Coronavirus : la vente de tabac a augmenté pendant le confinement et explosé dans les Pyrénées-Orientales

 23% de ventes supplémentaires pour les tabacs en France, et jusqu'à 70% en zone frontalière avec l'Espagne. D'après une étude révélée par la SEITA, le confinement aurait engendré 1,9 million d'acheteurs de tabac supplémentaires. En cause surtout, l'impossibilité d'achats détaxés à l'étranger. 

A première vue les chiffres sont vertigineux. L'augmentation de la vente de tabac en france au mois d'avril correspondrait à 1,9 millions de fumeurs en plus. Ou plus exactement 1,9 millions d'acheteurs en plus. Ces chiffres révélés par Logista, fournisseur de la quasi-totalité des points de vente officiels en France, annoncent une augmentation globale des ventes de 19,5% pour les cigarettes et 43% pour le tabac à rouler par rapport au mois de mars dernier.
 

La fermeture des frontières principale cause de la hausse des achats de tabac en France



Des données qui explosent quand on se penche sur les zones frontalières et les seules ventes de tabac à rouler. Ces ventes doublent ou triplent dans le nord et l'Est de la France près de la Belgique et de l'Allemagne. Et elles augmentent de plus de 70% près de l'Espagne, un chiffre qui cumule les données en Pays catalan et au Pays Basque.
 


Pour le médecin responsable de l'unité de tabacologie au CHU de nîmes, Stéphanie Pelletier, c'est indubitablement la fermeture des frontières qui induit cette hausse de la vente de tabac en France.

"Avant le confinement, beaucoup de mes patients faisaient des aller-retour en Espagne pour acheter du tabac, il y a même des bus qui étaient affrêtés, ce ne sont pas que les frontaliers, Nîmes n'est pas tout près...".
 

 

Une hausse des ventes à rapprocher avec les estimations d'achats habituels de tabac détaxé


La hausse globale des ventes de tabac en France de 23% est à comparer avec un autre chiffre, donné en 2018  par une étude réalisée pour le compte des cigarettiers (avec une méthodologie « ramasse-paquets » empirique, qui retrace l’origine présumée d’emballages retrouvés sur la voie publique). D'après les estimations, les « cigarettes illicites » représentaient en 2018 à 14,8 % de la consommation en France. Si l’on y ajoute les achats « transfrontaliers légaux » et le duty free, les ventes hors buralistes représentaient 26,8% de la consommation en 2018.

Un marché par définition difficilement quantifiable avec précision. Cette période de confinement pourra peut-être permettre d'affiner les chiffres grâce, justement, à ce report obligé des consommateurs sur le marché local. A condition toutefois que le confinement n'ait pas induit des comportements de surconsommation importante de la part des fumeurs.
 

L'impact du confinement sur la consommation des fumeurs difficilement quantifiable


L'angoisse provoquée par la situation de pandémie peut augmenter la consommation de tabac chez les fumeurs dont le tabagisme est lié au stress. C'est le sens de l'alerte lancée par Bernard Basset, président de l'Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie  après 15 jours de confinement. Surtout lorsque cette angoisse est décuplée par l'inactivité forcée. 
 

Augmentation du tabagisme avec le stress


C'est aussi l'observation qu'a pu faire une sophrologue de Montpellier, Sandrine Trémorin, qui participe à un programme en tabacologie mené à la clinique de Clémentville pour venir en aide aux fumeurs désirant arrêter. 
Depuis le début de la crise sanitaire, la sophrologue n'a pas noté d'augmentation des appels à l'aide de ses patients. En revanche, certains d'entre eux avouent tout de même une envie croissante de fumer ou d'avantage de mal à s'arrêter. 


Même constat pour la responsable de l'unité tabacologie du CHU de Nîmes. Depuis le confinement, les consultations du docteur Pelletier "en présentiel" pour les nouveaux patients ont stoppé mais les consultations téléphoniques se poursuivent avec les patients déjà insérés dans le programme d'aide pour s'arrêter de fumer.

" Les patients qui avaient arrêté de fumer avant le confinement n'ont pas repris, explique le docteur Pelletier.  En revanche, peu ont réussi à s'arrêter de fumer pendant cette période. Leur motivation reste mais elle est "transférée" à l'après...Ils se promettent de cesser totalement lorsque le confinement, avec son lot de stress et l'ennui sera terminé".

 

Moins de cigarettes pour les fumeurs "festifs"



C'est un autre constat fait par Sandrine Trémorin à la clinique Clémentville. Les fumeurs "festifs" consommeraient moins de cigarettes avec le confinement.

Sur la trentaine de patients que je suis régulièrement, précise la sophrologue, quelques uns, qui fument de façon plutôt "sociable" lors de rencontres entre amis, apéros et autres moments de détente ont considérablement réduit leur dépendance au tabac. Ils sont moins tentés et profitent même du danger potentiel que représentent les courses en ville pour différer leurs achats au bureau de tabac.

Quant aux premières études sur le coronavirus qui indiqueraient que les fumeurs seraient moins touchés par le virus, elles restent à démontrer mais n'ont pas, selon la responsable de l'unité tabacologie du CHU de Nîmes, induit de réflexe d'augmentation de la consommation de cigarettes chez ses patients. 

"Heureusement , explique le médecin, car il ne faut pas confondre tabac et nicotine, et on sait que les grands fumeurs ont des pathologies respiratoires plus nombreuses que le reste de la population et qu'ils sont donc a priori plus fragiles face à ce virus".
 

De son côté, la sophrologue montpelliéraine n'a eu qu'un patient qui envisageait de donner à sa femme non fumeuse un patch "au cas où ça la protègerait". Sandrine Trémorin l'en a dissuadé. Non seulement le patch aurait rendu bien malade la non-fumeuse, mais il aurait pu induire une addiction plus dangereuse que la menace de la contagion.

Rappelons qu'en France, le tabac est responsable de la mort de 75 000 personnes par an, dont 45 000 par cancer.

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