La statue de Napoléon a retrouvé son socle devant l’Hôtel de Ville de Rouen (Seine-Maritime), après deux ans de restauration, mais aussi de polémiques sur des rumeurs de « déboulonnage » par la mairie. Sur place, de simples passants captivés et des opposants motivés. Ces derniers regrettent l’absence d’une cérémonie officielle pour le retour de Napoléon.

Le soleil se lève, l’Empereur s’élève. Dès 6h30 ce matin, la statue de Napoléon arrive à Rouen. Commence alors la lente repose sur son socle. C’est l’aube, mais les premiers curieux prennent déjà des photos, et découvrent l’incroyable travail de restauration effectué par les équipes de Philippe Pagnon, de la Fonderie Coubertin.

Devant l’Hôtel de Ville, quelques badauds, attirés notamment par la lévitation de cette imposante masse de sept tonnes. Mais au milieu des simples passants, certains ne sont pas là par hasard. Parmi la soixantaine de personnes, on retrouve quatre jeunes, bérets sur la tête, drapeaux à la main. "On est des rouennais qui aiment beaucoup Napoléon, et qui aiment surtout la France" nous explique Thomas, 20 ans, pour qui il était important de montrer "qu’il reste encore des gens fiers de leur pays".

Pour Nicolas, 22 ans, qui "redécouvre la statue" et trouve le rendu "excellent", "il y a clairement eu une volonté politique de remplacer Napoléon". Une allusion à la proposition du maire (PS) de la ville de placer une figure féminine à la place de l’Empereur. Au lendemain du départ de la statue en restauration, Nicolas Mayer-Rossignol suggérait de placer une œuvre représentant Gisèle Halimi, avocate et militante des droits des femmes, et de déplacer Napoléon à un autre endroit de la ville.

La polémique née de cette proposition a accouché d’une concertation publique. Les rouennais ont voté majoritairement pour le maintien de Napoléon devant l’hôtel de ville. Fin de l’histoire ? Non, car ceux qui accusaient hier Nicolas Mayer-Rossignol de vouloir "déboulonner" Napoléon, étaient aujourd’hui devant la mairie pour de nouveau pointer du doigt l’édile.

L’absence de cérémonie, une énième polémique

Ainsi, au milieu des simples passants, on retrouve des figures politiques de la droite et de l’extrême droite : Guillaume Pénelle, délégué départemental du Rassemblement National en Seine-Maritime ; quelques jeunes de l’UNI, syndicat étudiant de droite qui avait lancé une pétition contre le "déboulonnage" ; mais aussi Laurent Bonnaterre, président (Horizons) du principal groupe d’opposition de Métropole Rouen Normandie.

L’ancien candidat à l’élection régionale regrette qu’aucune cérémonie n’ait été organisée. Il faut selon lui "célébrer cette magnifique statue". Laurent Bonnaterre accuse Nicolas Mayer-Rossignol de ne pas avoir prévenu la population, ni prévu discours et cotillons.

Aurait-il exigé une cérémonie s’il n’y avait pas eu deux ans de polémique, pour fêter le simple retour d’une statue sur son socle ? "C’est une bonne question. Moi ce qui m’a gêné, c’est l’idée de Cancel Culture. S’il n’y avait pas eu de polémique, peut-être que tout le monde aurait juste été très heureux de retrouver la statue, il n’y aurait pas eu forcément besoin de le symboliser. Ce qui m’importe aujourd’hui, c’est de dire : si on commence à déboulonner des statues, des plaques de rues, on est cuit, et il n’y a plus d’Histoire de France."

C’était une bonne idée de mettre une femme. Moi j’aurais mis Jeanne d’Arc.

Siam, cantonnière de la Ville de Rouen

Au milieu des simples passants, une femme qui a particulièrement suivi l’affaire. Elizabeth Labaye, élue de la Ville de Rouen en charge du patrimoine et du matrimoine. "Je la trouve belle, je suis très contente du résultat". La conseillère municipale rappelle l’investissement - "plus de 280 000 euros, c’est quand même beaucoup d’argent public" - et balaye les nombreuses "polémiques stériles". "Certains ont fait croire qu’on voulait la déboulonner. Alors que, de fait, quand on met autant d’argent dans une statue, ce n'est pas pour la déboulonner".

Selon Elizabeth Labaye, la municipalité n’avait qu’une envie : placer des femmes dans l’espace public. "On est la moitié de l’humanité et ça ne se voit pas forcément", sourit l’élue. Pour preuve, moins de 5% des rues rouennaises portent le nom d’une femme. Mais les choses vont évoluer. Prochainement, la station de métro "Palais de Justice" changera de nom et deviendra la station "Gisèle Halimi".

Et puis au milieu des simples passants, il y a Siam. Mais Siam ne fait pas que "passer". Plus précisément, elle passe derrière les autres pour ramasser leurs déchets. Cantonnière de la ville de Rouen, elle va de nouveau travailler au pied de l’imposant Napoléon. "Moi monsieur, je suis contre son retour", dit-elle fermement. "C’était une bonne idée de mettre une femme. Moi j’aurais mis Jeanne d’Arc".

Dans sa tenue orange fluo, au pied d’un Napoléon tout en bronze, Siam aurait aimé un peu de "changement" au nom de "l’égalité homme-femme". Ce ne sera pas pour cette fois.

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