L'avionneur européen Airbus a révélé à la presse, lundi 25 juillet, les essais de son transporteur militaire l'A400M transformé en bombardier d'eau. Une solution pourtant loin de répondre aux besoins de la stratégie afin de lutter contre les incendies en France.
De prime abord l'idée est séduisante. Equiper l'avion de transport militaire A400M de citernes amovibles et transformer l'appareil d'Airbus en bombardier d'eau. Le constructeur aérien a opportunément effectué une campagne d'essais, la semaine 19 juillet à Getafe en Espagne, et a opportunément communiqué sur le sujet, alors que la France est durement touchée par de terribles incendies en Gironde, en Occitanie et en Bretagne.
Dans un communiqué de presse, l'avionneur affirme que l'A400M a largué, de jour, 20 tonnes d'eau en moins de dix secondes en volant à moins de 50 mètres d'altitude à l'aide de deux citernes installées dans la soute de l'appareil.
Une capacité de 20.000 litres d'eau
Ce kit "ne nécessite aucune modification de l'appareil et est donc interchangeable avec tous les appareils de la flotte A400M", selon Airbus qui a lancé le projet il y a neuf mois. Sa capacité (20.000 litres d'eau contre 6.000 pour un Canadair) et sa qualification pour voler de nuit sont mis en avant.
Le projet est présenté comme un appoint aux moyens aériens existants face aux incendies qui se multiplient l'été en Europe. "L'objectif n'est pas de se mettre en concurrence avec le Canadair mais en complément" assure Jean-Brice Dumont, vice-président chargé des avions militaires chez Airbus, sur franceinfo, qui a dévoilé l'information avec Le Parisien.
"C'est bien que des entreprises s'intéressent à ces questions" réagit Christophe Govillot, pilote de Canadair, basé à Nîmes. Mais pour le représentant du Syndicat national du personnel navigant de l'aviation civile, il n'est pas certain que cette option soit la bonne réponse aux besoins de la lutte contre les incendies.
L'obligation de se poser, un largage d'eau peu efficace
"Nous avons une chance énorme d'avoir beaucoup de points d'eau en France, explique le pilote. Cela permet à nos Canadairs de se ravitailler rapidement en eau et d'effectuer des rotations très très courtes."
L'appareil permet ainsi des "frappes chirurgicales" sur les points les plus "chauds" même sur les terrains les plus escarpés.
Ce qui n'est pas la cas de l'A400M. L'avion d'Airbus doit revenir se poser pour remplir ses citernes. Autre problème : comme on peut le constater sur cette vidéo fournie par le constructeur européen, il n'y a pas d'effet de masse lors du largage d'eau mais une longue trainée.
"S'il n'y a pas d'effet de masse, comme avec le Canadair, cela donne un effet "douche" et cela ne sert à rien" estime Christophe Govillot.
Des expériences déjà tentées et abandonnées
Le constat n'est pas nouveau. Le Transall, que l'A400M a remplacé au sein de l'armée comme transporteur, avait déjà expérimenté ce dispositif. Ses faiblesses conjuguées à un risque important de décrochage de l'appareil avait poussé à abandonner le projet.
"L'option des gros porteurs a déjà été étudiée, comme au début des années 2010 avec le Beriev 200 (construit par une ancienne filiale d'Airbus, ex EADS). Ce choix n'a pas été retenu. Est-ce qu'un appareil comme l'A400M est véritablement utile ?" s'interroge le pilote de bombardier d'eau.
Pour continuer à faire face à la multiplication des incendies, le Syndicat national du personnel navigant de l’aviation civile réclame avant tout plus d'infrastructures au sol comme des pélicandromes, plus de personnels et surtout l'acquisition de nouveaux Canadairs et Dash.