BeeGuard, une start-up toulousaine, s'est lancée depuis 2016 dans les ruches connectées pour aider les apiculteurs dans leur suivi. Elle a lancé la semaine du 11 octobre 2021 un nouveau service, Apialert, pour développer la biosurveillance et mieux connaître l'environnement des abeilles.
Le constat donne le bourdon. L'année 2021 "est la pire" pour "l'apiculture française depuis qu'il existe des statistiques sur les récoltes", déplore Olivier Fernandez, le président du syndicat des apiculteurs en Occitanie, au micro de France Bleu mercredi 20 octobre. Dans toute la France, les apiculteurs ont récolté deux fois moins de miel que l'an dernier.
En cause : des conditions climatiques catastrophiques au printemps et en été. Les longues périodes de gel, de froid et de pluie se sont succédées, privant les abeilles de la floraison – et donc, de nourriture. Olivier Fernandez pointe aussi du doigt "l'utilisation permanente de pesticides et de fongicides qui affaiblissent les ruches".
Une année "désastreuse": la récolte de miel 2021 se situera entre 7.000 et 9.000 tonnes seulement, soit moins de la moitié de celle de 2020, du fait des conditions climatiques très défavorables du printemps et de l'été, a déploré l'Union nationale de l'apiculture française #AFP pic.twitter.com/bPOuaeUubV
— Agence France-Presse (@afpfr) October 19, 2021
Chaque année, "on laisse mourir 35 % des colonies d'abeilles mellifères. Au lieu de développer leurs cheptels, les apiculteurs sont contraints de forcer la reproduction pour compenser ce taux de mortalité", alerte Christian Lubat.
La technologie au service des abeilles
Et si la biosurveillance, cette méthode utilisant le vivant pour surveiller l'évolution de l'environnement, pouvait sauver les abeilles ? C'est ce que croit ce Toulousain, fondateur de BeeGuard. Cette start-up, créée en 2016 et basée à Labège (Haute-Garonne), s'est spécialisée dans les ruches connectées.
Objectif : "créer un outil d'aide à la décision pour les apiculteurs à 360°", grâce à des capteurs mesurant différents indicateurs (température, hygrométrie pour la ponte de la reine, poids pour le butinage et l'état des stocks, météo) mais aussi un système de tracking GPS pour la sécurisation des ruches. À ce jour, 4 000 ruches en France et en Europe en sont équipés.
Mais la start-up veut désormais se faire une place sur le marché de la biosurveillance. Elle a lancé son nouveau service, Apialert, lors du salon Pollutec qui s'est tenu à Lyon du 12 au 15 octobre.
Zoom sur notre compteur d'abeilles #Apialert lancé en exclu sur #Pollutec21 !@MyBeeGuard étend son offre de biosurveillance avec #Apialert basé sur un compteur d’abeilles par analyse vidéo en partenariat avec @Apilab
— BeeGuard (@MyBeeGuard) October 13, 2021
Venez le découvrir sur notre stand E 121 dans le Hall 4 ! ? pic.twitter.com/3ro1X3UzhG
Compteur vidéo embarqué dans la ruche
"En analysant la quantité exceptionnelle des données recueillies par les apiculteurs utilisant nos ruches connectées, on a été frappé par une évidence", explique Christian Lubat. "Les données reflètent en fait la qualité de l'environnement dans lequel vivent les pollinisateurs. Comme une photographie à un moment donné".
Les abeilles sont des sentinelles de l'environnement, un porte-voix des déséquilibres que l'humain a crée. Elles peuventt être le drone naturel, qui collecte des informations sur la qualité de l'environnement. Ce serait intéressant d'écouter ce que les abeilles ont à nous dire.
Apialert, c'est un compteur d'abeilles par analyse vidéo, embarqué dans la ruche. En filmant en continu la planche d'envol, une intelligence artificielle détecte et compte le flux d'abeilles. La différence entre le nombre d'entrées et de sorties donne le taux de mortalité quotidien des insectes.
"La mort peut être naturelle, c'est le cycle de la vie", souligne le président de BeeGuard. D'autant plus que la longévité d'une abeille ne dépasse pas quelques semaines pendant l'été. Il ajoute : "Mais cela peut aussi être un effet de la pollution, des pesticides, ou un problème sanitaire plus large".
Ainsi, si un agriculteur observe un taux de mortalité aigu, il pourra prendre les mesures nécessaires pour protéger sa ruche. Par exemble, si cela intervient après un épandage dans un champ voisin ou dans le sien, il pourra déménager son cheptel ou réfléchir à des alternatives aux produits phytosanitaires qu'il utilise.
Peser dans les débats
Apialert ne se veut pas un outil à la seule destination des apiculteurs. Christian Lubat cite volontiers les autres types d'agriculteurs, et même les entreprises et les pouvoirs publics qui pourraient être concernés par ce nouveau service.
Car la "mission" d'Apialert (et de BeeGuard en général), c'est "d'apporter des éléments concrets, de fournir des outils aux différents acteurs" pour peser dans les débats et les discussions pour la protection des abeilles.
Et, pourquoi pas, amener les pouvoirs publics à prendre des décisions en faveur de l'apiculture et de la sauvegarde de l'abeille. Christian Lubat rappelle que plus de 70% des cultures (fruits, légumes, oléagineux, épices entre autres) ont besoin d'un pollinisateur animal.
De son côté, Olivier Fernandez conclut : "Aujourd'hui, des apiculteurs travaillent pour la survie des abeilles. S'il n'y avait pas les apiculteurs, s'ils se mettaient en grève, on aurait des pénuries alimentaires importantes."