Le nombre de cas explose dernières semaines dans le département. Parmi les 300 foyers de fièvre catarrhale ovine recensés dans les Pyrénées-Atlantiques en cette fin octobre, il y a le cheptel de Michel Erbin, éleveur à Angous, dans le Béarn. La profession réclame des vaccins adaptés pour protéger les bêtes et garder des exploitations autonomes.
"Pour moi, elle est condamnée. Demain, elle est morte", se désole Michel Erbin qui fait le compte de ses brebis malades. C'est son quotidien depuis une dizaine de jours.
Pas de traitement
Cette brebis souffre de fièvre catarrhale ovine (FCO) dite maladie de la langue bleue en référence à certains symptômes. "Les symptômes, c'est typiquement les oreilles tombantes, des bêtes abattues, des grosses fièvres, des bavements permanents, une langue qui commence à sortir, des œdèmes violacés... Des bêtes qui par conséquent ne peuvent plus se nourrir".
L'éleveur a du mal à les voir dans cet état. Sans traitement et face à un manque de vaccins, les éleveurs n'ont pas d'autre solution que de rentrer leurs bêtes et de soulager les malades aux huiles essentielles.
"Normalement, on devrait avoir quelques agneaux en bergerie et c'est tout le contraire, on regarde les brebis qui sont mortes, s'il n'y en a pas de malades...". Sans compter les avortements.
300 foyers de contamination
La FCO n'est pas contagieuse, mais se propage par la piqûre d'un moucheron, qui prolifère dans la douceur de cet automne.
Depuis quelques semaines, le nombre de cas explose : 300 élevages sont touchés dans le département, principalement l'ouest du Béarn et la Soule au Pays basque. Pour chaque exploitation touchée, il peut s'agir d'une seule bête ou de plusieurs dizaines. Les éleveurs lancent un appel. "Il y a urgence à répondre à cette crise sanitaire", insiste Michel Erbin.
J'ai reçu un courrier comme quoi je suis un foyer FCO, et après ? Qu'est ce qui se passe ?
Michel ErbinEleveur à Angous (64)
"On a vu ici, en Béarn, les premiers cas de FCO". Il se fait l'écho de nombreux collègues qui disent "être terriblement démunis" pour soigner ces animaux malades et faire face à la maladie. Un certain nombre d'entre eux ont pu vacciner, mais "il n'y a pas de vaccins pour tout le monde", depuis la fin août. En partageant leur expérience, ils en ont déduit que rentrer les bêtes en fin de journée pouvait limiter les contaminations du moucheron. Leur seul semblant de solution, à l'heure actuelle, face à l'épizootie.
Des vaccins insuffisants
Dernièrement, le 18 octobre dernier, des éleveurs béarnais, basques et landais, ont manifesté dans le centre-ville de Pau, à l'appel de la Coordination Rurale, pour réclamer des vaccins, pour lutter contre la FCO.
Michel Erbin, qui est aussi un des porte-parole du syndicat de la Confédération paysanne, réclame plus de soutien des pouvoirs publics comme lors d'autres épizooties récentes. "On parle beaucoup de vaccins. Il y a beaucoup de variants qui circulent".
Il y a urgence à mettre des moyens sur la recherche, pour donner la capacité aux éleveurs d'être autonomes et de se prémunir contre la maladie.
Michel ErbinEleveur et porte-parole de la Confédération Paysanne 64
Un appel au préfet
Avec ses collègues, il en appelle au préfet. D'abord pour recenser et indemniser les pertes d'animaux, mais aussi pour prendre en compte les préjudices indirects.
L'éleveur demande une véritable évaluation de la situation et des pertes générées par cette maladie de la langue bleue, c'est-à-dire le nombre de bêtes mortes, mais aussi les frais vétérinaires, les avortements et les pertes en termes de production de lait.
Michel Erbin pense "perdre 10% de ses 350 brebis", sans compter les agneaux qui ne naîtront pas. C'est tout le renouvellement du troupeau qui est menacé pour la prochaine saison estivale.
En attendant, le seul espoir pour les bergers, que les températures baissent, car le moucheron disparaît en dessous de douze degrés.
La fièvre catarrhale, c'est quoi ?
Également appelée "maladie de la langue bleue", ou en anglais "blue tongue" (BT), la fièvre catarrhale ovine (FCO) est une maladie virale touchant les ruminants domestiques (ovins, bovins, caprins) et sauvages, mais le plus souvent les moutons. Elle n’affecte pas les êtres humains ni les denrées alimentaires.
La maladie est transmise via des insectes piqueurs du type culicoïdes (moucherons) qui se nourrissent du sang des animaux.
Les symptômes possibles sont, chez l'animal, de la fièvre, des troubles respiratoires, une forte salivation, de l'œdème de la face et cyanose de la langue, d'où l'appellation commune de "maladie de la langue bleue".
Mais, selon l'ANSES, "la maladie peut aussi être asymptomatique. Certaines souches virales provoquent des retards de croissance chez les animaux malades, la mort de certains animaux et des avortements chez les femelles infectées".
On compte "36 types différents de ce virus, appelés sérotypes. Le pouvoir pathogène du virus varie considérablement d’une souche à l’autre". En France, "trois sérotypes sont présents : les BTV8, BTV4 et, depuis le mois d’août 2024, le BTV3", d'après le ministère de l'Agriculture.
La vaccination est le moyen de prévention le plus efficace, mais représente un coût élevé.