Au lycée d'enseignement général et technologique agricole de Pamiers en Ariège, les lycéens testent un fertilisant insolite, de l'urine humaine. Avec des résultats déjà très encourageants, cette expérience permettrait aux exploitations de faire des économies, mais aussi de mieux respecter les sols.
De l'urine comme engrais. C'est le pari un peu fou qu'a fait le lycée d'enseignement général et technologique agricole de Pamiers en Ariège depuis le début de l'année scolaire sur des parcelles d'orge.
Il s'agit d'un partenariat avec une start-up girondine, Toopi organics, qui récolte l'urine dans des festivals, des aires de repos et des établissements qui accueillent du public lors d'événements.
Les bienfaits de l'urine
Si l'usage de ce liquide organique peut rebuter, il est pourtant très bénéfique pour les sols. "Dans l'urine, il y a de l'azote, du phosphore et du potassium. Ce sont des nutriments dont la terre a besoin", indique Romain Couture, responsable Impact de la start-up. Il ajoute, "pour apporter l'ensemble des minéraux nécessaires, il faudrait épandre environ 17 000 litres par hectare, donc on la fait fermenter pendant deux jours afin d'obtenir toutes les bactéries nécessaires". Selon l'entreprise, après repos du produit, il suffit de cinq litres par hectare.
Finalement, après fermentation, le produit va permettre à la plante de mieux assimiler les nutriments.
Romain CoutureResponsable impact chez Toopi organics
En quelques mois, les étudiants et leur professeur observent déjà les premiers résultats. Pour repérer des effets, ils ont séparé des parcelles témoins de celles qui reçoivent ce biostimulant. "Il y a une différence au niveau du système racinaire, constate Arnaud Vacellone, professeur d'agronomie, le produit permet une meilleure résistance de la plante en fonction du climat et des conditions du sol".
Sur les deux pousses que le professeur tient dans la main, un des deux possède des racines plus développées et une couleur plus foncée. C'est cet indicateur qui permet d'affirmer que la plante supportera mieux les aléas climatiques.
Les élèves autour de lui abondent, ils ont bien remarqué la différence entre les deux pousses.
Une alternative pour l'agriculture de demain
Des plantes plus résistantes grâce à ce biostimulant, c'est une promesse non négligeable pour les agriculteurs qui vont de plus en plus subir le dérèglement climatique dans les années à venir.
Plus que s'adapter aux enjeux environnementaux, ce procédé pourrait permettre de considérablement réduire l'utilisation d'engrais chimique sur les exploitations.
Ça pourrait nous permettre de nous rendre plus indépendants des engrais et de se diriger vers une agriculture plus biologique et meilleure pour les sols.
Lohan DejanLycéen
Un autre lycéen souligne que réduire les engrais chimiques, c'est aussi une manière d'augmenter la rentabilité des exploitations puisque ces produits sont très coûteux.
"Le biostimulant était aussi un moyen de reterritorialiser notre agriculture. C'est-à-dire produire localement des engrais", met en avant Anna Campana, responsable du plan local Enseigner à produire autrement.
Pour elle, "cette expérimentation a vraiment un sens pour nos apprenants. Les premiers résultats sont très bons et il s'agit d'une ressource durable puisqu'on part de l'urine humaine collectée ici, en France". La responsable note l'importance de mettre l'agroécologie au cœur de la réflexion des lycées spécialisés.
Il faut fonctionner avec la nature et non pas contre la nature.
Anna CampanaResponsable du plan local Enseigner à produire autrement
"L'expérimentation ne fait que commencer, se réjouit Anna Campana, on va continuer à travailler sur les sols vivants et des expérimentations sur la biodiversité pour connaître l'impact du produit sur les insectes et les microorganismes".
La prochaine étape pour les lycéens va être de tester le biostimulant sur des parcelles de luzerne et de maïs fourrager.