Témoignage. "C'est beaucoup de souvenirs, mais je ne peux pas y retourner". L'impossible retour en Irak des chrétiens d'Orient réfugiés en France

Publié le Écrit par Céline Serrano et Marie Radovic
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Depuis une dizaine d'années, plusieurs familles chrétiennes d'Orient vivent à Poitiers. Elles ont tout quitté sous la menace islamiste, pour reconstruire une vie dans la Vienne. Mathieu était ingénieur en Irak, il tient aujourd'hui un restaurant, dont les plats offrent un voyage imaginaire dans ce pays natal où le retour est impossible.

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Dans la cuisine de son restaurant à Poitiers, Mathieu Al Farouha recrée chaque jour les saveurs de son enfance. Poulet tikka, grillades, houmous, "des souvenirs du Moyen-Orient, d’Irak en fait".

L’Irak, son pays natal, quitté après l’attentat de la cathédrale de Bagdad, en 2010, dans lequel sa sœur aînée a été gravement blessée. Mathieu et sa famille ont alors dû fuir les persécutions infligées aux chrétiens d’Orient.

En France, dans les Deux-Sèvres puis dans la Vienne, il leur a fallu tout reconstruire. Trouver de nouveaux repères. "Quand nous sommes arrivés, on ne connaissait personne, nous étions tout seuls, isolés. Et puis nous avons commencé à rencontrer des gens en allant à l’église, ils nous ont aidés, et nous avons constitué une nouvelle famille, en France", témoigne Mathieu.

Accueillir après avoir été accueilli

Lui a dû renoncer au métier d’ingénieur qu'il exerçait en Irak, pour devenir restaurateur. Et la solidarité dont a bénéficié sa famille, il l'a pratiquée à son tour en embauchant Maryou, il y a quelques mois. Rencontré à la paroisse, Maryou Atallah a fui les exactions commises en Syrie envers les chrétiens. Il est désormais serveur dans le restaurant de Mathieu.

"On était deux millions de chrétiens en Syrie avant, il doit en rester 200 000, je pense. La plupart, comme moi, ont décidé de partir. Et maintenant, on est un peu partout, en France, en Allemagne, en Italie ou en Espagne", raconte Maryou.

L'impossible retour

Installée à Poitiers depuis une dizaine d’années, la famille Al Farouha n’imagine pas son avenir ailleurs qu’en France. Même si la nostalgie de l'Irak gagne parfois parents et enfants, devant l'album de photos de famille aux tons sépia.

"J'y suis née, j'y ai grandi, je me souviens de mon enfance, de l'école, mon mariage, la naissance de mes enfants, comment ils ont grandi. C'est beaucoup de souvenirs. Mais je ne peux pas y retourner" regrette Sanaa, la maman de Mathieu.

Alors que s'achève sa quatorzième année d'exil, la famille Al Farouha sait bien que le régime politique en place en Irak, et la situation particulièrement périlleuse au Proche-Orient, ne leur permet pas d'envisager un retour au pays natal.

Là-bas, le nombre de chrétiens a été divisé par trois, en seulement 20 ans.

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