Des foyers de grippe aviaire ont été détectés dans des élevages de la commune de Manciet (Gers). L'abattage préventif provoque la colère des éleveurs mais la vaccination ne permettra pas de tout résoudre, selon Pierre Bessière de l'école vétérinaire de Toulouse (Haute-Garonne).
Le 17 et 18 janvier, deux suspicions de grippe aviaire, dans des élevages de canards, ont été déclarées sur la commune de Manciet dans le département du Gers. Les premiers dépistages sont positifs.
À la suite des investigations menées suite à ces cas, trois élevages en lien épidémique, ont fait l’objet de premiers tests de dépistages, qui se sont révélés positifs. Sont concernées les communes de Laujuzan, Eauze et Ramouzens.
Les cinq élevages concernés ont été dépeuplés le 18 et 19 janvier 2023. Dans ce contexte de contamination, le préfet du Gers a pris deux arrêtés définissant une zone temporaire de 10 km, autour de ces suspicions. Elle permet de bloquer le mouvement des oiseaux.
"Coup dur pour les éleveurs du Gers"
À Aignan, commune située à une quinzaine de kilomètres, où cinq foyers ont déjà été détectés, la nouvelle risque de ne pas faire plaisir aux agriculteurs. Le préfet du Gers sent il la pression monter ? Dans un communiqué de presse, le représentant local de l'Etat apporte son soutien aux exploitants agricoles "cette reprise des cas d’influenza aviaire au nord de la zone préalablement dépeuplée est un nouveau coup dur pour les éleveurs du Gers. L’Etat soutiendra les exploitants concernés via les dispositifs d’indemnisation économique et sanitaire."
La vaccination seule solution ?
Si le dépeuplement et l’abatage préventif des élevages font grogner les agriculteurs, il s’agit pourtant d’une mesure indispensable pour tenter d’arrêter la propagation du virus. "La question n’est pas tellement "est-ce que ça sert à quelque chose", mais "est-ce que cela suffit de la faire ou s’il ne faut pas, en complément, se pencher sur d’autres solutions". Et c’est pour ça qu’on se penche sur la vaccination", explique Pierre Bessière, chercheur à l’Ecole vétérinaire de Toulouse et l’Inrae et docteur en virologie. Cette vaccination que les éleveurs réclament depuis de nombreuses années et voient comme LA solution.
Mais ce n’est pas si simple. C’est ce que nous explique le virologue. Vacciner un oiseau contre la grippe aviaire n’est pas la même chose que vacciner un humain contre la grippe.
"Quand quelqu’un attrape la grippe, le virus se réplique uniquement dans son appareil respiratoire et ce que l’on veut c’est protéger la personne contre les symptômes de la maladie. Or pour l’influenza hautement pathogène, il y a deux problèmes. Le premier, c’est que le virus ne se multiplie pas seulement dans l’appareil respiratoire, il va se multiplier dans l’intégralité de l’organisme de l’oiseau. L’autre point, c’est qu’on ne veut pas qu’ils excrètent du virus. L’intérêt de la vaccination c’est d’empêcher que les oiseaux excrètent du virus."
Vivre avec la grippe aviaire
Selon le vétérinaire de formation, le risque de vacciner, "est de ne plus forcément avoir de symptômes mais continuer d’avoir des oiseaux qui excrètent plein de virus et contaminent d’autres oiseaux qui eux ne seront pas vaccinés".
La vaccination, peut venir en complément des différentes mesures de biosécurité recommandées. Mais Pierre Bessière est clair : le virus ne partira pas. "Il va falloir apprendre à vivre avec". Cette phrase que l'on a tant entendue pour le Covid, les agriculteurs vont à nouveau l'entendre mais cette fois-ci pour leurs élevages.
En cette fin janvier 2023, dix foyers d'influenza ont été identifiés dans le Gers. La Vendée compte à elle seule 119 foyers, sur les 277 détectés en France.