Julie Breukel-Michel a fait une grève de la faim de trois semaines pour la préservation de la biodiversité et du vivant. Elle fait partie d'un collectif de citoyens qui manifestent ainsi leur détermination à voir déclarer un état d’urgence climatique.
Depuis le début du mois de décembre, en France mais aussi en Europe, des citoyens entament des grèves de la faim pour exiger le déblocage des moyens nécessaires à la transition écologique. Ils prolongent l'action de Pierre Larrouturou, rapporteur du budget de l'Europe, qui a lui-même fait une grève de la faim pour obtenir des leaders européens un plan de relance "climat-santé-emploi". Julie Breukel-Michel a fait le choix de s'engager dans ce mouvement "Grévistes de la faim pour un avenir possible" auquel chacun peut participer selon ses possibilités. En vidéo, le reportage au Mas d'Azil de Christine Ravier et Thierry Villéger.
Vous avez fait une grève de la faim durant 23 jours, quel était l'objectif ?
J'ai arrêté hier soir. Je ne m'étais pas donné de limite de temps. Tant que je me sentais bien, j'ai continué. C'est la grève d'un collectif. On se passe le relais de façon informelle. Certains s'inscrivent pour un jour par semaine, ils font des grèves perlées, d'autres pour trois jours de suite, etc. C'est en fonction de ce que chacun se sent de faire. Il y a un tableau qui comptabilise le nombre de jours au total.
On veut prendre soin du vivant en nous. L'idée n'est pas de se mettre en danger ni d'aller encombrer les urgences. Comme ça inquiétait beaucoup ma famille, j'ai recommencé à m'alimenter un petit peu la veille de Noël... J'étais très contente de déguster une carotte en guise de repas de fête !
Quel est l'esprit de cette action pour vous ?
Je me suis engagée pour qu'on prenne soin du vivant, pour faire quelque chose en tant que maman, que grand-maman. Je suis épouvantée par l'inaction globale, pas seulement des politiques mais aussi de nos concitoyens. J'ai bientôt 53 ans et je constate que mes petits-enfants ne connaîtront pas le même monde que moi. C'est effarant qu'en 50 ans, nous ayons perdu une telle biodiversité.
L'idée de base, c'est d'obtenir une taxe sur les transactions financières. Cela va réduire la pression sur le vivant mais ça n'est pas suffisant. Le mouvement est plus large : il y a aussi les médit'actions tous les jeudis entre 12h30 et 13h si possible devant des lieux symboliques. Mais les gens peuvent aussi s'y associer en méditant de chez eux. On collecte des photos pour montrer que des personnes de plus en plus nombreuses s'engagent.
Que voulez-vous obtenir ainsi ?
L'idée est d'amener plus de conscience sur ces décisions que tous nous devons prendre collectivement. Pour ma part, j'ai profité de la médit'action de jeudi pour apporter une lettre au maire de mon village (Le Mas d'Azil).
Je demande à ce que la question de la préservation du vivant soit examinée au prochain conseil municipal et que soit déclaré un état d'urgence climatique. Il n'y a pas que les grandes villes qui sont concernées. En nombre, il existe infiniment plus de villages...
Vous vous êtes mobilisée pendant 23 jours ? Que ressentez-vous aujourd'hui ?
Cette grève de la faim, ça a été transformateur... ça m'a fait sortir d'une forme de sidération que j'éprouvais en écoutant les nouvelles, d'une forme d'impuissance aussi. J'ai senti ma force et ma détermination grandir. C'est une action que j'ai choisie parce qu'elle est non-violente.
L'essentiel pour moi, c'est d'être dans l'action, pas dans l'opposition mais plutôt dans la prise de conscience. Je me rends compte que lorsqu'on change soi-même, c'est un facteur de changement pour les gens qui sont autour de nous. Ce n'est peut-être pas grand-chose mais quand je vois comme le nombre de jours de grève augmente, ça me donne de l'espoir.
Et au-delà, comment voyez-vous l'avenir ?
D'une façon plus générale, je crois qu'il faut retrouver une forme de sacralité de la nature. Actuellement, on veut tout contrôler. Le délit d'écocide n'est pas acté. C'est un pas essentiel à faire pour se mettre au diapason du vivant. Les générations qui nous ont précédé ont su le faire. Il n'y a pas de raison qu'on n'y arrive pas.