Gel sur le vignoble de Bordeaux : "c'est assez grave et généralisé sur le département"

La nuit dernière encore est venue donner un deuxième coup de massue sur les châteaux de Bordeaux. Des températures de -2 à -6 degrés ont pu être relevées, comme hier mercredi 7 avril. Pour Philippe Abadie de la Chambre d'Agriculture, "C'est assez grave", peu de secteurs sont épargnés en Gironde. 

"Il a fait froid cette nuit, plus froid qu'hier", témoigne Pierre Courdurié du château Croix de Labrie qui a pu relever -3,1° à Saint-Sulpice de Faleyrens encore à 7 heures, contre -1,2 sur le plateau de Saint-Christophe-des-Barbes.
En revanche, dans les bas-fonds du Saint-Emilionnais, les températures étaient de -4 à -5°. "Bordeaux n'avait pas besoin de cela... En 2017, on avait perdu 60% de la récolte, là c'est plus violent", mais heureusement plus tôt par rapport au 27 avril 2017. C'est donc une lutte acharnée qui, la nuit dernière encore, a été livrée sur Saint-Emilion et partout en Gironde. "Dès 22 heures hier on a allumé nos 3 agrofrosts pour réchauffer le sol, puis les bougies, je pense que cela va aller mais pour pour tout ce qui était à côté, cela n'aura pas suffi."

L'ensemble de Saint-Emilion a été sérieusement touché, hormis le plateau. A Vignonet, hier 20% avaient gelé, là on parle de 70 à 80%. J'ai eu des vignerons qui étaient dans un état moral terrible, qui pleuraient,"

Jean-François Galhaud,Président du Conseil des Vins de Saint-Emilion.

Les secteurs les plus touchés sont le "Sud Gironde" selon Christophe Château du CIVB (Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux). Les Graves ont été sérieusement meurtries dès hier mercredi comme en témoignait le président du syndicat Dominique Guignard : « Il a beaucoup gelé, c’est catastrophique, je ne me souviens pas avoir déjà vu cela, j’essaie de me remémorer 1991, cela y ressemble vraiment. Sur les Graves, Portets, Saint-Pierre-du-Mons, Illats, Langon, La Brède, je n’ai pas vu de gens épargné…

Quand on passe dans certaines vignes, il n’y a plus rien de vert, les feuilles sont mortes, c’est d’une violence terrible," 

Dominique Guignard président Syndicat viticole des Graves

Juste à côté, Sauternes et Barsac pansaient aussi leurs plaies, comme en témoigne Xavier Planty du château Guiraud, 1er cru classé de Sauternes : " A Guiraud, je pense qu'on est à 80 à 90% de pertes, malgré l'hélicoptère... On a pu relevé du -5, et avec l'hélico ou des bougies tu ne peux rien faire !"

Certains comparent déjà au gel de 2017 qui avait amputé la récolte de près de 40% à Bordeaux, d'autres qui ont pris davantage se réfèrent à celui de 1991. Une chose est sûre, le phénomène a été ressenti partout mais à des degrès divers.
Ainsi en Médoc et Haut-Médoc, Hélène Larrieux: "ce matin, j'ai fait un point sur les secteurs très frais, c'est très hétérogène, sur un même pied, il peut y avoir des feuilles gelées d'autres qui se portent très bien. On a eu du -3 ce matin, -4 hier et c'est tombé jusqu'à -6 sur le secteur de Listrac où il y a des vignes rasées à 100%. Mais nos terroirs sont un peu plus tardifs, avec des zones proches de l'estuaire épargnées par le gel, pour cela on va pas mal s'en sortir...Ce n'est pas catastrophique mais il y en a un peu partout, localement."

Dans le Blayais, à Fours ce matin, Sandrine Haur du château l'Haur du Chay a lutté aussi contre le gel pour sauver ses 13 hectares de vigne en utilisant des ballots de paille brûlés: "pour nous, cela nous paraît être une des méthodes les moins onéreuses pour protéger notre vignoble au mieux, donc on esssaie de faire de la fumée pour essayer de réchauffer l'atmosphère de 1 ou 2 degrés."

Au château le Moulin de la Marzelle, Elie Corpandy dresse le constat pour les Côtes de Bourg:"Prignac-et-Marcamps et Bourg sont très peu touchés, par contretout le plateau de Tauriac a gelé, ainsi qu'une grosse partie de la commune de Pugnac,soit 300 hectares de vignes."

Philippe Abadie de la Chambre d'Agriculture de Gironde confiait déjà hier : "c'est assez grave, le gel a été généralisé sur le département de la Gironde, par endroit on est descendu à -7, là rien ne résiste." Un représentant de la Chambre d'Agriculture, Joël Ortiz confiait ce midi dans le 12-13 de France 3 Nouvelle-Aquitaine: "

Le premier diagnostic fait ressortir des dégats plus ou moins importants sur l'ensemble du département, qui pourraient ressembler aux pertes rencontrées en 2017

Joël Ortiz de la Chambre d'Agriculture de la Gironde

Et Joël Ortiz de poursuivre: "le 1er épisode de gel date de hier matin, on en a eu un encore ce matin et les premiers symptômes de dégâts sont déjà visibles, un état des lieux plus précis sera disponible dès le début de la semaine prochaine. La vigne a cette capacité à repartir, cela prendra à peu près deux semaines avant qu'on ne voit les contre-bourgeonsdémarrer... Toutefois, il faut savoir que ces contre-bourgeons, ne sont productifs à peu près qu'à 50%, par rapport à la récolte de départ. On aura une perte sur le millésime 2021".

D'autres s'en sortent très bien, fort heureusement pour eux, ils ont bien sûr une pensée pour leurs collègues. Ainsi au château de la Rivière en AOC Fronsac, Xavier Buffo : "en bas sur mes blancs, je suis descendu à -2°. En 2017, j'avais gelé et je me suis équipé de chaufferettes pour les sauver. En revanche, les merlots du bas ont gelé. Mais passé le portail, on repassait au dessus de 0° sur les coteaux tout a été épargné, donc ça va pas trop mal.C'est vrai que c'est la Dordogne et le bois qui nous ont protégés..."

Le Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux a publié cet après-midi ce communiqué : « La France viticole a été, ces dernières nuits, violemment frappée par le gel. .A Bordeaux, le gel a durement frappé de vastes zones du vignoble, les températures sont parfois descendues en dessous de – 5°C touchant l’ensemble des appellations (65 appellations / 111 000 hectares) ».

Le vignoble bordelais très sévèrement touché par le gel L’ensemble de la filière souhaite exprimer sa solidarité à toutes ces femmes et ces hommes qui se sont retrouvés impuissants face à ce gel exceptionnel, »

Bernard Farges, président du CIVB

« Les dégâts sont en cours d’évaluation.  A ce stade, il est cependant déjà certain que ce gel du printemps impactera sévèrement le volume de la récolte 2021.   Cet épisode de gel vient d’anéantir une partie significative du travail des vignerons et de la récolte dans une période déjà très éprouvante à la fois moralement et économiquement. Face à l’ampleur du sinistre, qui va toucher tous les opérateurs, la profession se mobilise. La meilleure réponse à donner pour soutenir la viticulture, c’est d’acheter du vin… ».

A consommer avec modération, selon la loi Evin bien sur.

 

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