Le cidre était à la fête aujourd'hui dans un restaurant situé sur les quais de Rouen pour un premier brunch organisé autour de cette boisson qui revendique ses lettres de noblesse.
Le cidre à papa, c'est fini ! On le servait traditionnellement en famille pour la chandeleur. Il a même longtemps fait fonction d'eau à table. C'était un objet social dévalué notamment en Normandie, région productrice de cidre.
Il a même failli disparaître dans les années 80. Il ne valait rien et rapportait donc peu. On arrachait les pommiers. Il avait atteint un plafond de verre en terme d'exigence du consommateur assez faible et d'une image dévalorisée.
Mais les producteurs se sont battus, se sont regroupés autour d'une filière et des AOP sont apparues. Elles sont 4 en Normandie. Le cidre du pays d'Auge est né en 1996, suivi du poiré Domfront en 2002, du cidre du Cotentin en 2016 et le dernier arrivé en 2020, le cidre du Perche alors que le cidre du Pays-de-Caux est engagé dans cette démarche pour l'obtenir.
Les cidres & poirés AOP allient savoir-faire ancestral et exigences des cahiers des charges. Ils ne sont ni gazéifiés, ni chaptalisés, ni pasteurisés. Ils se prêtent à de nouvelles expériences gustatives, gastronomiques ou improvisées
Le cidre, un best-seller urbain
Comme ce fut le cas pour la bière qui a pris un coup de jeune et dont le marché a été relancé depuis quelques années avec la multiplication des microbrasseries artisanales, le cidre se porte bien et notamment auprès d'un public de jeunes urbains.
A Paris, les caves à cidre se multiplient et le cidre s’invite désormais dans les restaurants étoilés. En Normandie également, il commence à reprendre le chemin du succès avec des cavistes qui proposent une large gamme de cidres à Rouen et à Caen. Il existe même désormais des oenologues dans nos chambres d'agriculture. Il faut dire que le cidre s'est réinventé. Il est créatif et de qualité. Il s'est développé grâce au marketing (étiquettes inventives et esthétiques, noms humoristiques) et a su drainer une nouvelle clientèle.
ils se développent grâce au marketing et drainent une nouvelle clientèle. »
Le cidre répond également à une tendance mondiale. Les jeunes veulent aujourd'hui des boissons fraîches, c'est-à-dire pas trop alcoolisées et carbonatées, c'est-à-dire effervescentes
Dominique Hutin, journaliste et œnologue.
Dominique Hutin fait un parallèle avec le phénomène constaté dans l'univers du vin.
Après les vins bio, sont arrivés les vins naturels qui sont très tendances en ville car il y a une considération environnementale importante. En milieu urbain, c'est un levier incroyable. Le cidre entre dans cette mouvance. Il a une image d'un produit authentique et naturel. On peut égalerment faire le parallèle avec les vins d'Auvergne qui sont devenus hype avec les vignerons indépendants qui sont allés se raconter ailleurs, à l'export. Dans le cidre, il y également toute une constellation de jeunes talents qui s'installent et qui se réinventent. Enfin, le cidre c'est comme le rosé, il a su se désaisonnaliser. Aujourd'hui, dans les grandes surfaces on trouve des rayons entiers de rosé. Avant, ces vins étaient liés à l'été. Ce n'est plus le cas. Tout comme le cidre qui n'est plus lié uniquement à la Chandeleur.
Dominique Hutin, journaliste et oenologue
Le cidre se réinvente et entend le faire savoir. Devenu hype chez les citadins et notamment à Paris, il entend devenir tendance également en région et notamment là où il est produit. La profession se mobilise dans ce sens. L'IDAC (l'interprofession des appellations cidricoles) entend multiplier les événements de promotion de ces cidres et poirés. C'était le cas ce dimanche 25 septembre avec ce brunch où des producteurs présentaient leurs elixirs.