À l'issue d'une semaine de débats au "Village de l'eau" à Melle (79) et de heurts avec les forces de l'ordre, le collectif Bassines Non Merci appelle "à l'apaisement" dans une lettre ouverte "aux élu.es de la République." Si le député Nicolas Turquois est contre ce moratoire, René Pilato se dit prêt à porter une proposition de loi sur le sujet.
Dans une "lettre ouverte aux nouveaux et nouvelles élu.es de la République" rendue publique le lundi 22 juillet 2024, le collectif Bassines Non Merci lance un appel à "cesser le feu" sur les questions de "l'eau". Le collectif s'adresse aux "élu.es (...) qui acceptent le débat" et les appellent "à construire une politique de l'eau partagée, qui apaise plutôt qu'elle ne détruit".
Les députés Nicolas Turquois (Modem) et René Pilato (LFI) ont accepté de nous partager leurs avis sur le sujet.
Un moratoire "indispensable"
Les organisations membres du collectif s'inquiètent que le démarrage annoncé de chantiers soit la source d'une "nouvelle escalade des tensions". Le collectif propose donc à nouveau un "moratoire sur les bassines" qu'il juge désormais "indispensable pour recréer un dialogue démocratique", notamment à la suite des "tensions générées par la crise de l'eau sur le territoire".
L'appel à "l'apaisement" est intervenu après une semaine de débats et de rencontres au "Village de l'eau" à Melle dans les Deux-Sèvres, mais aussi de heurts parfois violents face aux forces de l'ordre, vendredi 19 juillet à Migné-Auxances, près de Poitiers, et samedi 20 juillet à La Rochelle enCharente-Maritime.
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Le collectif rappelle que "la science, les institutions et la justice [lui] donnent raison" et estime que "plus de 40 000 personnes" ont participé à leur mobilisation entre le 16 et le 21 juillet dernier. Enfin, il affirme que, "grâce à l'inventivité des gestes portés et des parcours empruntés" lors des manifestations extérieures au "Village de l'eau", les manifestants "ont réussi à éviter le piège d'un nouveau Sainte-Soline".
Vers une proposition de loi ?
Interrogé par France 3, le député Modem de la Vienne, Nicolas Turquois, se dit "totalement défavorable" à ce moratoire. "J’ai déjà eu l’occasion de rencontrer Julien Le Guet. Leur mode d'action est violente, ce sont des méthodes inacceptables".
"Je comprends qu'on soit opposé au stockage de l'eau, mais quand on fait des manifestations, on se rend d'abord dans les services préfectoraux", rappelle Nicolas Turquois. "Mais là, il y avait d'autres intentions derrière".
De son côté, René Pilato, le député LFI de Charente, "100 % d'accord avec le problème du moratoire", regrette que "la question de la propriété de l’eau financée par l’État n’est pas abordée". Pour lui, déposer une proposition de loi sur les bassines est "envisageable. Je suis prêt à la porter. Je suis pour une irrigation avec les retenues collinaires et contre les retenues de substitution", a-t-il déclaré.
Il illustre ses propos avec l'exemple des coins de Charente inondés quand il y a trop d'eau. "On réfléchit déjà à stopper, à ralentir le ruissellement pour ralentir le débit et éviter la casse en aval et des retenues collinaires". Il continue : "il y a des réflexions qui se font et le moratoire, il faut le faire pour se donner le temps de réfléchir et de prendre en compte le dérèglement climatique".
Recréer du dialogue
Toutefois, Nicolas Turquois est prêt "à discuter avec des associations qui sont dans le compromis, dans l’écoute...". "On est obligé de mettre les agriculteurs autour de la table", réagi René Pilato. "L’agriculteur a besoin d’eau et d’autant plus face aux changements climatiques pour le stockage de l’eau en période hivernale pour l’utiliser l’été. Mais il faut une gouvernance publique de l'eau", décrète le député Modem de la Vienne.
Il ne s’agit pas de privatiser l’eau, mais que l’État ait son mot à dire
Nicolas Turquoisdéputé Modem de la Vienne
Pour apaiser la situation, "il faut une cohérence, un récit qui tienne la route, se donner les moyens et ne pas laisser les agriculteurs seuls dans un modèle intensif qui montre ses limites et flingue l’écosystème", précise le député de La France Insoumise.
Il ajoute : "On ne peut pas laisser ces gens seuls avec leurs dettes, qui ont appliqué des modèles qu’on a voulu qu’ils appliquent. Apaiser, c’est dire pourquoi on veut changer des modèles, voilà comment on peut vous accompagner et se demander s’ils sont prêts à jouer le jeu". Nicolas Turquoi conclut : "Il ne s’agit pas de privatiser l’eau, mais que l’État ait son mot à dire".