Puig-Aubert, surnommé "Pipette", était un enfant du pays : né à Arles-sur-Tech, il marque les esprits dès 1944 et s’impose comme une légende du rugby à XIII. Mort en 1994, il a laissé une trace indélébile dans l’histoire de ce sport.
Mai 1944. La France est encore sous l’occupation tandis que se tient, à Paris, la finale du championnat entre Bayonne et l’USAP. Malgré plusieurs alertes à la bombe, les supporters basques et catalans n’en démordent pas. Montés à Paris pour l’occasion, ils ne quitteront pas le stade.
Il faut dire qu’au milieu - et au cœur d’un véritable feu d’artifices des attaquants perpignanais – se tient un arrière de seulement 18 ans, Puig-Aubert, à l’aube d’une carrière fracassante.
Diego Maradona catalan
Doué, ultra-doué même. A tel point qu’il suscite l’intérêt d’équipes comme l’AS Carcassonne XIII, qui débarque chez lui une valise remplie de billets pour l’attirer dans ses filets. "Puig-Aubert était un homme phénoménal", souligne Jérôme Prévôt, journaliste au Midi Olympique. "Ceux qui l’ont vu jouer parlent d’un talent assez unique. Je l’ai toujours comparé à Diego Maradona."
Pour son père, fier supporter de l’USAP, pas question de laisser filer le prodige. "Ils sont allés le chercher pendant que le papa était à l’ouverture de la chasse. Le papa va le voir jouer à l’USAP… Mais entre-temps, Puig-Aubert était parti à Carcassonne", raconte Pierre Vergès, chroniqueur de rugby à XIII.
"Son père va au commissariat, porte plainte pour enlèvement et détournement de mineur", ajoute Jérôme Prévôt. "Il avait l’idée que la gendarmerie intervienne pour empêcher Carcassonne de faire jouer son fils."
Une anecdote dont se souvenait parfaitement Puig-Aubert lui-même, comme il le raconte en 1975, alors âgé de 50 ans : "j’ai vu arriver deux gendarmes venus m’empêcher de jouer. J’ai joué quand même !"
L'apogée plus le déclin
C’est en 1951, lors d’une tournée en Australie – la première tournée d'une équipe de rugby à XIII représentant la France sur le continent – que Puig-Aubert entre véritablement dans la légende. Il inscrit 251 points durant la tournée, dont ceux de la victoire lors des deux tests-matchs. A son retour d’Australie, il est sacré plus grand champion français de l’année 1951 – tous sports confondus.
Dès lors, le rugbyman accumule les exploits et fait vibrer les foules… avant de décliner, petit à petit. "J’ai pris douze kilos", confie-t-il en 1975. "Je n’avais pas de volonté pour les reperdre, je n’allais pas courir… C’était un peu le commencement de la fin !"
Malgré tout, jusqu’au bout, son célèbre coup de pied fera merveille. Décédé en 1994 à Carcassonne, il repose aujourd’hui dans sa ville de cœur et de racine, Arles-sur-Tech. Et reste aujourd’hui l’un des plus grands joueurs de l’histoire du rugby.