C'est avec une méthode "douce" que cette famille souhaite gérer une forêt locale de Dordogne. Une gestion raisonnée qui permet de proposer différentes variétés de bois aux charpentiers de la région. La tradition s'impose dans ce modèle économique où l'on ne coupe que ce dont on a besoin.
En Dordogne, il y a de quoi faire. Ici, la forêt couvre environ la moitié du territoire, 283 000 hectares. Tout à la fois terrain de chasse (cèpes compris), espace naturel, atout touristique, ressource économique, refuge de biodiversité, trésor menacé par les bouleversements climatiques et les incendies, et poumon vert, la forêt de Dordogne, c'est tout cela et bien plus encore.
Parmi les menaces qui pèsent sur ce patrimoine commun, la sylviculture standardisée. Une exploitation industrielle des ressources qui pourrait conduire à la disparition des forêts de feuillus remplacés par des pins maritimes. Face aux lobbies forestiers, alors que les prix du bois ne cessent d'augmenter, d'autres modèles existent pourtant.
Scier raisonnable et raisonné
C'est le cas à Tursac, près de Sarlat. La scierie de la famille Agrafeuil renaît de ses cendres en janvier 2022 après cinq ans de fermeture. La demande était forte. Une réouverture, mais un peu différente. À l’initiative de Jérôme Agrafeuil, propriétaire des lieux, « Au coin des scieurs » est devenu une scierie associative qui porte des valeurs. À commencer une exploitation douce, locale et raisonnée des ressources.
Des gens m'ont dit, on n'a plus de bois, on est en rupture ! Je me suis dit, c'est quand même bête, parce que moi, j'ai une scierie en plein milieu des bois qui ne tourne plus. Par contre je veux faire une méthode douce, je ne voudrais pas simplement installer un scieur, je voudrais faire quelque chose de doux. Et c'est devenu vraiment un projet de filière bois maintenant
Jérôme Agrafeuil, propriétaire de la scierie
Du sélectif dans les massifs
Cette manière douce, c'est avant tout un retour aux sources, à l'époque où de prévoyants propriétaires de forêts confiaient un abattage ciblé à des bûcherons expérimentés. Ainsi les charpentiers ont exactement les ressources dont ils avaient besoin, ni plus ni moins. L'inverse d'un abattage massif des massifs pour obtenir des stocks soumis aux lois du marché. Une méthode qui laisse un paysage rasé, vidé de toute vie, replanté ensuite de pins maritimes uniformes.
Plus qu'une scierie, un écosystème local
Dans cette association, on associe ! Des propriétaires aux charpentiers en passant par les bûcherons et les scieurs, tout le monde participe. Résultat, sur ce petit territoire, l'économie circulaire tourne rond, il n'est prélevé que le nécessaire et la forêt peut continuer à grandir tranquillement pour les générations futures. En contrepartie, il faut davantage de réflexion, d'anticipation et de souplesse. Car il faut faire "en fonction de ce que la forêt nous donne" sourit Yoann Delbos, charpentier.
Nouvelle-Aquitaine, la plus grande forêt de France
Une méthode qui pourrait largement faire école dans la Région où le bois ne manque pas. Avec 34% du territoire, soit 2,8 millions d’hectares dont 90% sont privés, la Nouvelle Aquitaine est le plus vaste massif forestier de France métropolitaine. On y exploite chaque année près de 10 millions de m3 de bois. Plusieurs forêts s'y retrouvent : les Landes de Gascogne (pins maritimes), le Haut Limousin (feuillus, douglas, épicéas), la Vienne, la Charente, la Dordogne et les Pyrénées-Atlantiques, les zones de faibles altitudes de la Corrèze, Creuse et Haute-Vienne (feuillus) et enfin les plaines des Deux-Sèvres, des Charentes et du Lot-et-Garonne (peupliers).
Du bois sur la planche en perspective.
Les assises départementales de la forêt en Dordogne
Cette initiative du Département de la Dordogne se déroule ce jeudi 2 février 2023 à partir de 9h, au théâtre de l’Odyssée à Périgueux. Elle invite le grand public à se pencher sur ses forêts. On pense bien sûr aux désastreux incendies de cet été, au dérèglement climatique, mais aussi à toutes les utilisations possibles de la forêt.
Un territoire à partager intelligemment entre les promeneurs, les touristes, les chasseurs, les exploitants et la biodiversité qui y réside. Quatre tables rondes (panorama de la forêt en Dordogne, le bois, patrimoine naturel et ressource locale, risque incendie, énergie, stockage de carbone et enfin, la forêt, un espace à partager) sont proposées, suivies de séances de questions-réponses.