Enjeux climatiques, femmes scientifiques minoritaires : une étude internationale avec une université de Toulouse retrace 20 ans de traitement médiatique des sciences

Une étude de l’Observatoire des pratiques socio-numériques (OPSN), regroupant des chercheurs de l'université Toulouse Paul Sabatier (Haute-Garonne) et étrangers, analyse les évolutions des sujets scientifiques dans la presse ses vingt dernières années.

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150 000, c'est le nombre d'articles minutieusement analysés en moins d'une semaine par un collectif de chercheurs de Toulouse, suisses et belges pour réaliser une étude retraçant vingt ans de traitement médiatique de la science. Regroupés sous le nom de l’Observatoire des pratiques socio-numériques (OPSN), les scientifiques ont scruté à la loupe les publications de 2001 à 2022 de trois médias francophones : Le Monde (France), Le Soir (Belgique) et Le Temps (Suisse). En voici les principaux enseignements.

Des sujets scientifiques en pleine croissance

"Il y a un effet crescendo depuis vingt ans pour les sujets scientifiques", explique Brigitte Sebbah, membre de l'observatoire et maîtresse de conférences en Sciences de l'information et de la communication à Toulouse III. La science occupe 10% des sujets traités dans ces médias de 2001 à 2022, un chiffre "important" pour la chercheuse. Parmi les évolutions observées, des sujets qui "sortent des pages sciences" pour se mêler à d'autres rubriques. Ainsi, l'étude souligne une augmentation du nombre d'articles utilisant cette thématique dans des "cadrages politiques et géopolitiques" mais aussi économiques et financiers. Les chercheurs soulignent l'effet Covid qui a fortement contribué à la présence de sujets scientifiques dans les médias, en dépit de la couverture médiatique des autres maladies. 

La question du climat triple sa présence

"La thématique climatique a explosé" constate Brigitte Sebbah. Une évolution intimement liée à la multiplication des conférences et réunions politiques sur ce sujet. Depuis 2001, les couvertures médiatiques des rapports de Giec, des comptes-rendus de la COP ou encore des conventions internationales se succèdent. Elles ont contribué au triplement "du mot climat et ses dérivés" en l'espace de vingt ans dans les trois médias étudiés. Les chercheurs soulignent aussi "un point de bascule" dans la manière dont sont traitées les actualités climatiques.

Avant 2019, les sujets abordaient des conséquences lointaines pour le lecteur, comme la fonte des glaces responsable de la disparition de l'ours polaire. Après 2019, les médias ciblent davantage les causes de ce dérèglement climatique. Par exemple l'utilisation des énergies fossiles, la production de gaz à effet de serre, tout en soulignant "des leviers d’action politiques et concrets", précise l'étude.

Mais si le climat semble avoir de plus en plus de place dans la sphère médiatique, ce n'est pas le cas du nucléaire. Les chercheurs ont pu constater qu'après la catastrophe de Fukushima, le traitement médiatique scientifique est resté constant ou à même baissé par rapport à la période pré-accident. Le nucléaire reste "associé au contexte politique mais pas explicitement écologique" dans deux des trois médias étudiés.

Des femmes scientifiques absentes

Les expertes scientifiques peinent encore à faire entendre leurs voix, écrasées par leurs confrères masculins. L'étude souligne que 75% des noms propres cités dans les articles examinés sont masculins. À l'image du journal Le Monde, dans le cadre du corpus étudié par les chercheurs, trois noms sur quatre sont ceux d'un homme.

Les femmes, elles, ne représentent que 21 % des individus cités. Le média belge Le Soir obtient le meilleur score pour la place attribuée aux femmes dans les articles scientifiques, soit 24 %. Dernier du podium, Le Temps atteint 20 % de femmes citées dans ses papiers.

L'étude complète de l'Observatoire des pratiques socio-numériques est consultable sur ce site

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