Après Paris et Troyes, en avril 2021, l'enseigne Monoprix a déployé des cabines de téléconsultation médicale à travers toute la France, dont Toulouse (Haute-Garonne). Une installation en toute discrétion probablement pour ne pas provoquer la colère de l'ordre des médecins, opposé à cette initiative.
C'est en surfant sur les réseaux sociaux que l'information nous est parvenue. Sur Twitter, un internaute, partage sa découverte : "Ce matin devant le Monoprix de Toulouse, je me suis arrêtée pour regarder l'affiche annonçant le nouveau service de téléconsultation. Et en effet cela existe apparemment depuis un moment ailleurs en France."
L'initiative en effet n'est pas nouvelle. En avril 2021, l'enseigne de grande distribution Monoprix a annoncé l'installation dans deux de ses magasins, porte de Châtillon à Paris et à Troyes dans l'Aube, de cabines de téléconsultation à destination de ses clients.
Au Monoprix de Toulouse, on se refuse a confirmer l'installation de la cabine
Sans rendez-vous, les patients sont mis en relation avec un médecin généraliste, après un délai d'attente de sept minutes en moyenne. Le professionnel de santé guide ensuite à distance le patient dans l'utilisation des instruments médicaux qui sont directement mis à disposition dans la cabine, dont un thermomètre ou un stéthoscope. Le service est disponible du lundi au vendredi de 9 à 20 heures et de 9 à 18 heures le samedi, comme l'indique l'entreprise Tessan, qui a conçu ces télécabines, sur son site internet.
"Au même titre qu'on vend des pommes bio et des vêtements, il est important pour nous d'adresser ces nouveaux besoins que sont ceux de prendre soin de soi. L'avantage ici, c'est que vous avez tout un équipement que vous n'allez pas nécessairement avoir chez vous" avait expliqué à l'époque Maguelone Paré, directrice du concept et de l'innovation chez Monoprix, au micro de RTL.
L'installation d'une telle télécabine en plein centre-ville de la 4e ville de France a de quoi surprendre. Nous décidons de contacter directement la direction du Monoprix, situé rue Alsace-Lorraine à Toulouse (Haute-Garonne) afin de savoir depuis quand ce service est disponible dans le Ville rose et s'il fonctionne. Fin de non-recevoir de la direction, qui se refuse même à confirmer l'installation de la télécabine. Il nous faut contacter le service communication parisien en plein week-end de trois jours ... Bref, nous n'aurons pas plus d'informations. L'enseigne n'avait pourtant pas hésité à largement communiquer au lancement de l'initiative.
Une installation illégale pour l'Ordre des médecins
Les réponses sont à aller chercher auprès de l'ordre des médecins chez qui cette offre ne passe pas : "Cette télécabine est installée depuis un an et c'est totalement illégale, nous explique Stéphane Oustric, président de l'ordre des médecins de Haute-Garonne. Ce n'est qu'une pratique financière et commerciale. Elle ne répond pas aux besoins en matière de santé ou pour mieux soigner. Il n'y a aucun médecin ou infirmier aux côtés du patient pour l'aider lors de la consultation. Ce n'est pas des soins. La téléconsultation offre une prise en charge dégradée. Elle l'est encore plus dans ces conditions. Nous allons de plus en plus nous opposer à ce type d'installation."
En avril 2021, l’Ordre des médecins avait estimé que "la prise en charge de patients exclusivement en téléconsultation porte atteinte aux exigences déontologiques de qualité, de sécurité et de continuité des soins" et demandait au Gouvernement "réagir avec fermeté pour défendre les principes régissant l’organisation des soins en France."
La téléconsultation connaît un véritable boom depuis les confinements de l'épidémie de Covid. Ces consultations face caméra sont passées de 140 000 en 2019 à plus de 18 millions en 2020 selon le quotidien La Tribune. Le gouvernement a profité du dernier projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour mettre un tour de vis à ces pratiques. "Nous sommes dans un système où l'on veut déréguler même les consultations. On veut ubériser la médecine" dénonce Stéphane Outric.
Vu le contexte, il n'est pas sûr que la cabine de téléconsultation médicale installée dans le magasin toulousain de Monoprix fasse long feu.