Témoignage. Maman d'une adolescente positive au COVID-19, de la détection à l’isolement, un cafouillage généralisé

Publié le Mis à jour le Écrit par Pierre-Jean Vergnes/MGR

Difficulté à se faire tester, flottement sur les consignes d’isolement et de prise en charge, nous avons recueilli le témoignage d’une mère de famille confrontée à la gestion du COVID-19. Elle habite Toulouse et souhaite garder l’anonymat, nous l’appellerons Marie.

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L’histoire est somme toute banale en ces temps d’épidémie de COVID-19, une adolescente de 17 ans scolarisée en terminale à Toulouse se plaint de maux de ventre et de gorge.

"Ma fille a le nez qui coule, la gorge qui gratouille, des maux de tête, des symptômes habituels de la rhino-pharyngite, de l’angine ou encore de la gastro… Mais le doute s’installe. Alors dans le contexte hautement anxiogène de l’épidémie et pour jouer le jeu de la prévention, la décision est prise de faire passer à ma fille un test PCR. Le début d’une aventure incohérente où les limites du système deviennent concrètes".

Se faire tester : un vrai parcours du combattant

Marie est en télétravail donc elle garde son adolescente légèrement fatiguée à la maison. Elle raconte la suite :

"Je passe un coup de téléphone au labo près de la maison qui propose un premier rendez-vous 4 jours plus tard. A force d’insistance, en précisant, que ma fille a potentiellement des symptômes du COVID, le délai se réduit à deux jours. 
Elle se remet dès le deuxième jour et veut repartir au lycée. Cependant, elle reste cloîtrée à la maison, en pleine possession de ses moyens et ne comprend pas pourquoi elle est privée de cours

Forte de cette pression, je décide, pour diminuer les délais de dépistage, de me rendre au drive d’à côté. A 10h du matin, la file des patients s’étale sur plusieurs centaines de mètres. Un vigile en place pour surveiller que l’ambiance reste bon enfant, indique au bout de quelques minutes à tous ceux qui patientent qu’il est inutile d’attendre. Que le nombre de tests possible pour ce drive est déjà dépassé. Et que l’on peut revenir le lendemain matin, mais plutôt à 7h, car il y a déjà du monde qui fera la queue.
On repart penaudes. Et toujours vierges de test. Arrivées à la maison, une autre tentative auprès d’un autre labo reste infructueuse
.

Quel âge à votre fille ? 17 ans. Réponse : On ne teste pas les adolescents, il faut qu’ils aillent au drive."

Bref, de labo en drive, les démarches n’aboutissent à rien. Finalement on se dit que l’on a de la chance d’avoir un rendez-vous pour le surlendemain
."

L’utilité de se faire tester

Au moment de se faire tester, l’adolescente n’a plus aucun signe de la maladie. Elle arrive au laboratoire à l’heure. Elle précise qu’elle a eu des symptômes et demande que ses analyses soient prioritaires.

"On ne sait jamais, si elle était positive, elle aurait pu contaminer, les jours précédents ses petits camarades de classe et sa famille rapprochée. Réponse, il n’y a pas de priorité, les délais sont de 5 jours.
6 jours plus tard, le résultat arrive.. Et là, patatras, il est positif
….
Débute alors un engrenage ubuesque…. 
Le lycée est aussitôt alerté… Mais le résultat arrivant 6 jours après, il n’y a pas grand-chose à faire. Si ce n’est prolonger l’isolement d’un petit jour. 
L’infirmière ne donne aucune consigne. Les parents doivent donc se tenir parfaitement informés. Et calculer les désormais sept jours au lieu de quatorze d’isolement. 
En revanche, l’information circule vite. Le proviseur envoie un mail aux parents indiquant qu’il y a un cas de covid dans la classe. Sans plus d’information.
Sur le groupe de classe Snapchat, les élèves se déchaînent, voulant savoir à tout prix quel ou quelle est le ou la "coupable". La pression monte, avec tentative d'intimidation pour faire craquer l’élève « pestiféré » qui a respecté les consignes du test PCR en cas de symptômes, ce qui n’est pas forcément le cas des autres élèves qui se sont bien gardés de signaler leurs maux et de faire un test qui les auraient privés de lycée pendant plusieurs jours
."

Un traçage bien rôdé, oui… mais

Pendant ce temps, laboratoire, ARS et CPAM contactent les parents. Réactivité impeccable, à ce stade, tout se passe bien.

"Nous avons le résultat du test de votre fille. Il est positif.
Il faut qu’elle reste à l’isolement pendant 7 jours… Ben comment dire, cela fait déjà 6 jours que le test a été fait. Ah oui, alors ça ne sert à rien…
Le reste de la famille doit se faire tester dans les meilleurs délais… Ah oui, et comment, le premier rendez-vous est dans 4 jours.
Normalement vous êtes prioritaires, indique le médecin de l’ARS. On va vous envoyer un sms qui vaut pour ordonnance.


Texto reçu :
ASSURANCE MALADIE : prenez rdv dès maintenant pour réaliser votre test COVID-19. Pensez à retirer vos masques en pharmacie et à vous isoler.

"Fort de ce sms, on pense pouvoir raccourcir les délais. Et bien que nenni. 4 jours minimum. Si le début du traçage (hormis les délais de test) avait l’air bien rodé, son efficacité s’arrête à la réalité des laboratoires qui ne peuvent assumer la quantité trop importante de demandes de test."

Effets collatéraux disproportionnés

Côté travail, Marie est renvoyée à son télétravail. Quant au papa, on lui propose un arrêt maladie d’office, sans qu’il y ait une seule tentative de savoir si le télétravail est possible. 

"Pendant ce temps pour le seul jour d’isolement restant, l’adolescente reçoit la consigne de s’organiser pour ses cours en distanciel… Comme si le lycée était en capacité pour une seule élève et un seul jour de prévoir au débotté de l’enseignement à distance. Le confinement nous a montré les limites de l’exercice. La situation devient presque comique."

Les parents à l’isolement et en télétravail se demandent quand ils auront le résultat du test pour pouvoir rassurer leurs collègues qui s’affolent alors que distanciation sociale et port du masque ont été scrupuleusement respectés. Ils se demandent quand ils pourront retourner à des conditions normales de travail.
 

4 jours de délais pour le test et 6 jours les résultats. Nous voilà donc à 10 jours. 10 jours d’incertitude pendant lesquels on vous regarde de travers au cas où vous auriez contaminé, on se demande bien comment, un collègue.

Un psychodrame dont on se serait bien passé

Presque 6 mois après le début de l’épidémie en France, Marie se sent plus rassurée par le discours des médecins qui affirment en savoir plus sur les traitements à donner aux cas graves. Mais elle ne comprend pas pourquoi ce traçage nécessaire pour endiguer la propagation du virus n’est toujours pas au point.
"Le constat est affligeant. Le désarroi dans lequel nous laisse cette si mauvaise anticipation s'ajoute au stress de l'incertitude générale provoquée par la crise sanitaire."
 
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