Votre pharmacie risque bientôt de fermer, on vous explique pourquoi

Risque-t-on très vite d’avoir du mal à trouver une pharmacie, dans la Vienne ? La question se pose, car de plus en plus d’officines ferment très souvent, ne trouvant pas de repreneur. Une situation alarmante, alors que les étudiants de santé reviennent tout juste en cours. Les professionnels de ce milieu s’interrogent.

Imaginez faire plusieurs kilomètres, avant de trouver une pharmacie ouverte. L’inquiétude grandit, surtout en milieu rural. En Poitou-Charentes, 23 pharmacies ont fermé en l’espace de trois ans.

Un paradoxe, surtout ce mercredi 25 septembre, journée mondiale consacrée à ces professionnels de santé (lien en anglais).

Ces officines ont commencé à baisser le rideau, puisqu’il n’y a pas eu de volontaires pour continuer l’activité. Un manque que l'on perçoit entre autres à Persac (Vienne).

Le maintien in extremis d'un lieu de santé

Gilles Thomas et sa femme sont pharmaciens dans la commune. Ils n’ont pas imaginé reprendre du service, alors qu’ils viennent tout juste de prendre leur retraite. Face à l’urgence, Gilles Thomas estime que c’est un devoir d'aider de nouveau ses patients.

"J'ai bientôt 70 ans, et on ne va pas rester là éternellement. Je pense qu'il faut encore assurer pour le village et ses habitants un service médical. J'ai préféré mettre le bail à 1 euro, plutôt que de fermer définitivement, comme c'est le cas pour presque 400 pharmacies en France", se justifie-t-il.

Ces fermetures progressives des commerces touchent surtout les communes rurales. Six pharmacies ont fermé en moyenne dans chaque département de Poitou-Charentes, en l’espace de trois ans. À Persac, la pharmacie est un lieu de santé, et constitue un lien social. Les clients estiment que c’est un lieu de discussion, en plus de sauver des vies. Outre l’inquiétude, ils ressentent aussi de la colère.

"Il faut pouvoir se soigner, donc au moins acheter des médicaments et faire des choses de base. C'est très important d'avoir une pharmacie à moins de 10 ou 15 km. Si l'on n'a plus de pharmacies dans le territoire, où va-t-on ?", s'indigne Sylvain, un client.

Une pénurie sans solution durable pour le moment

Depuis quelques années, on ne se bouscule pas pour entrer dans la profession. Premier symptôme, sur les bancs de la fac. En 2022, l’université de Poitiers (Vienne) pouvait accueillir 74 étudiants en filière pharmacie. Pourtant, il n’y avait que 22 inscrits. "La santé est trop assimilée à la médecine. Il y a encore cette idée de hiérarchie dans les métiers de la santé, alors que les métiers ouverts aux pharmaciens ont des hautes responsabilités", souligne Denis Sarrouilhe, directeur du département de pharmacie dans cette université.

Certaines pharmacies fusionnent et des moyens sont mis en commun, mais cette solution ne vient pas à bout de cette désaffection pour le métier. "La situation est en train de devenir critique sur les territoires isolés. En Poitou-Charentes, on est vraiment une région rurale. Il y a une vraie souffrance au niveau de la profession, souvent un manque de reconnaissance et une rentabilité qui tend à devenir problématique. Ce qui fait que les jeunes n'ont pas envie de venir", tente d'expliquer Jacques Chasseriau, pharmacien et membre du conseil de l'ordre en Nouvelle-Aquitaine.

LIRE AUSSI ► "Ce médicament me permet de vivre encore quelque temps" : l'angoisse des malades face à la pénurie

Un constat préoccupant, qui s'ajoute à une pénurie en cours sur certains médicaments. Ce qui augmente le risque et peut poser un problème pour les patients. Certains produits de santé ne sont par exemple disponibles qu'en pharmacie, lors de catastrophes graves (accidents nucléaires).

Les spécialistes de la profession espèrent que ce manque de vocations pour le métier va s'inverser. Les connaissances en pharmacie sont très recherchées dans l’industrie, la recherche, mais aussi à l’armée.