Suite au vote de la loi climat ce samedi 10 avril à l'assemblée nationale, les réactions sont vives en Occitanie... et clivées. Pour épargner la planète, des liaisons aériennes entre Paris et des villes comme Lyon ou Bordeaux vont être supprimées.
Suite au vote de la loi climat ce samedi 10 avril à l'assemblée nationale, les réactions sont les plus vives viennent du Sud-Ouest et de l'Occitanie en particulier. Des liaisons aériennes entre Paris et certaines villes comme Lyon ou Bordeaux vont être supprimées car il existe une alternative en train qu'on estime viable en terme de temps.
La Convention citoyenne pour le climat avait proposé la suppression de vols intérieurs si des alternatives ferroviaires reliaient les villes entre elles en moins de 4h. Ce seuil devait permettre de supprimer les lignes "les plus émettrices" de gaz à effet de serre comme Paris-Nice, Paris-Toulouse et Paris-Marseille.
Demi-mesure ?
Mais le gouvernement dit avoir réduit ses ambitions pour l'"équité des territoires". Certains comme le Puy de Dôme se retrouveraient trop enclavés. Son projet de loi s'en tient à une suppression des vols pour les villes qui se trouvent à moins de 2h30 en train. Une demi mesure aux yeux des écologistes et des Insoumis qui estiment la Convention citoyenne bafouée.
Dans le Sud-Ouest, et surtout à Toulouse, ville phare de l'aéronautique, la question est débattue. La filière aéronautique génère 100.000 emplois directs. Elle constitue grâce à Airbus un fleuron à l'export (avec 57,2 milliard d'euros en 2018 ) mais la crise du coronavirus affaiblit le secteur.
6.000 emplois supprimés
Au cours du débat, la députée PRG du Tarn-et-Garonne, Sylvia Pinel, a déclaré : "la menace des plans sociaux en cascade demeure au coeur des préoccupations (...). Près de 6.000 emplois ont été supprimés entre mars et décembre 2020, l'Occitanie est la région la plus touchée par la crise aéronautique".
Tout en disant partager l'objectif de neutralité carbone pour le transport aérien, la député a ajouté : "un virage trop rapide conduira à une destruction accrue d'emplois et de perte de compétences pourtant indispensables à la relance du secteur et à sa transition écologique. Il faut avant toute chose protéger les entreprises, les emplois, les savoir-faire, que la filière conserve des marges de manoeuvre".
?[Loi Climat / filière aéronautique]
— Sylvia PINEL (@SylviaPinel) April 11, 2021
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Un point de vue que partage Joël Aviragnet, député PS de Haute-Garonne, qui a mentionné un "coût humain disproportionné" du fait du dispositif, rapportent nos confrères de l'AFP. Mais ce point de vue n'est pas partagé par tous. Les tenants de la Convention citoyenne, eux, estiment que la loi va dans le bon sens.
"Des élus dans le déni"
C'est le cas de Frédéric Boone, membre de l'Atecopol (atelier d’écologie politique), créé à Toulouse en 2018 par une communauté pluridisciplinaire de scientifiques travaillant sur les bouleversements écologiques.
"Au lieu d'injecter des milliards dans l'aéronautique sans réflexion globale pour préserver les salariés et l'emploi, on devrait se poser des questions. (...) Des salariés ont répondu à notre lettre de l'an dernier et ils se sont constitués en collectif, le collectif Icare, nous disant : le climat nous inquiète et on ne veut pas travailler pour détruire la planète".
Si on en est là aujourd'hui, c'est qu'il y a une forme d'irresponsabilité des dirigeants, un déni alors que ça fait des années qu'on alerte. Il faut sortir de ce déni".
"Il est temps de financer des trains de nuit et de développer ou rouvrir des lignes, poursuit Frédéric Boone. Il faut une réflexion et des actions avec tous les acteurs. Bien sûr, il faut aider les gens qui sont sur la sellette mais péréniser ce qui existe, ce n'est pas une solution. Cette mono-industrie en Occitanie, c'est très risqué. Si on en est là aujourd'hui, c'est qu'il y a une forme d'irresponsabilité des dirigeants, un déni alors que ça fait des années qu'on alerte. Il faut sortir de ce déni".
Le climatologue Christophe Cassou avait déjà dénoncé dans une interview qu'il nous a accordée en mars, cette forme de déni des dirigeants politiques en affirmant : "le climat impose ses contraintes, c'est de la physique. C'est incontournable (...). Il ne s'agit pas de mettre un peu de climat dans les lois. Il faut partir des 2°C et aligner les lois".
Pour le scientifique qui a participé à l'élaboration du dernier rapport du GIEC avec 720 auteurs de 90 pays, on dépassera les +1,5° d'ici la fin du siècle, c'est désormais certain. La stabilisation à +2° C doit être l'objectif.
Elle représente des changements très importants de nos conditions de vie, sans parler de celles des habitants des pays du Sud. Mais elle est encore possible. La seule option : agir maintenant.