Dans un communiqué, Isabelle Klock-Fontanille fait un point sur ce dossier qui provoque de nombreuses réactions au sein du campus. Type de procédure, difficultés, objectif. On fait le point.

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"D’une façon générale, dans ce domaine des violences sexuelles et sexistes, je revendique la 'tolérance zéro'. La présidente de l'Université de Limoges s'exprime donc, par écrit, ce lundi, comme elle l'avait annoncé en fin de semaine précédente, pour faire un point sur le dossier polémique de l'étudiant en médecine de 26 ans condamné en première instance à cinq ans de prison avec sursis probatoire pour des faits d'agression sexuelle à Tours. Un document en forme d'explication de texte, "pour éviter la diffusion d’informations approximatives et la généralisation d’insinuations à des fins de récupération, précise cette dernière qui ajoute : il me semble important de préciser un certain nombre de faits dans le dossier aujourd’hui largement médiatisé." 

Car depuis cette condamnation, le Parquet de Tours a fait appel. Mais en attendant ce nouveau procès, l'étudiant poursuit ses études de médecine à la Faculté de Limoges et c’est ce que dénoncent les organisations étudiantes depuis plusieurs semaines. 

Quelle procédure disciplinaire ? 

"Conformément à la règlementation, j’ai décidé de saisir la section disciplinaire conformément et en application de l’article R. 811-25 du Code de l’éducation. Même si les faits sont extérieurs à notre Université, l’analyse des textes a en effet confirmé que la section disciplinaire compétente est celle de l’établissement dans lequel l’étudiant est inscrit au moment de l’ouverture de la procédure."

Mais Isabelle Klock-Fontanille, se dit coincée. La raison : elle n’a pas reçu le fameux jugement du 19 mars dernier et n’a donc pas de pièce à verser au dossier d’une éventuelle procédure disciplinaire. 

Jointe par téléphone, elle nous explique qu'elle se tient prête. Elle se dit même "dans les starting-blocks". Dans son communiqué, elle précise : "L’acte de saisine est en cours de rédaction. (...) Le dossier est en train d’être constitué tant sur le plan factuel que sur le plan de l’analyse juridique, la gouvernance travaillant de concert avec l’avocat de l’Université. Sur cette base, et après ce travail, les poursuites seront engagées au plus tard à la mi-mai."

Mais pour l’instant, c’est statu quo, car la présidente explique qu'elle ne veut pas prendre le risque de se faire retoquer par la justice, comme l’a été le CHU qui a dû réintégrer l’étudiant en stage sur ordonnance du Tribunal administratif le 15 avril dernier.

À lire aussi : Malaise autour de la réintégration d'un étudiant en médecine condamné, en première instance, pour agressions sexuelles

Si l’Université de Limoges finit par engager cette procédure disciplinaire, que risque l’étudiant ?

Il risque jusqu’à l’exclusion définitive. La section disciplinaire de l’Université en a les compétences même si les faits qui ont conduit à la condamnation devant le tribunal correctionnel de Tours se sont déroulés dans le cadre privé.

Le communiqué précise ainsi que "les rapporteurs de la commission de discipline instruiront ensuite l’affaire par tous les moyens qu’ils jugeront propres à les éclairer. À l’issue d’une séance contradictoire d’examen de l’affaire, la commission de discipline pourra prononcer une sanction susceptible d’aller jusqu’à l’exclusion définitive de l’intéressé (article R. 811-36 du Code de l’éducation)."

Contacté ce même jour par téléphone, l’avocat des parties civiles, Maître Marc Morin, nous a précisé que : "L’Université a une obligation de sécurité à l’égard des étudiants. Elle et l’hôpital doivent s’assurer qu’il n’y a pas de dangerosité pour leurs étudiantes et leurs patientes."

Mais encore faut-il faire la preuve d'un danger comme l'explique la présidente de l'Université : "Quant à l’interdiction d’accéder aux locaux universitaires - réclamée par certains -, elle n’est juridiquement possible que si la présence de l’étudiant est, du fait de son propre comportement actuel, immédiatement incompatible avec le bon fonctionnement de l’Université." 

Il s'agit donc d'enquêter pour établir "dans le respect des règles de droit, si les faits ayant conduit au prononcé de la condamnation par le tribunal correctionnel de Tours le 19 mars 2024 (et dont la Cour d’appel d’Orléans aura à connaître sans doute avant la fin de l’année) sont de nature, disent les textes, à porter atteinte à l’ordre, au bon fonctionnement ou à la réputation de l’université." 

En tout cas, l’horloge tourne pour déclencher une procédure puisque l’homme de 26 ans passera son internat dans quelques semaines et pourrait ne plus dépendre de la Faculté de Limoges à la fin du mois d’août. Contacté par téléphone, l'avocat de l'étudiant, Me Alain Jakubowicz n'a pas souhaité commenter ce communiqué. 

Exclu puis réintégré en stage au C.H.U.

 Nicolas W. dans son procès pour agressions sexuelles en février dernier, a été condamné à cinq ans de prison avec sursis probatoire : le jeune homme a reconnu lors de son audition à la barre.

Le 26 mars dernier, le Parquet de Tours faisait appel, estimant que la décision n’était pas assez lourde. Un nouveau procès devrait avoir lieu à Orléans en fin d’année. Mais en attendant, les retentissements de l’affaire s’entendent du côté de la fac de médecine de Limoges.

À lire aussi : #MeToo à l'hôpital : étudiant en médecine condamné pour agression sexuelle, la colère monte sur le campus de Limoges

Car au volet judiciaire, s’ajoute le volet administratif : l'étudiant en 6ᵉ année de médecine doit-il poursuivre ses études ? Après la décision du Tribunal correctionnel de Tours, le C.H.U. de Limoges a décidé que non et la directrice générale l’a exclu de stage à titre conservatoire. Une décision retoquée par la Justice trois semaines plus tard : le 15 avril dernier, l’ordonnance de jugement émise par le Tribunal administratif de Limoges a suspendu la décision de la direction du C.H.U. Une réintégration obtenue notamment, parce que la procédure d’exclusion a été entachée d’erreurs de fait et de droit, la directrice générale du C.H.U. ne disposant pas du pouvoir de suspension de l’étudiant, et par le fait qu’aucune procédure disciplinaire n’avait été engagée par la présidente de l’Université.

La décision laisse l’avocat des victimes, Maître Marc Morin, perplexe.

C’est une annulation sur le plan de la forme, mais il y a tout de même un jugement de valeur un peu lourd. La motivation laisse dubitative, c’est une motivation d’un autre temps.

Maître Marc Morin, avocat des victimes

Une lettre ouverte en plein "MeToo Hôpital"

La poursuite des études de Nicolas W. est dénoncée par un collectif étudiant, le collectif Emma Auclert, soutenu par des associations et des syndicats étudiants : tous ont écrit le 24 avril dernier une lettre ouverte pour demander des explications, des sanctions et une prise de conscience aux Ministres, aux élus, et autorités concernées, alors même que la vague MeToo touche actuellement le secteur de la Santé et l’Hôpital.

Si la défense semble bien décidée à ce que Nicolas W. poursuive ses études, arguant que les faits se sont déroulés dans le cadre privé, sur le plan du droit, rien n’empêche de sanctionner l’étudiant « professionnellement ». Jointe par téléphone, une avocate spécialiste du droit public rappelle que par exemple, dans la fonction publique, un agent, même stagiaire, doit être exempt de tout reproche. Un employeur public peut donc sanctionner l’un de ses collaborateurs pour des faits qui se sont déroulés dans la sphère privée.

Une "jurisprudence" à Toulouse ?

Cette affaire résonne avec un cas où la justice avait pris la décision opposée : en novembre dernier, le Tribunal administratif de Toulouse a prononcé l’exclusion de tout établissement public d’enseignement pour 5 ans d’un étudiant en médecine. Dans ce cas, les juges ont estimé "que la matérialité des faits reprochés à l'intéressé est suffisamment vraisemblable". Par ailleurs, les investigations judiciaires se poursuivent concernant cet homme de 24 ans, soupçonné de viols et d’agressions sexuelles. 

L'étudiant limougeaud devra, quant à lui, se représenter devant un tribunal correctionnel lors de son procès en appel en fin d'année. 

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