Sur le menu de réveillon, la truffe tient une place de choix. Produit de la terre par excellence, ce champignon est soumis aux caprices de la nature. Et cette année, la nature n'a pas été particulièrement généreuse pour les trufficulteurs.
Truffe au ras du sol, Tokyo a beau s'acharner, il ne trouve presque rien. C'est la troisième fois qu'il vient renifler les pieds des chênes à la truffière de la Chapelle-Gonaguet avec Jean-Philippe et il ne déniche guère plus de truffes que les deux fois précédentes. "Elles ne sont peut-être pas assez mûres pour que le chien puisse les sentir et les reconnaître", tente Jean-Philippe Gourgues. "Deuxième point, qui est peut-être un peu plus délicat, c'est peut-être aussi qu'il n'y en a pas du tout !" Inquiétant, car l'an dernier, début décembre, Jean-Philippe en avait déjà ramassé une centaine sur cette même truffière.
Des truffes à la poubelle
La truffe est capricieuse. Une année bonne et l'autre non, une truffière qui donne et pas l'autre. À cinq kilomètres de là, à Mensignac, une autre truffière a déjà livré cinq kilos du précieux champignon. Claude Laulhé n'est pas bredouille, mais il ne crie pas non plus à la fortune. "J'en trouve de deux sortes. Une, comme ça, qui est blanche, pour moi, elle est impropre à la consommation, elle va partir à la poubelle. Et j'en ai beaucoup qui sont de ce veinage, qui, j'estime, est un veinage avancé pour la saison.", explique le trufficulteur, un peu inquiet pour la suite.
Moins 50 %
Car avant l'heure, c'est pas l'heure, et après l'heure, il risque d'être trop tard. Le premier marché de Ribérac avait pourtant bien commencé avec 3,8 kg de belles truffes. C'était 1,2 kg de moins que l'an dernier, mais cette année très peu avaient été refusées, contrairement à l'année dernière où beaucoup de truffes "blanches" n'avaient pas été acceptées à la vente, exigence de qualité oblige. Cette année, ce sont les truffes rares, pas mûres ou trop avancées qui risquent de gâcher la suite de la saison. Jean-Philippe, Claude et beaucoup d'autres n'ont ni la quantité ni la qualité nécessaire pour réaliser de belles ventes.
La faute à la météo, encore...
"Ce début de saison, il y a beaucoup moins de truffes que l'an passé. Il manque au moins la moitié des truffes sur les marchés, voire plus. On a manqué un peu de chaleur au printemps pour les naissances ," explique Alain Kléméniuk, président du groupement des trufficulteurs de Dordogne, et trufficulteur lui-même à Verteillac. "On a manqué d'eau après dans l'été, et puis, de la mi-septembre à la mi-octobre, on a eu beaucoup d'eau. Ce qui fait aussi que des truffes qui étaient là ont pourri."
Le reportage France 3 Périgords - Colyne Rongère & & Vanessa Fize
Ce qui est rare est cher
Vous l'aurez compris, la truffe est rare sur les marchés pour l'instant, ce qui entraîne mécaniquement une légère flambée des prix. N'oublions pas que c'est aussi sa rareté qui fait la réputation du diamant noir du Périgord. En ce moment, la truffe de qualité s'échange entre 700 et 800 euros le kilo. Mais à l'heure où il faudra faire les courses avant de se mettre devant les fourneaux pour préparer les repas de fête, la mélanosporum aura peut-être pris encore un peu de valeur. Ou pas, confie Alain Kléméniuk. "On est juste là dans les premiers marchés de la saison. On espère qu'il va y avoir des truffes qui vont être mûres un peu plus tard dans la saison, et que les volumes vont remonter. Moi, je conseille aux acheteurs qui veulent consommer des truffes pour Noël de venir nous voir sur les marchés d'ici à une semaine. Et pour le 31, attendez encore..." Patiemment attendue, longuement désirée, la truffe, n'en sera que meilleure.