À Sigean, l'Etat veut faire fermer l'ancien camping Le Pavillon, devenu une copropriété avec 63 familles y résidant à l'année. La sous-préfecture de Narbonne évoque des risques d'inondation et d'incendie. Les résidents vivent dans la crainte d'une possible expulsion.
"Vous allez me faire pleurer." Pour Joseph Vinci, propriétaire d'une parcelle depuis 1979, l'évocation d'une possible expulsion du Pavillon est douloureuse. Comme les 63 familles qui vivent à l'année dans cet ancien camping, Joseph a reçu un courrier de la sous-préfecture de Narbonne, lui annonçant la volonté de l'Etat de fermer définitivement le terrain. Et donc, sa possible expulsion.
Le camping Le Pavillon, créé dans les années 1990, était devenu au fil des ans une copropriété, avec de vraies habitations en dur qui cotoient des mobilhomes où certains vivent à l'année, et où d'autres viennent en vacances ou en week-end. Le terrain, prévu pour 57 unités d'habitation, compte maintenant 290 parcelles. Ce qui a conduit les services de l'Etat à réfléchir au futur de l'endroit.
Des "risques forts" d'inondation et d'incendie
"Il y a des risques inhérents à ce site, comme les inondations, la submersion marine, mais aussi les incendies, détaille Rémi Recio, sous-préfet de Narbonne. Cet aléas est d'ailleurs particulièrement fort et même dramatique à cet endroit, avec l'accumulation et la densification des constructions, et ce qui était fait en terme d'acheminement des secours qui ne correspond plus à l'utilisation actuelle."
Autant de justifications qui ne passent pas auprès des membres de la copropriété du Pavillon. "Ils parlent de risques d'inondation, alors que Port-la-Nouvelle agrandit son port donc nous protège, et qu'une digue a été faite en 2014", avance Laurent Hourde, président du syndicat de la copropriété.
"Le courrier m'a vraiment surprise, car nous avons des alarmes au canal qui nous préviennent de la montée des eaux, nous sommes inscrits à l'alerte météo... Lors d'un rendez-vous, le maire [de Sigean] nous disait que c'était gérable", relate Sabine Machado, membre du conseil syndical.
Concernant le risque incendie, la sous-préfecture rappelle l'histoire de ce petit garçon, décédé en 2018 des suites d'un feu qui s'était déclaré dans un mobilhome du camping. "Ça reste un incident domestique, qui peut arriver partout", pointe Laurent Hourde, alors que le Pavillon dispose de nouveaux aménagements pour pallier les risques incendie, comme une citerne neuve.
Des personnes âgées habitent ici, si demain on les met en appartement, on les envoie au mouroir ! Leur vie est ici, dehors, au camping.
Sabine MachadoMembre du conseil syndical de la copropriété du Pavillon
Pour certains résidents, quitter l'ancien camping est impensable. Joseph Vinci a vendu en 2016 sa maison de 600 mètres carrés pour venir habiter un mobilhome et "être tranquille", dans un endroit "plus restreint". "On vit dehors ici, c'est la belote, les apéros le soir, c'est un autre mode de vie ! C'est tellement agréable, ça serait dur de partir."
D'autres personnes, aux revenus modestes, n'auraient même pas les moyens d'habiter ailleurs. Et si la sous-préfecture de Narbonne affirme vouloir reloger toutes les personnes concernées "dans les meilleures conditions possibles", pour l'instant, seules huit personnes en ont fait la demande. Les services de l'Etat s'attendent à une procédure "qui prendra du temps", où il faudra "convaincre" progressivement les habitants.
Les expropriations doivent intervenir en 2024
L'arrêté préfectoral de fermeture du site n'a pas encore été pris, mais selon Rémi Recio, "les opérations de gré à gré ou d'expropriation devront intervenir cette année", en 2024, afin de pouvoir poser "les grands échelons sur la renaturation du site" dans la foulée.
Les résidents, eux, ont fait appel à un avocat sur Paris. Ils attendent maintenant d'obtenir des informations complémentaires de la sous-préfecture, avant d'envisager de potentiels recours.