Ils offrent des huîtres pour une dégustation gratuite : les ostréiculteurs du Bassin d’Arcachon à la reconquête des consommateurs

Ils arrêtent les usagers de l’autoroute pour proposer des huitres à la dégustation. La production d'huîtres des ostréiculteurs du Bassin est rouverte à la vente depuis 15 jours, mais ces derniers peinent à la vendre. Depuis l’interdiction temporaire de vente en cette fin d’année et la découverte du norovirus, ils estiment leurs pertes à 5 millions d'euros.

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Arrivés vers 6 heures du matin au rond-point de Biganos, quelque 80 ostréiculteurs ont freiné la circulation sur l'A660 dans les deux sens. On ne parle pas ici de blocage, mais d'un barrage filtrant, incitant les automobilistes à quitter l'autoroute à l'échangeur deux et à venir déguster des huitres de leur production.

 Venus de La Teste-de-Buch, Gujan-Mestras, Andernos et Arès, ils se mobilisent autour d'un mot d'ordre : "sauvons l'ostréiculture arcachonnaise". Les manifestants ont d'ailleurs monté des stands de dégustation pour faire goûter leurs huîtres aux automobilistes.

Redonner confiance en leur produit

Au milieu de ce barrage filtrant, les automobilistes, sur la route du travail, comprennent l'action. Au volant de sa fourgonnette, un homme se décrit comme "non mangeur d'huitres" et en retard d'une demi-heure. Mais bon, ils font ce qu’ils peuvent les pauvres, il faut bien qu’ils mangent" dit-il. 

Cette autre automobiliste est le cœur de cible de cette action : "Moi d’habitude, je les mange, mais depuis ce qui s’est passé, j’avoue que je n’en mange plus " , reconnaît-elle.

Une interdiction de 24 jours : 5 millions de pertes

Depuis l’interdiction du mois de décembre et la découverte d'un norovirus responsable de gastro entérites aiguës, les ventes stagnent et ne progressent que très difficilement. N'ayant écoulé que 40% à 50% de leur production, les ostréiculteurs doivent avant tout regagner la confiance des consommateurs, acteurs de leur survie.

Dans le bassin d'Arcachon, les pertes engendrées par l’interdiction, mise en place du 27 décembre au 19 janvier, à la période la plus propice à la vente de l'année, sont estimées à 5 millions d'euros. Des pertes sèches pour ces ostréiculteurs assommés par ailleurs par les charges.

Durant toute cette interdiction, il leur a fallu continuer à payer les ouvriers pour défaire les bourriches déjà préparées et ainsi remettre les précieuses huîtres en bassin, sans faire rentrer d'argent. Un préjudice pour lequel les ostréiculteurs demandent réparation à l'État, pour une prise en charge totale de ces pertes. 

Avec ses confrères, Mathieu Garrigue, installé à la Teste de Buch, demande aujourd'hui à l’État une exonération totale de charges pour l’année en cours. 

Nous, on a bossé, on a fait du mieux qu’on peut pour proposer un produit de qualité. C’est un vrai préjudice qu’on a subi et on n'en est pas responsable.

Mathieu Garrigue

Ostréiculteur à La Teste-de-Buch

Les aides du département de la Gironde, de 150 000 euros et  50 000 euros, exceptionnellement débloquées pour les jeunes ostréiculteurs, sont loin de compenser ces pertes. 

Il faut trouver un levier, insistent les ostréiculteurs présents sur l'action. "Il y a des entreprises qui sont très fragilisées".

 

Aider la filière à survivre 

"On ne peut pas être laissé seuls face à ce phénomène qui se répète et s’est répété cette année au plus mauvais moment" poursuit Matthieu Garrigue.

Léa Destrian, ostréicultrice à Gujan-Mestras sur le port de Larros depuis dix ans, vit cette "difficile aventure". "Il y a la crise là qu’on vient de subir, mais on a perdu une conche aussi sur le banc d’Arguin. On est victimes aussi de beaucoup de mortalité sur le Bassin d’Arcachon", constate-t-elle, blasée, "C’est une accumulation de choses qui mettent nos entreprises en péril".

On veut être rassurés sur l’avenir, on ne veut pas qu’une crise comme on vient de la subir ne se reproduise. On a déjà perdu entre 15 et 20 % de chiffre d'affaires.

Léa

Ostréicultrice au port de Larros

L'agricultrice s'inquiète également pour les autres acteurs de la filière : "Nous, on a 10 ans d’ancienneté, mais les jeunes qui viennent de s’installer, c’est dramatique pour eux". Elle pense également aux gens qui souhaitent partir à la retraite et ne le peuvent pas "Les entreprises ne se vendent plus parce que les jeunes ne veulent plus s’investir dans la filière". 

Cette action devrait avoir lieu jusqu'à la fin de la journée 18 h. Mais les ostréiculteurs pourraient se mobiliser à nouveau dans les jours à venir. 

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