Six prévenus, dont l'ancien sergent Nicolas Vizioz, auteur des tirs ayant blessé 16 personnes lors d'une démonstration du 3e RPIMa de Carcassonne, le 29 juin 2008, comparaissent de nouveau, jeudi, devant la cour d'appel de Montpellier.
Cette audience intervient après un appel du parquet qui souhaite établir "un deuxième examen purement juridique de la chaîne des responsabilités ayant conduit à ce drame", a expliqué à l'AFP le substitut général Joël Garrigues.
"Ce sera une audience de droit", a-t-il prévenu.
Le 14 mai, la chambre militaire du tribunal correctionnel de Montpellier avait condamné l'ex-sergent Vizioz à deux ans de prison avec sursis. Un jugement qualifié par les avocats de décision "d'apaisement, de réconciliation".
Nicolas Vizioz, un ancien du groupement des commandos parachutistes (GCP) de 33 ans, a été reconnu coupable d'avoir ouvert le feu sur le public le 29 juin 2008 avec une arme chargée à la fois de balles réelles et de balles à blanc, lors des journées portes ouvertes du 3e Régiment de parachutistes d'infanterie de marine.
Les magistrats ont également infligé six mois avec sursis, sans inscription au casier judiciaire, à l'ex-lieutenant Christophe Allard et à l'ex-capitaine Hugues Bonningues.
En revanche, la cour a relaxé le lieutenant-colonel Jean-Baptiste Pothier, l'ex-lieutenant-colonel Lionel Peyre ainsi que le patron de l'unité à l'époque, l'ex-colonel Frédéric Merveilleux du Vignaux, au terme de trois journées d'audience au cours desquelles les prévenus avaient montré émotion et repentance.
Mais si aux yeux du parquet, le principal coupable est bien M. Vizioz, il y a aussi eu un enchaînement de responsabilités imputables à la hiérarchie.
La justice veut comprendre les erreurs d'une "pratique institutionnalisée" et du "laxisme"
C'est en ce sens qu'en mai le procureur Damien Kincher a requis un an de prison avec sursis contre MM. Allard et Bonningues, ainsi que six mois de prison assortis du sursis à l'encontre de MM. Peyre et de Merveilleux du Vignaux.
Le procureur a juste refusé de trancher le cas du lieutenant-colonel Pothier, laissant le tribunal décider de sa culpabilité, précisant que s'il devait opter pour le oui, lui demandait deux mois avec sursis.
Le 29 juin 2008, la démonstration tourne au drame
Le sergent Nicolas Vizioz avait ouvert le feu lors d'une démonstration de libération d'otages. Dans les fumigènes, visant un faux sniper devant le public, il n'avait pas réalisé qu'il tirait un mélange de balles à blanc et de balles réelles.
C'est ce sergent très expérimenté qui avait lui-même chargé son fusil d'assaut, pourtant doté d'un BTB (bouchon de tir à blanc). Il a été révoqué sans droit à la retraite après les faits.
Sur le plan disciplinaire, Peyre et Merveilleux du Vignaux ont écopé de 30 jours d'arrêt, tout comme Bonningues radié des cadres en 2010. Allard a lui pris 20 jours mais a démissionné. Enfin Pothier n'a pas été sanctionné par l'armée.
L'audience en première instance n'a pas permis de comprendre les raisons de l'erreur du sergent Vizioz. Elle a en revanche mis au centre du drame un certain laxisme dans le fonctionnement de cette unité engagée régulièrement dans les opérations extérieures, en Afrique ou en Afghanistan.
A titre d'exemple, les GCP, l'élite du 3e RPIMa (20 soldats sur 1.200), avaient pris l'habitude de soustraire et de conserver en dépit des règlements et des notes de l'état-major des munitions pour les exercices et préparer les engagements. Il s'agissait par exemple d'essayer les armes juste avant de partir en opération.
Selon M. Bonningues, désormais ingénieur civil de la direction de l'armement, "la pratique était institutionnalisée partout", et beaucoup de monde savait. "Cela permettait d'échapper à la lourdeur administrative", avait confirmé le lieutenant Allard.