Face à la recrudescence des aléas climatiques, le gouvernement veut protéger les agriculteurs avec son projet de loi axé sur une nouvelle assurance récolte multirisques. Le texte, qui pourrait entrer en vigueur le 1er janvier 2023, est salué par la FNSEA tandis que la Confédération Paysanne craint une privatisation intégrale de la gestion des calamités agricoles.
"La réforme de la gestion des risques climatiques en agriculture" arrive dans l’hémicycle de l'Assemblée nationale cette semaine. Les députés vont examiner à partir de mercredi ce projet de loi, une réponse politique à la multiplication des accidents climatiques dont souffre le monde agricole. Le but premier étant d’ouvrir le champ de l’assurance à un maximum d’agriculteurs pour permettre la sauvegarde de leurs exploitations.
La Confédération paysanne craint une privatisation intégrale de la gestion des calamités agricoles tandis que la FNSEA salue le texte. "Le système d’avant n’était pas tenable ni pérenne. Trop cher et insatisfaisant pour la profession", selon Grégory Nivelle, secrétaire départemental de la FNSEA des Deux-Sèvres.
Un modèle devenu obsolète
Si pour lui le modèle est devenu obsolète, c’est avant tout en raison de seuils difficiles à atteindre pour cocher les cases de l’indemnisation. "Il fallait un pourcentage minimum de pertes par rapport à l’exploitation. Et dans les faits, cela favorisait les structures hyper spécialisées qui seules pouvaient satisfaire cette condition. En Deux-Sèvres, nos exploitations sont diversifiées, avec une tradition de polycultures céréales et élevage." Et donc, en dehors des clous.
Il faut revoir le système, on est d’accord. Mais là, ça ne va pas dans le bon sens. En gros, on nous dit : plutôt que l’État paie, il faut que les gens paient.
Benoît Jaunet, porte-parole de la Confédération paysanne des Deux-Sèvres
Si elle est adoptée, la future réforme proposera un nouveau mode de calcul commun aux assureurs pour l’évaluation des pertes subies.
Traditionnellement située à gauche sur l’échiquier politique, la Confédération paysanne ne valide pour l’instant pas cette réforme à venir, même si elle dresse un constat d’urgence assez proche. "Il faut revoir le système, on est d’accord… Mais là, ça ne va pas dans le bon sens. En gros, on nous dit : plutôt que l’État paie, il faut que les gens paient", affirme Benoît Jaunet, porte-parole de la Confédération paysanne en Deux-Sèvres.
Pour l’heure, le projet de loi reste encore flou avec seulement neuf articles mais il devrait être complété par des décrets et ordonnances. Un "flou" dont la Confédération paysanne n’est pas dupe. "On le sait, tout va passer par le privé, avec des seuils d’intervention et il faudra payer beaucoup pour être assuré. Alors que c’est à l’État d’assumer mais aussi d’agir pour réduire le risque climatique."
C’est mieux mais il va falloir que l’État apporte beaucoup de financements et que les Français participent aussi.
Grégory Nivelle, secrétaire départemental de la FNSEA des Deux-Sèvres
L'enjeu de l'agriculture
La position de Grégory Nivelle pour la FNSEA, le syndicat majoritaire, n’est pas si éloignée. "C’est mieux mais il va falloir que l’État apporte beaucoup de financements et que les Français participent aussi. L’agriculture est l’un des grands enjeux de demain. On est là pour nourrir la population et notre président de la République a parlé de souveraineté alimentaire. C’est un défi !"
Cette nécessité d’agir face à la gestion des risques climatiques est commune aux deux syndicats mais les solutions proposées laissent Benoît Jaunet plutôt sceptique. "Le vocabulaire du gouvernement sur la question est plutôt plaisant, sauf que si on creuse un peu, cela confirme le système avec ses effets pervers. Il faudrait changer la matrice et arrêter les effets d’annonce."
La problématique du risque agricole et de l’assurance récolte arrive à point nommé en pleine campagne pour les présidentielles. L’agriculture et indirectement l’agro-alimentaire demeurent des sujets au cœur des préoccupations des Français.