Les internes des urgences du CHU de Rouen ont reçu un mail pour le moins virulent de la part d'un de leurs responsables alors qu'ils faisaient grève, notamment pour dénoncer l'allongement de leur cursus.
"Vous pouvez tout à fait vous comporter comme des ouvriers de raffinerie et vous foutre de tout". C'est l'une des phrases qu'ont eut la surprise de lire une vingtaine d'internes du CHU de Rouen lundi matin. Dans un mail envoyé par l'un de leurs supérieurs, ces étudiants en grève sont priés de revenir à leur poste de travail. "Pour les gardes, les réquisitions sont en cours de rédaction. N’attendez cependant pas qu’on vienne vous les porter en main propre", poursuit le même médecin manifestement très irrité.
Publié sur les réseaux sociaux, le mail qui aurait dû rester en interne a fait beaucoup réagir. Des milliers d'internautes l'ont relayé, certains dénonçant le ton employé par le médecin à l'égard des internes. Un avis partagé par François His de la CGT santé au CHU de Rouen : "les propos tenus sont inadmissibles. Un service d'urgence a besoin d'unité. [...] Ce qui a été écrit est extrêmement méprisant pour les ouvriers de Total qui ont défendu leur travail !"
"Si vous aviez 2 sous d’intelligence et de conscience, vous auriez été au moins présents ce matin"
Dans ce message que nous avons pu consulter et authentifier, les internes grévistes se voient reprocher le mouvement de grève auquel ils participaient depuis plusieurs jours : "Si vous aviez 2 sous d’intelligence et de conscience, vous auriez été au moins présents ce matin. [...] Impossible de compter sur vous !" La direction du CHU de Rouen "ne souhaite pas faire de commentaires sur les propos tenus." Certains syndicats souhaitent désormais obtenir des explications du service des ressources humaines.
"Les soignants sont à bout"
Comme leurs homologues dans d'autres CHU français, les futurs médecins rouennais dénoncent l'ajout une quatrième année d'internat pour les étudiants en médecine générale. Présentée dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2023, cette "année de consolidation" restera "une incitation", a tenté de rassurer le ministre de la Santé François Braun. "Je ne souhaite pas que ce soit une obligation", a-t-il affirmé sur FranceInfo.
Aux urgences du CHU, le climat est tendu depuis plusieurs années. Au-delà des revendications des internes, le service manque de personnels et la fermeture de lits a également un impact pour les médecins des urgences. "C'est au gouvernement qu'il fallait adresser ce mail. Un hôpital doit, de toutes façons, pouvoir fonctionner sans internes, [...] ce sont des étudiants", réagi Guillaume Herlin, secrétaire de la section SUD du CHU de Rouen. "Je condamne ces propos qui sont discriminants", poursuit-il. Pour le représentant de la CFDT du CHU, le ton du message n'est pas adapté : "les internes ont le droit d'exprimer leur mal-être. [...] Sur le fond, le problème c'est le manque de lits, les soignants sont à bout", souligne Louis Frédéric.