Quartier Saint-Michel à Bordeaux : deal, vols, agressions au couteau, les habitants dénoncent un climat d'insécurité

Un homme âgé de 31 ans a été gravement blessé par arme blanche dimanche soir. Habitants, commerçants, élus dénoncent un climat d'insécurité grandissant dans ce quartier du centre-ville de Bordeaux. Le sujet aurait d'ailleurs été évoqué entre le maire et le Premier ministre la semaine dernière.


Les pompiers sont intervenus dimanche soir vers 22h30 accompagnés d'une équipe du SMUR et de la police. Un homme avait été découvert inconscient à terre, rue de la Fusterie, par des passants. À leur arrivée, la victime âgée de 31 ans, était en arrêt cardio-respiratoire et présentait une large plaie au thorax due à un coup porté avec une arme blanche. L'homme a été évacué dans un état très grave au CHU de Bordeaux.

Depuis plusieurs mois, les habitants dénoncent un climat d'insécurité dans le quartier Saint-Michel. Dimanche, il y a huit jours déjà, un homme était retrouvé dans un état grave après une rixe quai RichelieuDes incidents graves qui se répètent dans ce quartier du centre-ville de Bordeaux.
   

"Ca continue de se dégrader aux yeux de tout le monde... Sans réaction "

"Ce quartier s’est beaucoup dégradé en peu de temps", raconte un habitant du quartier qui préfère garder l'anonymat. "L’omniprésence (de nuit comme de jour) du trafic de drogues l’a rendu vraiment insalubre, la rue de la Fusterie, et sa petite place tout particulièrement. Même si je n’ai jamais été personnellement pris à parti, c’est anxiogène au quotidien". 

"On assiste à des scènes de violences, des nuisances quotidiennes, les bruits des regroupements, les occupations d’immeubles par les dealers et les toxicomanes, qui souvent restent dans les cages d’escalier pour consommer. Malgré les plaintes et les appels, on a l’impression que ça continue de se dégrader aux yeux de tout le monde.. Sans réaction", explique cet habitant.


En juin dernier, le maire de Bordeaux, Nicolas Florian, conscient du problème, avait demandé à la préfète de “prendre des mesures”. Quelques jours plus tôt, deux bandes rivales s'étaient affrontées en pleine journée. Un groupe de personnes avait remonté la rue des Faures jusqu'à la place Saint-Michel, poursuivie par un autre groupe. Au milieu de la course-poursuite, des clients étaient attablés aux terrasses des cafés, médusés. Selon certains témoins, les protagonistes étaient armés de battes de baseball et de barres de fer.

Une situation qui n'est pas nouvelle. Il y a deux ans, ce climat avait déjà été dénoncé par les commerçants du quartier. En juillet 2017, ils avaient symboliquement baissé le rideau pour dénoncer " les bagarres, les trafics de drogue, les insultes". Le soir-même, le patron d'un bar situé rue des Faures avait été agressé et la police avait lancé un appel à témoin.

 

"La conséquence de l'évacuation des squats"

Durant été, plusieurs squats ont été évacués par la préfecture, notamment dans le quartier Saint-Michel. Rachid, responsable de l'association "La Piraterie" voit un lien de cause à effet. "Tout cela, c'est la conséquence des évacuations des squats" explique-t-il. "Des jeunes se retrouvent du coup à la rue". Avec son association, il organise régulièrement "La tablée". Les bénévoles servent à manger aux plus démunis. 
L'opération avait lieu au croisement des rues Sainte-Catherine et porte Dijeaux. "Les riverains se plaignaient du bruit alors on a dû se déplacer, et depuis un an la distribution de denrées se fait place de la Victoire", non loin du quartier Saint-Michel. "Mais ça ne se passe pas bien d'un point de vue de la sécurité".  "Pour moi", explique le bénévole "les pouvoirs de la ville ne font rien, il y a des structures mises en place, mais vu le nombre de migrants qui arrivent, c'est compliqué". 

Et derrière ces migrants mineurs, il y a un réseau, avec des hommes majeurs qui organisent et sont même armés parfois. 

Rachid dit avoir lui-même assisté à des larcins, des vols à la tire, où la situation a bien failli dégénérer avec des hommes armés de couteaux. "Ils sont bien organisés, il se déplacent à vélo, et vont vite d'un quartier à l'autre". 
 

Des réseaux qui agissent depuis plusieurs années 

En février dernier, les magistrats du parquet et du siège tiraient déjà la sonnette d'alarme. "Les déferrements de ces mineurs, venus principalement du Maroc ou d'Algérie, ont augmenté de 406% passant de 32 MNA (mineurs non-accompagnés) en 2017 à 162 l'année dernière", nous expliquait Marie-Madeleine Alliot alors procureur de la république de Bordeaux. 

"Nous avons ouvert une information judiciaire pour traite d'êtres humains, car nous avons découvert que des délinquants seraient exploités par des chefs de réseau" révélait Marie-Madeleine Alliot. Tout était parti d'une affaire de tentative d'homicide survenue rue Permentade, dans le quartier Saint-Michel. Contacté par téléphone, le parquet nous a confirmé que l'instruction de cette information judiciaire était toujours en cours aujourd'hui.  
 

Le sujet évoqué en Conseil municipal....et avec le Premier ministre

Matthieu Rouveyre, conseiller municipal d'opposition, a fait état de ce sentiment d'insécurité aujourd'hui lors du Conseil municipal. « J'ai relaté des témoignages toujours plus nombreux des habitants : sentiment d'insécurité, sentiment parfois fondé sur des agressions et invectives dont ils ont été victimes directement" raconte-t-il. "C’est de la responsabilité de l’Etat, qui s’est focalisé sur les migrants, mais ce sont des cibles faciles. Même si l’évacuation des squats de migrants a mis des gens qui étaient encadrés par des associations à la rue, confrontés du coup à leur propore survie". "En tant qu’élu, on me fait remonter qu’il y a des affrontements entre la communauté bulgare et la communauté maghrebine qui se disputent un territoire, Saint-Michel, pour le trafic de drogue"

Je suis élu depuis 12 ans, c'est la première fois que j'ai des remontées comme celles-ci dans le quartier Saint-Michel, mais aussi aux Aubiers, au Grand Parc ou à la Benauge.
explique Matthieu Rouveyre.


L'élu a donc décidé de demander aujourd'hui à Nicolas Florian dans le cadre du Conseil municipal s'il partageait le même diagnostic, c'est-à-dire une hausse du sentiment d'insécurité mais aussi une hausse des chiffres de la délinquance à Bordeaux. Et selon Matthieu Rouveyre, le maire de Bordeaux a confirmé ce diagnostic annonçant même qu'il en avait parlé avec Edouard Philippe lors de sa venue à Bordeaux mardi dernier.

Le conseiller municipal socialiste avoue que "la réponse n’est pas simple, car il faut renforcer les moyens sur la prévention, mais aussi sur le terrain auprès des acteurs sociaux et exiger de l'Etat à travers la police et la justice qu'il y ait un traitement pénal adapté pour empêcher qu'on retrouve toujours les mêmes dans l’espace public à empoisonner la vie de tout le monde".  

Cet après-midi, Nicolas Florian se serait engagé à fournir des chiffres précis sur le sujet au prochain conseil municipal dans un mois "pour pouvoir avoir un débat approfondi sur le sujet".
 
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