L’apprentissage a le vent en poupe. Sur Parcoursup, 7500 formations sont proposées en alternance. En Occitanie, plus de 70 700 jeunes ont choisi cette voie qui combine formation et travail en entreprise. Alors bon filon pour trouver un emploi ? Ou bon plan pour les entreprises avec une main d’œuvre peu coûteuse ?
Un million d’apprentis en France, c’est l’objectif visé par le gouvernement d’ici à 2027. En clair, doubler les effectifs en 10 ans. Obtenir un diplôme, avoir une première expérience professionnelle rémunérée séduit de plus en plus de jeunes en ces temps de crise économique. Les employeurs, eux, bénéficient depuis début 2023 d’une aide de 6000 euros pour chaque contrat d’apprentissage signé. Un succès qui a aussi ses revers : 1 jeune sur 4 rompt son contrat avant la fin.
France 3 Occitanie a posé 3 questions à Louis LAYRAC-MARBEZEY, membre d’un syndicat qui défend étudiants, lycéens et apprentis en Haute-Garonne.
France 3 : à quelles difficultés sont confrontés les apprentis ?
Tout d’abord, être traité comme un salarié au rabais, effectuer les missions et les travaux des employés lambda mais à un coût bien moindre pour l’employeur puisque nous sommes payés en-dessous du SMIC.
Ensuite on peut avoir des problèmes de harcèlement de la part de supérieurs ou de collègues plus âgés qui auraient du mal à respecter les petits jeunes qui viennent apprendre.
La première difficulté, c’est donc le respect du droit des salariés et en particulier celui des apprentis.
Il y a beaucoup de droits que les jeunes ne connaissent pas comme le droit à une semaine de congé pour réviser ses examens ou des aides pour les déplacements et le logement.
France 3 : certaines entreprises abusent-elles de cette main- d’œuvre « bon marché » ?
Oui j’ai plusieurs exemples. Dans ma classe, deux collègues sont en alternance depuis l’an dernier dans une entreprise de 250 personnes. L’équipe technique est composée à 100% d’alternants ! Et ce sont les « deuxième années », considérés comme les plus expérimentés, qui forment les petits nouveaux ! Ce sont des situations qui peuvent interroger. On est dans l’abus et ça arrive plus souvent qu’on ne pense. Ce genre de situation se retrouve aussi chez des artisans qui peinent parfois à recruter. Prendre un apprenti, c’est avoir des aides de l’Etat pour payer les salaires mais c’est aussi une main d’œuvre pas chère qui sera peu revendicative, précaire, docile.
France 3 : comment limiter les dérives ?
Il faudrait envisager plus d’inspection et un suivi accru de la part des écoles. Normalement, un professeur sert de tuteur et fait le suivi avec l’entreprise. Mais un prof pour 10 alternants ou plus, ce n’est pas assez ! Et s’il y a un problème, les enseignants ont peu de moyens pour faire pression.
Il faudrait par exemple une présence renforcée et plus de visites de l’inspection du travail, avec des postes dédiés à l’apprentissage.
On peut imaginer aussi un suivi des syndicats, pour proposer des groupes de discussion à l‘intérieur des entreprises.
Et enfin des formations à la pédagogie pour les employeurs car tous ne savent pas former. Il y a clairement des lacunes.
Alternance, apprentissage : un bon filon pour l’emploi ?
Ce sera le thème de l'émission "Dimanche en politique" enregistrée au Lycée Louise Michel à Narbonne et diffusée sur France 3 Occitanie, dimanche 19 février à 11h30.