Émeutes urbaines. Les maires réservés après les annonces d'Elisabeth Borne : "ce qu'on demande, c'est une police nationale ! "

Après les émeutes de juin, suite à la mort de Nahel, la Première ministre a dévoilé une dizaine de mesures pour renforcer la sécurité dans les communes. “Aucune nouveauté”, regrettent les maires, qui attendent, comme à Lormont, “plus de mesures en amont”.

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Le 27 juin 2023, la mort de Nahel, après un contrôle routier, embrase la France. En Aquitaine, plusieurs communes sont les théâtres d’émeutes, comme Pessac ou Lormont, dans la métropole de Bordeaux. Après une première phase d’arrestations, 2 000 au total, Elisabeth Borne a dévoilé, ce jeudi 26 octobre, devant 500 maires et élus, ses mesures pour accompagner ces communes dans le renforcement de la sécurité. 

Franchises astronomiques

Dans les communes, les stigmates des émeutes sont encore visibles par endroit. “60 % des bâtiments publics partiellement ou totalement détruits ont d’ores et déjà été remis en état”, rappelle la Première ministre, qui annonce la création d’une enveloppe supplémentaire de 100 millions d’euros pour réparer et reconstruire ces bâtiments publics et mobiliers urbains.

“Je n’ai pas entendu de nouveaux éléments qui correspondent aux attentes immédiates des communes. Nous sommes déjà en train de refaire notre école, regrette Philippe Quertinmont, le premier adjoint à la mairie de Lormont, parti faire le déplacement à la Sorbonne.

Il va falloir aussi reconstruire notre espace citoyen. On a évalué ces réparations à 1,3 million d’euros.

Philippe Quertinmont, premier adjoint à la mairie de Lormont

rédaction web France 3 Aquitaine

Car les édiles sont désormais confrontés à un second problème : l’augmentation exponentielle des franchises de leurs assurances. “Notre franchise a augmenté de plusieurs dizaines de milliers d’euros. Elle est aujourd’hui à 50 000€”, lâche le premier adjoint à la mairie de Lormont.

"Nous n'avons même pas de commissariat"

Autre mesure, “le doublement de la présence des forces de l’ordre sur la voie publique, d'ici à 2030”. Une annonce sécuritaire qui complète l’engagement de l’État dans le renforcement de la sécurité : 10 000 postes de policiers ont déjà été créés, ainsi que plus récemment, la création de 238 brigades de gendarmerie.

“J’ai été désagréablement marqué par l’insistance des mesures sur la police municipale. On est évidemment contents que leurs effectifs soient renforcés”, martèle premier adjoint de cette commune de Gironde de 24 000 habitants. 

Ce que l’on demande à Lormont, c'est un commissariat avec une police nationale. Nous n'en avons même pas !

Philippe Quertinmont, premier adjoint à la maire de Lormont

rédaction web France 3 Aquitaine

Renforcer la présence des forces de l’ordre n’est pas la seule piste du gouvernement. Elisabeth Borne promet également, “pour les maires qui le souhaitent” , “la possibilité aux polices municipales d’accomplir certains actes de police judiciaire” sous le contrôle des parquets. 

“Nous ne voulons pas que nos policiers municipaux soient à la disposition du procureur, en plus de toutes leurs autres prérogatives. Nous voulons une vraie police de proximité”, confie, déçu, Philippe Quertinmont.

Réseaux sociaux sous surveillance

Le volet judiciaire est, lui aussi, renforcé. L’amende pour non-respect du couvre-feu, est multipliée par cinq, désormais fixée à 750 €, et le placement dans des unités éducatives de la protection judiciaires de la jeunesse, voire un encadrement militaire, devient obligatoire. “Nous avons constaté qu’une grande partie des auteurs mineurs n’avaient jamais eu affaire à la Justice. Il faut donc que nous élargissions notre palette de sanctions, afin qu’aucun acte ne reste impuni”, détaille la Première ministre. Une justice "exemplaire" saluée par les édiles. 

L’État veut aussi mener cette lutte sur le web avec la suspension pendant six mois les comptes appelant à la violence ou à la haine, sur les réseaux sociaux. “C’est une mesure très importante parce que la fermeture des comptes va réellement permettre de réguler ces appels à la violence”, souligne Philippe Quertinmont.

"Des centaines de mamans débordées"

Constat de ces émeutes : les trois quarts des émeutiers avaient moins de 25 ans. Un signe pour le gouvernement de l'inclusion des familles dans le processus judiciaire. Il prévoit ainsi “des stages de responsabilité parentale ou des peines de travaux d’intérêt général” pour les parents, mais aussi “une contribution financière citoyenne et familiale que les mineurs et leurs parents devront payer à des associations de victimes”.

“Il faut évidemment inclure tout le monde, mais il faut aussi prendre en compte la réalité”, relève Philippe Quertinmont. Cette réalité, ce sont “des centaines de mamans débordées dans leur quotidien face à de multiples problèmes”. “Il faut les aider, les accompagner et les soutenir en amont”, affirme le premier adjoint à la mairie de Lormont, qui regrette avoir beaucoup parlé “des conséquences” au lieu d’une prévention accrue.

Seules mesures du gouvernement en matière de prévention et d’accompagnement : la clarification des démarches administratives, l’extension des horaires d’accueil en centres de loisirs ou encore le doublement du nombre d’heures d'enseignement moral et civique au collège.

Force d'action républicaine

Enfin, Elisabeth Borne a annoncé la constitution d’une “Force d’action républicaine”, constituée de juristes, policiers ou éducateurs. Ils établiront, après plusieurs mois sur le terrain, des diagnostics des quartiers pour “traiter les difficultés que les populations rencontrent, en matière de sécurité, mais aussi pour des réponses judiciaires, éducatives ou sociales”.

“Dans notre politique de la ville, nous travaillons déjà depuis des années avec tous les acteurs de la vie quotidienne pour accompagner les familles. C’est une mesure en expérimentation que nous allons scruter pour en voir sa réelle application”, rappelle le premier adjoint de Lormont. La moitié des logements de sa commune sont des habitats sociaux.

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