A Vauvert, en Petite Camargue, une famille a imaginé un autre mode de vie qui prône l'autonomie alimentaire et énergétique. Elle a créé une ferme alternative où elle expérimente des outils et des techniques qu'elle partage avec ceux qui s'intéressent à des modèles de développement plus durables.
A l'origine du projet
Il y a 20 ans, Bruno Lorthïois et sa femme Anne ont acheté un terrain agricole à Vauvert sur lequel se trouvait une maison des années 60 mal isolée. Ils ont alors cherché un moyen de l'isoler et se sont tournés vers un matériau insolite : de la laine de mouton lozérienne !
Un matériau écologique et peu cher qui leur permet de réduire leur consommation d'énergie de 75%. Une première expérience qui va déclencher une autre façon de voir la vie. "Je me suis dit que l'on pouvait utiliser des déchets pour faire un tas de choses efficaces et économiques pour notre vie quotidienne" explique Bruno Lorthïois.
Du projet familial à l'écolieu
Bruno a fait des études de physique chimie. Ce qu'il aime, c'est inventer et bricoler. Il imagine des alternatives étonnantes et construit sur son terrain des outils d'un nouveau genre pour sortir de notre société de consommation qui épuise nos ressources naturelles et pour lutter contre l'obsolescence programmée. Et cela commence dès l'entrée de sa propriété.
"J'ai crée un chauffe eau solaire avec d'anciens cumulus entartrés que les gens ont jeté à la déchetterie. J'ai disposé des parois transparentes dessus très isolantes qui vont garder la chaleur. L'eau va chauffer directement avec les rayons du soleil. Il n'y a pas d'électronique, ni de pompe, ni de liquide antigel" raconte Bruno Lorthïois
Son invention permet d'alimenter deux douches extérieures. Un système efficace qu'il compte améliorer. Il envisage d'ajouter des volets pour éviter les déperditions nocturnes.
Partager ses expériences
Un état d'esprit, une philosophie de vie que Bruno et sa famille souhaitent partager avec le plus grand nombre. Ils ouvrent leurs portes à des woofers, des bénévoles qui viennent passer un temps dans des fermes écologiques pour apprendre et échanger. Mathilde et Olivia se sont installées dans ce lieu alternatif pour faire un pause dans leur parcours et chercher leurs voies professionnelles.
"En venant ici je me suis aperçue qu'en tant que citadine j'étais très dépendante pour me nourrir, me chauffer...j'avais envie de consommer différemment et de changer mon mode de vie" raconte Olivia
Car ici tout le monde participe à la vie en collectivité. Et ce jour là, il faut réparer l'éolienne pygotte, une éolienne domestique autoconstruite imaginée par un agriculteur écossais, dont les pâles en bois ont souffert des avaries du temps. En 2013, ils ont invité l'association Tripalium. Pendant une semaine, une vingtaine de personnes, chacun avec ses compétences, a construit cette petite éolienne à partir de matériaux bruts. Aujourd'hui, elle produit 2.000 KW/h. Une belle performance.
Tous les gens qui viennent ici découvrent une façon de penser différente. Quand ils remettent en question notre société de consommation et ses automatismes, le pari est gagné. Ici chacun va à son rythme sans objectif précis. Cette notion de liberté est très importante pour nous. C'est une expérience collective et humaine très enrichissante" analyse Bruno, le maître des lieux.
Le four solaire
Mais la boîte à idées de Bruno ne s'arrête pas au domaine de la production d'énergie. Pour cuire ses aliments dont la plupart proviennent de son potager bio autogéré, il a mis au point un cuiseur solaire. Un drôle d'engin qui ressemble à une immense parabole en aluminium."L'idée c'est de concentrer le rayonnement thermique en un point, au niveau de la cocotte par exemple qui est posé au milieu sur une grille. Cela fonctionne comme un miroir qui reflète la lumière et l'énergie solaire. Evidemment il faut toujours viser le soleil. Et pour maîtriser la cuisson il suffit de mettre un drap sur une partie de les réflecteurs pour baisser la température. C'est comme tourner le bouton de la gazinière" détaille Bruno.
Et pour tous ceux qui auraient envie de reproduire son modèle, Bruno a conçu des manuels pédagogiques et organise des stages pour apprendre aux autres à construire leur propre four solaire.
Lutter contre le gapillage et les emballages
Et quand il ne cuisine pas, Bruno et sa famille conservent les fruits et légumes qu'ils cultivent avec une dizaine de familles qui viennent régulièrement partager leur savoir faire. Quand ils récoltent et ne consomment pas directement, ils évitent de congeler les aliments. "La congélation utilise beaucoup d'énergie. Nous on stérilise ou on sèche avec un séchoir solaire. Cela évite aussi d'utiliser des emballages qui polluent la planète" complète Anne Lorthïois.
Et depuis 2001, la famille Lorthïois a aussi crée sur son site une coopérative, "la Saladelle", à laquelle adhère une trentaine de familles. Elles peuvent ici acheter des produits fournis par des producteurs locaux.