sortent de leurs laboratoires" pour se mobiliser contre l’inaction face au dérèglement climatique et à l’effondrement de la biodiversité.
Il y a un double discours des décideurs politiques et entreprises qui prétendent respecter les Accords de Paris. En tant que scientifiques on se doit de sortir de nos labos pour montrer l'impact de ces projets avec des données scientifiques.
Jérôme GuiletAstrophysicien, membre de Scientifiques en rébellion
L'écluse François 1er est un lieu aussi bien stratégique pour bloquer la circulation routière du port que symbolique pour dénoncer l'installation du terminal méthanier flottant "Cape Ann", les bateaux méthaniers à destination du terminal devant passer par cette écluse.
Porté par TotalEnergies, ce projet doit permettre d'importer du gaz naturel liquéfié (GNL) et ainsi diversifier les sources d'approvisionnement de la France, notamment pour réduire la dépendance au gaz russe.
Une fausse énergie de transition ?
Ce projet est dénoncé par ces collectifs en raison de son lourd impact carbone. "C'est la pire chose que l'on puisse faire d'aller importer du gaz de schiste des Etats-Unis pour le ramener en France. Si c'est interdit en France c'est qu'il y a une raison" exprime Jérôme Guilet.
En s'appuyant sur plusieurs rapports scientifiques, l'astrophycisien qui travaille au Commissariat à l’énergie atomique (CEA) dénonce les "faux discours qui présentent ce projet comme une énergie de transition".
Le méthane est une énergie fossile qui est souvent présentée par ses promoteurs comme « une énergie de transition », voire peu polluante (jouant parfois pour cela de son appellation de « gaz naturel »). La réalité est plus complexe. Le méthane est lui-même un gaz à effet de serre extrêmement puissant : son pouvoir réchauffant est entre 30 et 80 fois plus élevé que celui du CO2. En conséquence, (...) le pouvoir réchauffant du méthane peut devenir similaire à celui du charbon si on prend tout son cycle de vie en compte et pas sa seule combustion.
Communiqué du collectif Scientifiques en rébellion12 mai 2023
Durant leur action, les militants présents sur le pont ont bloqués le trafic pendant quelques heures avant d'être interpellés et placés en garde à vue pendant une vingtaine d'heures. A l'issue de celles-ci, ils écopent tous d'amendes, dont les montants exacts ne sont pas encore connus.
La désobéissance civile davantage réprimée
Ces militants sont conscients des risques mais ne comptent pas changer leur engagement pour autant, la désobéissance civile étant perçue comme le dernier recours pour se faire entendre. Jérôme Guilet participe à ce type d'actions depuis plusieurs années et a toutefois la sensation qu'elles sont de plus en plus "criminalisées" par les pouvoirs publics. Les gardes à vues se "systématisent" alors que ces actions sont "non-violentes" et jugées d'"intérêt général" par ces activistes qui souhaitent dénoncer "l'irresponsabilité politique" face à la crise climatique actuelle.
Ce n'est pas la première fois qu'une action de désobéissance civile est menée au Havre pour protester contre ce projet de terminal méthanier. Des militants d'Exction Rébellion avaient déjà mené une opération similaire en février dernier. De futures actions sont déjà prévues par les différents collectifs mobilisés.