Témoignage. "J'étais très triste, très angoissée, j'avais très peur d'aller à l'école" : raconte Marine, victime de phobie scolaire

Publié le Mis à jour le Écrit par Christine Ravier

Marine, 19 ans, a souffert de phobie scolaire. Interviewée par les élèves de l'Actu des Ados, elle raconte comment l'école, qu'elle adorait, est devenue source de souffrance, le combat pour s'y rendre chaque jour, l'incompréhension de son entourage et ce qui, selon elle, a déclenché une peur panique d'être jugée et rejetée.

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Depuis plusieurs années France 3, invite des élèves de collège et de lycée à réaliser les reportages qu'ils ont envie de voir à la télé. Ils interviewent et tournent avec une de nos équipes. Eunice, Sara et Lamia, des élèves du collège Rosa Parks de Toulouse avec leur club "Génération Reporter", ont choisi de s'intéresser à la phobie scolaire. Elles ont rencontré Marine, 19 ans, qui a accepté de raconter ce à quoi elle a été confrontée et comment elle s'en est sortie.

"La phobie scolaire ça a été surtout quand j'étais au collège lycée, mais le plus gros, ça a été ma première année de lycée, donc ma seconde, confie Marine. Pour commencer le matin, j'étais déjà très triste. À l’intérieur de moi, je me sentais déjà très angoissée, j'avais très peur d'aller à l'école. C'était pour moi vraiment un combat à mener tous les jours, de devoir sortir de mon lit, de me forcer à aller à l'école".

En pleurs en plein cours

La jeune fille essaie d'en parler à ses parents mais ils ne perçoivent pas sur le moment ce qu'elle affronte. "Quand je disais à mes parents "je ne me sens pas bien, j'ai peur", ils ne me comprenaient pas du tout, ils essayaient de me rassurer, mais ils n'avaient pas forcément les bons mots. Ils me disaient "arrête de faire semblant, c'est bon, c'est juste l'école, on est tous passés par là". Et ce n'était pas forcément ce que je voulais entendre. Au début, c'était compliqué pour eux de comprendre".

Marine se force à aller en cours. Mais dans la journée, en classe, elle se met à pleurer. Elle doit partir. Elle a alors le sentiment que personne ne la comprend. "J'étais vraiment super triste. Donc c'était vraiment compliqué à gérer. Mais voilà, je me forçais. Il y a des jours, je n'y arrivais pas. Et quand je n'y arrivais pas, je trouvais des excuses, je faisais semblant d'être malade. Non pas parce que je n'avais pas envie d'aller à l'école, mais parce que j'avais peur d'aller à l'école".

Il faut bien comprendre que quand on a une phobie scolaire, ce n'est pas forcément parce qu'on n'aime pas l'école, c'est vraiment parce que l'école nous fait peur".

Marine, 19 ans

Dans son cas, Marine explique que ce sont les élèves autour d'elle qui lui font peur, les professeurs aussi pour certains. Elle craint d'être rejetée et se retrouve saisie par l'angoisse du matin au soir. Même la perspective de devoir retourner en cours quand elle est chez elle le soir la perturbe au plus haut point.

"Je me suis renfermée, j'ai commencé à beaucoup réfléchir, me remettre en question. Et après je suis passée par des phases un petit peu dépressives, où j'avais des idées noires". Heureusement les parents de Marine l'emmènent voir une psychologue qui l'aide à mettre des mots sur ce qui lui arrive et comprend la gravité de la situation. Sur ses conseils et ceux de la psychiatre qui la suit également, elle se confie à l'équipe éducative, les CPE, l'infirmière et certains professeurs. Un travail de fond est entrepris pour l'intégrer au sein de la classe.

Le soutien d'une équipe

Alors qu'un prof lui assène un cruel et irresponsable "je ne veux pas de dépressifs dans ma classe", d'autres heureusement s'investissent pour la soutenir. En terminale, ses cours sont aménagés, ce qui lui permet de relâcher la pression à la maison. Elle passe le Bac en deux ans et l'obtient. Aujourd'hui Marine est en BTS diététique. Elle va bien même si elle ressent encore parfois quelques bouffées d'angoisse en cours.

Quand on lui demande si elle sait ce qui a généré cette peur, elle pointe le harcèlement qui a débuté à l'école primaire. "J'étais une très bonne élève, qui était souvent rejetée par les autres, parce que justement, j'étais bonne élève, ça ne leur plaisait pas. Je passais pour la chouchoute des profs, le terme qu'on n'aime pas forcément entendre, parce qu'elle est aimée, et pas nous. Et je pense que ça a déclenché cette souffrance".

Au collège, le harcèlement continue, mais cette fois-ci sur son physique. Elle est traitée de "baleine" car les élèves la trouvent "trop grosse". Puis s'enchaînent les bousculades ou les vexations, un harcèlement physique et moral.

"Je suis là pour toi, je te comprends"

"Je pense que c'est ça qui a créé une peur du rejet, parce que j'ai été rejetée, c'est triste à dire, de ma fin de primaire et tout mon collège en fait. Et ça m'a vraiment créé une peur, la peur d'être seule, la peur du rejet, la peur d'être jugée, surtout, parce qu'en cours, je ne participe pas, même à l'heure actuelle, j'ai encore du mal à participer à certaines choses, parce que j'ai peur qu'on me juge, et que du coup, on ne veuille plus me parler".

Aujourd'hui Marine va bien, elle a retrouvé le sourire. Elle a quitté son environnement scolaire pour un autre, dans le supérieur où elle ne connaissait personne… Un nouveau départ. Elle vise un Bachelor (Bac+3). Quand les élèves l'interrogent sur les mots qui l'auraient vraiment aidée, elle répond : "j'aurais aimé qu'on me comprenne dans le sens où on me dise avec des mots : je suis là pour toi, je te comprends. Et on va tout faire pour que tu puisses t'en sortir… Ou peut-être même, je ne comprends pas, mais je t'entends. Qu'on essaie vraiment de me comprendre. Parce qu'au début, je n'étais pas du tout comprise, je me sentais très seule".

Le danger : s'isoler

En guise de conseil, Marine recommande aux élèves de parler dès qu'il y a le moindre souci, de ne surtout pas rester seul. "Quel que soit l'évènement déclencheur, à l'école ou ailleurs, il faut en parler, il ne faut pas s'isoler. Aux parents, aux copains, aux copines, à n'importe qui, aux professeurs, avec des personnes avec qui on se sent à l'aise. Vraiment libérer la parole et savoir se faire aider. Parce que je pense que c'est l'étape la plus compliquée d'accepter l'aide des autres et d'accepter la situation. Ce n'est pas facile, je le reconnais parce que je l'ai vécu".

"Et surtout, ne vous renfermez pas. Et même si c'est dur, battez-vous parce que ça en vaut la peine. Pour avoir réussi à sortir de tout ça, je peux dire que ça en vaut la peine. Et même quand on a l'impression de ne rien surmonter, tout est faisable. Peut-être que je n'ai pas les mêmes problèmes que qui que ce soit, on a tous des problèmes différents… mais si j'y suis arrivée, c'est parce que je l'ai aussi voulu. C'est important de se battre".

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