REPORTAGE. Poitiers : début de la campagne d’hiver des Restos du Cœur. "Le Covid a boosté la solidarité"

Les Restos du Cœur de la Vienne ont lancé aujourd’hui leur 37e campagne, accueillant dans leurs nouveaux locaux de la Demi-Lune des bénéficiaires toujours plus nombreux depuis la crise sanitaire.

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Sacs de courses à la main, bonnet greffé sur la tête, les bénéficiaires attendent patiemment leur tour dans un froid quasi-polaire. Car à l’intérieur, seuls 6 à 7 d’entre eux peuvent faire leurs emplettes en même temps, Covid oblige. Il faut attendre son tour.

Une fois entré, on pourrait par ailleurs croire à un supermarché traditionnel. A condition de ne pas chercher d’étiquette de prix. Les denrées des Restos du Cœur sont évidemment gratuites, mais tout est fait – de l’agencement des rayons jusqu’au choix des produits, variés et adaptés aux habitudes alimentaires de chacun – pour dédramatiser le recours à l’aide alimentaire.

Dépasser la honte

Aujourd’hui en charge de la distribution des fruits et légumes, Marie-Christine, retraitée et bénévole depuis février dernier, échange quelques mots avec Coralie, qui remplit son sac de carottes et de navets "pour la soupe".

Cette mère de famille de 25 ans a mis plus d’un an à dépasser la peur de se faire aider. Mais après une maladie grave et une lourde opération, elle passe le cap. "En plus je suis enceinte de 5 mois et demi. J’ai toujours travaillé mais actuellement, c’est impossible", confie la jeune femme.

"J’étais dans la mouise financièrement", lance-t-elle. "Je ne sais pas où j’irais chercher de la nourriture si les Restos du Cœur n’existaient pas. Avant de venir, j’avais peur du regard des gens… Mais c’est ridicule : personne ne vous juge ici, au contraire on vous aide, tout le monde est bienveillant. A un moment donné, on a besoin d’aide. Il faut la saisir."

"Les profils se diversifient"

En 2020, près de 9 500 personnes ont été accueillies dans la branche poitevine de l’association. Plus d’1 million de repas ont quant à eux été distribués. Des chiffres symptomatiques d’une hausse de la précarité – la faute, notamment, à la crise sanitaire.

"Les profils se diversifient", détaille Sylvie Moriceau, présidente des Restos du Cœur de Vienne. "On a accueilli des jeunes, des indépendants… Pendant le confinement, on a été amené à réserver des créneaux le matin, par exemple, pour les commerçants et les restaurateurs. Beaucoup avaient honte de venir se faire aider, c’était humiliant pour eux."

Marie-Christine dresse le même constat. Elle avoue avoir pris conscience tardivement de l’ampleur du phénomène : "on voit plus de jeunes, d’étudiants, de familles monoparentales… Ça touche beaucoup de milieux sociaux quand même."

Inutile, pourtant, de céder au pessimisme. La sexagénaire dit prendre plaisir à donner de son temps dans l’association. "C’est un endroit convivial", explique-t-elle. "On aide aussi les gens psychologiquement. Ils viennent parler et passent un bon moment. Ces gens se sentent seuls ; la misère sociale, souvent, ça isole."

Une demande en augmentation

Avant de partir, Coralie présente sa petite carte jaune – grâce à laquelle elle peut bénéficier d’une quantité définie de nourriture et de produits d’hygiène, en fonction de la composition de son foyer. Comme elle, de plus en plus de Français seront amenés à tamponner ce morceau de bristol. "On prévoit 15% d’augmentation de la demande au niveau national", souligne Sylvie Moriceau.

Heureusement, la hausse du nombre de bénéficiaires est allée de pair avec des dons toujours plus importants. C’est la branche nationale des Restos du Cœur qui approvisionne les différentes sections départementales. "Le Covid a boosté la solidarité", se réjouit la présidente. "On a reçu plus de dons alimentaires et financiers.

Dans la Vienne, environ 470 bénévoles s’investissent régulièrement dans l’association. Mais à l’approche des fêtes de fin d’année, alerte Sylvie Moriceau, "il en faudrait au moins 100 de plus". Et si l’expérience vous tente, elle promet son lot d’émotions. "Récemment", conclut la présidente, "j’ai vu un bénévole pleurer après qu’on ait reçu le dessin de Noémie, une petite fille de 5 ans. Elle nous avait écrit : ‘Pour vous les Enfoirés du 86’ !"

Contact : les Restos du Cœur, 24 rue de la Demi-Lune, 86000 Poitiers 

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