Assigné à résidence pour ses liens avec l'islamisme radical, Farouk Ben Abbes bénéficie d'un versement mensuel du Revenu de solidarité active (RSA) de la part du Conseil départemental de Haute-Garonne. Une mesure choquante selon le député Gérard Bapt (PS) qui a saisi le gouvernement vendredi.
La mesure peut choquer mais elle est légale. Farouk Ben Abbes, belgo-tunisien de 30 ans dont le nom revient dans plusieurs affaires de terrorisme et assigné à résidence pour ses liens avec l’islamisme radical, bénéficie du RSA.
Installé à Toulouse depuis septembre 2015, Farouk Ben Abbes est connu pour être un proche du Toulousain Fabien Clain qui a revendiqué les attentats du 13 novembre 2015 à Paris et à Saint-Denis. Soupçonné dans l'attentat du Caire où une jeune Française de 17 ans avait trouvé la mort le 22 février 2009, ce belgo-tunisien avait été extradé de l'Egypte vers la France. Mis en examen et placé en détention provisoire pour complicité d’acte terroriste, il a finalement bénéficié d’un non-lieu, par manque de preuves et parce que les renseignements égyptiens n'ont pas coopéré à l'époque avec la justice française. Il est également soupçonné d'avoir planifié un attentat contre le Bataclan en 2009. Surveillé de près par les services du renseignement français, il a été l'un des premiers à être assigné à résidence au lendemain des attentats de Paris.
Un "problème moral"
Déjà bénéficiaire du RSA par le passé, Farouk Ben Abbes avait vu son versement suspendu durant trois mois, le temps de purger une peine de prison ferme pour ne pas avoir respecté les conditions de son assignation à résidence en se rendant dans la banlieue proche de Toulouse. Il a déposé une nouvelle demande en juillet.Pour Gérard Bapt, ce versement pose "un vrai problème moral". Ce député socialiste de Haute-Garonne a donc saisi vendredi le Garde des Sceaux et le Ministre de l'Intérieur. "C'est ubuesque", dit-il ce samedi, "cet homme est cité dans plusieurs affaires de terrorisme, il faut penser à la souffrance des familles des victimes. Apprendre qu'il n'est pas en prison, pas expulsable mais qu'en plus, il se voit ouvrir des droits sociaux de cette république française qu'il veut détruire, ce n'est pas concevable".
"Une erreur" pour le garde des Sceaux
Interrogé sur Europe 1, ce dimanche, le garde des Sceaux, Jean-Jacques Urvoas, a reconnu "une erreur" du ministère de la Justice dans ce dossier. Farouk Ben Abbes "est mis en examen pour association de malfaiteurs à but terroriste" a-t-il indiqué "cette procédure va aller jusqu'au bout. De deux choses l'une : il est condamné, il sera mis en prison et ne touchera pas le RSA ; il n'est pas condamné, il sera expulsé et ne touchera plus le RSA".Un homme indemnisé par l'Etat pour "préjudice moral"
Farouk Ben Abbes déjà été au coeur de deux cafouillages judiciaires : le 22 juillet 2016, son expulsion vers la Tunisie a été empêchée à la dernière minute, alors qu'il était déjà dans l'avion, les autorités constatant qu'il était soumis à un contrôle judiciaire lui interdisant de quitter le sol français. Mi-août 2016, le ministère de la Justice avait reconnu lui avoir versé à tort près de 16 000 euros, alors qu'une juridiction ne lui en avait attribué que 6 000, pour "préjudice moral"; en réparation de sa période de détention provisoire de 2010 à 2011.Il conteste depuis plusieurs semaines son assignation à résidence, sans succès