"L'alcool, cause presque 50 000 morts par an" : cri d'alarme des addictologues pour soutenir le Dry January et relancer la prévention

48 addictologues demandent au ministère de la santé de soutenir officiellement le "Dry January challenge" ou "défi du mois sans alcool" qui débute le 1er janvier pour sa 5e édition au titre de la prévention.

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Avec 47 autres de ses confrères de toute la France, le professeur Nicolas Franchitto, chef du service d'addictologie du CHU de Toulouse a adressé un courrier au ministère de la Santé mi-décembre réclamant un soutien de l'État au Dry January ou défi de janvier, le mois sans alcool au même titre que le mois sans tabac. À trois semaines de cette 5e édition, portée par les associations, les médecins demandent aux autorités la preuve de leur engagement. Nicolas Franchitto nous explique pourquoi il faut une vraie politique de prévention.

France 3 Occitanie : Qu'est-ce qui a motivé cette lettre envoyée à Aurélien Rousseau, alors ministre de la Santé, signée par 48 addictologues dont vous faites partie ?

Pr Nicolas Franchitto : Nous, les addictologues, on aime faire la promotion de ce qui s'appelle le dry january ou janvier sec pour que les Français, qui prennent généralement des bonnes résolutions, à la suite des fêtes, se confrontent, se regardent un peu eux-mêmes et prennent un peu soin d'eux, en se disant : " tiens, si j'évaluais ma consommation d'alcool sur le mois de janvier. Et est-ce que je serai capable de diminuer ma consommation d'alcool ? " Ce n'est pas pour les gens malades de l'alcool, c'est pour les Français, comme vous et moi. Est-ce que ces habitudes entravent votre vie quotidienne ? Est-ce que vous avez l'impression de consommer beaucoup d'alcool ? Et est-ce que si on vous lance ce défi, vous arriverez facilement à vous passer de ces habitudes, de ce rituel, de ce mode de consommation ? À ce jour et à ma connaissance, nous n'avons encore eu aucune réponse de l'État. 

France 3 Occitanie : Recevez vous des patients qui viennent vous voir après avoir suivi ce défi du mois de janvier ? 

Pr Nicolas Franchitto : Oui, on en voit. C'est très intéressant parce que les gens qui le font, après, ils viennent nous voir en nous disant :  "j'ai fait le défi de janvier, je me suis rendu compte que quand je rentre du travail, j'ai pris l'habitude de consommer le soir, un whisky, un rhum, un pastis, etc". Il y a ceux qu'on voit qui l'ont fait, il y a ceux qui l'ont fait et qui ont été mal, c'est-à-dire avec des tremblements, des sueurs et tout ça. Et là, eux, ça les a inquiétés. Donc, ils sont allés d'abord voir leur médecin généraliste parce qu'ils n'ont pas toujours fait le lien avec la consommation d'alcool. Et donc, ça, ça veut dire que c'étaient des patients qui avaient un problème d'usage de l'alcool, mais qui ne le connaissaient. Parce qu'en fait, il faut boire de l'alcool pendant de nombreuses années pour avoir des maladies. Et après, il y a ceux, effectivement, qui se disent, on l'a fait entre copains ou on s'est lancé le défi avec mon compagnon, ma compagne, etc. Et effectivement, on s'est rendu compte qu'on consomme de façon quotidienne. Les recommandations, ce n'est pas plus de deux verres par jour. Et pas tous les jours. Avec au moins deux jours d'abstinence dans la semaine, pour que le cerveau ne soit pas en contact avec de l'alcool tous les jours.On pense s'aider de l'application my défi pour évaluer sa consommation, de se coacher. 


France 3 Occitanie : Dans votre courrier commun, vous demandez à l'État que le dry january doit être soutenu au même titre que le mois sans tabac ? 

Pr Nicolas Franchitto : Le tabac, c'est 80 000 morts par an. L'alcool, en cause quasiment 50 000 par an. Ils s'agit de deux substances vendues légalement. En plus des maladies, il y a tout ce qui est actes délictuelles liés à l'alcool :les  violences conjugales, familiales, les accidents de la route, etc. On fait la promotion du mois sans tabac parce qu'on pense au cancer du poumon et à l'insuffisance respiratoire, mais on ne fait pas de prévention sur l'alcool. En-tout-cas, on ne soutient pas le dry january. Ça nous apparaît, à nous, totalement incohérent. La seule différence, c'est que la cigarette n'est pas fabriquée en France.  Et que l'alcool, reste très ancré dans la culture française. Il y a un énorme lobby des alcooliers. Même si la consommation de vin est en très forte diminution. Mais il y a beaucoup de fausses idées véhiculées sur l'alcool par la société :  " le vin, c'est bon pour les artères", etc. Aujourd'hui, on sait que c'est faux. L'alcool, c'est une bête, c'est un toxique !  Le corps ne fabrique pas d'alcool. Il n'y a pas d'alcool qui nettoie les artères. Il n'y a pas d'alcool qui est bon pour la santé. Quand on voit le président de la République boire sa bière cul-sec lors de la finale du TOP 14 entre Toulouse et La Rochelle, on se dit c'est festif. Mais cela a d'énormes répercussions derrière.

France 3 Occitanie : Vous dénoncez également l'annulation de plusieurs campagnes de prévention notamment au moment de la Coupe du Monde de rugby ? Que faut-il faire pour mener à nouveau une prévention efficace ? 

Pr Nicolas Franchitto : Pour le rugby, c'est compliqué. Il y a des addictologues irlandais qui dénoncent les protections des poteaux à l'effigie d'une marque de bière. Même au centre du terrain, il y a une pub pour de la bière. Il faut revoir toute la prévention, qui doit commencer très tôt. Les médias et la télévision doivent véhiculer des messages qui seraient mieux compréhensibles et moins déguisés. Il faut préserver la santé des jeunes, arrêter les publicités déguisées, arrêter les boissons avec des goûts mojito. Il y a même des bonbons goût mojito. Plus vous exposez un jeune à la consommation d'alcool de façon précoce, quand son cerveau est immature, plus il va être sensible à la prochaine exposition, quand il sera plus grand. L'alcool, je le répète, c'est environ 50 000 morts par an, évitables ! 

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