Témoignage. Après la pose d'une bandelette urinaire défectueuse, elle vit un véritable "cauchemar" depuis plus de dix ans

Publié le Écrit par Paul Grelier et Noémie Furling

Catherine Rivalland est une des nombreuses victimes suite à une pose de bandelette entre le vagin et la vessie. Violentes douleurs, invalidités, infections urinaires, brûlures… Les effets secondaires peuvent être nombreux. Des associations prennent ce problème à bras-le-corps pour alerter les autorités de santé et l'État.

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En 2013, Catherine Rivalland, ancienne préparatrice en pharmacie habitant à Lagord, près de La Rochelle (Charente-Maritime), fait une descente d'organes à l'âge de 46 ans. "Je faisais un métier dans lequel je portais énormément de caisses. J'ai même aidé mon mari lorsqu'il était ostréiculteur. Je n'ai jamais fait spécialement attention à mon corps", avoue-t-elle. On décide alors de lui poser une bandelette périnéale. Une opération qui, jusqu'à aujourd'hui, lui fait vivre un enfer.

Un calvaire au quotidien

Allongé la majorité de son temps sur un lit d'hôpital, elle décrit sa vie comme "un cauchemar". Une simple opération banale qui se transforme "au réveil, avec des énormes douleurs suite à une errance médicale. Personne ne veut vous recevoir, raconte Cartherine Rivalland. On vous dit que ce n’est pas ça, qu’il faut attendre, que ça cicatrise. Puis, au bout de quatre mois, on se permet de refaire une intervention où là, on voit bien qu’il y a un problème, qu'il n’y a pas de solutions".

Il n’y a plus rien. Plus de vie sociale, plus de vie intime...

Catherine Rivalland

Victime d'un implant vaginal défectueux

Emmitouflée dans un duvet et une couverture chauffante, sa vie n'est plus du tout la même depuis ce jour. "Quand vous travaillez depuis l’âge de 17 ans, et que, du jour au lendemain, vous vous retrouvez toute seule à la maison, car les gens vont soit au travail ou à l’école, vous êtes confronté à simplement le mur d’en face. Il n’y a plus rien. Plus de vie sociale, plus de vie intime... ça devient très compliqué".

Au niveau des symptômes, elle décrit ces douleurs "comme si un parpaing me tirait au niveau du sacrum. Ma jambe droite est très douloureuse. J’ai également mal à l'aine, mais aussi au ventre, constamment".

Onze ans après cette opération, son état de santé se dégrade fortement. "Depuis la fin d’année dernière, après le mariage de mon fils, je crois que tout a relâché, présume Catherine. Quand je suis trop fatiguée, je fais des broncho-pneumopathies : c’est le signal en général qu’il me dit qu’il ne faut plus que je bouge de mon lit".

"On nous prenait pour des folles"

Catherine Rivalland a découvert sur les réseaux sociaux un groupe de soutien, pour les personnes victimes de ces mêmes complications. "Le rôle de l’association est de regrouper des femmes qui souffrent suite à des poses d’implants, de bandelettes, de prothèses vaginales, contre les prolapsus, explique Marie-Christine Siaudeau, une des administratrices du groupe de soutien lié aux complications bandelettes incontinence/prolapsus France. On leur fait savoir qu’elles ne sont plus seules, qu’elles ne sont pas de cas isolés comme on aurait tendance à nous le faire entendre. Au début, on nous prenait pour des folles et on nous disait : c’est lié à la ménopause, c’est dû à des rhumatismes, mais jamais à cause de la bandelette ou de la prothèse".

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{} ©France télévisions

Ce groupe aide notamment les victimes dans les démarches administratives. "On les aide, on se regroupe pour se donner des noms d’examens à faire pour prouver que ses implants sont les causes de nos douleurs", rajoute-t-elle. Marie-Christine, originaire de la région Pays de la Loire, fut, elle aussi, une de ses nombreuses victimes. Elle a créé ce groupe à cause du manque d'information notoire sur cette opération. "Il y avait soi-disant un chirurgien qui enlevait ses prothèses, mais personne ne le connaissait. J’ai dû m’expatrier dans le sud de la France pour trouver un médecin qui veuille bien m’enlever ma promontofixation (intervention pour le traitement des descentes d'organes — ndlr). Alors que j’aurais pu avoir une solution près de chez moi".

Sur 30 000 femmes opérées, 2 à 5 % souffriraient d'effets secondaires

Tous les jours à ses côtés, son mari Loïc souhaite alarmer les autorités publiques et sanitaires sur ce sujet. "Le pourcentage de nombre de femmes blessées est trop élevé, on ne peut pas être dans le déni, estime Loïc Rivalland. Il faut que le corps médical, les politiques et les instances prennent conscience qu’il faut faire quelque chose pour ces femmes. Leur vie est un calvaire. Si tous les échecs de cette opération sont au même stade que ce que vit Catherine, c’est énorme. On ne peut pas l’ignorer et on doit traiter le problème en profondeur".

La Haute autorité de santé estime que 30 000 femmes subissent cette opération chaque année en France depuis les années 1990. Parmi elles, 2 à 5 % souffriraient d'effets secondaires. Un chiffre sous-évalué selon les associations, qui assurent que ces implants sont interdits depuis des années chez nos voisins anglo-saxons.

Tant que nos chirurgiens ne savent pas les déposer dans des conditions sécuritaires, il ne faut plus qu'ils les posent.

Marie-Christine Siaudeau

Administratrice du groupe de soutien lié aux complications bandelettes incontinence/prolapsus France.

"On est en retard en France. Depuis dix ans en Écosse, prothèses, bandelettes et implants ne sont plus posés et sont interdits. C’est également le cas en Angleterre depuis 2018. Ces prothèses ne sont pas du tout biocompatibles. Tant que nos chirurgiens ne savent pas les déposer dans des conditions sécuritaires, il ne faut plus qu'ils les posent", implore Marie-Christine Siaudeau.

Voyager aux États-Unis d'Amérique pour se faire opérer

À ce jour, le retrait de ces implants est très peu pratiqué en France. Le docteur Philippe Ferry, gynécologue-obstétricien du centre hospitalier de La Rochelle, ne nie pas le risque que peuvent avoir ces opérations. "On sait bien que certaines patientes risquent d’avoir des douleurs post-opératoires. Dans le passé, elles ont un fond douloureux plus ou moins chronique qui risque d’être majorée par une opération. Il ne faut pas du tout minimiser le risque de complications. Forcément, quand on fait de la chirurgie, il y aura des complications, on essaye le moins possible".

Dernier recours pour Catherine Rivalland, se faire opérer aux États-Unis par un spécialiste plébiscité par de nombreuses femmes qui ont eu recours à cette chirurgie. Prix de l'intervention : 45 000 euros. Un coût exorbitant que tout le monde ne peut pas s'offrir. "C’est un coût d’aller aux USA, il y a des femmes qui ne peuvent pas se le permettre. Il faudrait peut-être une prise en charge de ces soins à l’étranger, c’est super important, considère Loïc Rivalland. J’estime qu’il est normal que des fonds publics servent à financer ces opérations. On paye des impôts pour cela".

Mais qu'importe, Catherine est "impatiente, hâte d’y être. Je souffre tellement qu’il faut que ça aille vite". En plus de ses économies, elle a pu réunir la somme suffisante grâce à une cagnotte en ligne. Départ prévu pour le pays de l'oncle Sam, le 15 avril prochain, direction l'État du Missouri pour elle l'espère, une nouvelle vie.

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