EXCLUSIVITE. Pour la première fois depuis 1974, la relique du crâne de Saint-Thomas d'Aquin a été délogée de son reliquaire. Pendant trois ans, l'ossement sera gardé par les Dominicains de Toulouse. Une cérémonie historique qui marque le début de trois ans de festivité à l'occasion du triple jubilé du religieux italien.
Le jour est historique. Les mines attentives et souriantes des religieux témoignent de cet instant solennel. En cette journée de fête de Saint-Thomas, le couvent des Dominicains a choisi une façon toute particulière de célébrer l'événement. Pour la première fois depuis 1974, la relique du crâne de Saint-Thomas d'Aquin, religieux italien célèbre pour son œuvre théologique et philosophique, a quitté son reliquaire en bois pour rejoindre un tout nouveau logis, imaginé pour l'occasion.
L'ossement avait quitté le couvent des Jacobins mercredi 25 janvier 2023 pour être confié pendant trois ans aux mains de l'ordre des frères prêcheurs.
En effet, à partir de ce jeudi 26 janvier, trois années de festivités débutent pour les Dominicains pour célébrer le triple jubilé de Saint-Thomas d'Aquin : les 800 ans de sa naissance, les 750 ans de sa mort et les 700 ans de sa canonisation.
"C’est exceptionnel, on ne voit pas ça plusieurs fois dans sa vie"
Le froid du couvent n'a rien enlevé au bonheur des Dominicains. Emmitouflés dans leur manteau et écharpe pour lutter contre les 12 degrés de la sacristie, ils ont assisté à 10h30 à la découverte du crâne, dans un silence cérémoniel.
« La joie est une qualité dominicaine. L’événement auquel nous assistons porte la joie à la puissance supérieure. On était heureux de revoir un frère après sept siècles, il est revenu chez nous », a confié l'archevêque dominicain Jean-Louis Bruguès.
Les reliques du crâne et des os de Saint-Thomas d'Aquin sont arrivés au couvent des Jacobins en 1369, près de cent ans après sa mort. Elles ont quitté l'édifice religieux toulousain au moment de la révolution, en 1790 pour revenir en 1974. Pour l'occasion, la relique du crâne avait été dévoilée. "A cette époque, les os étaient conservés dans du vinaigre. Ils étaient tout rouges", se souvient Monseigneur Jean-Louis Bruguès. Jusqu'à aujourd'hui, les ossements reposaient sous l'autel majeur de l'église des Jacobins.
C’est une fête pour nous, nous retrouvons un frère aîné qu’on étudie. Combien de fois a-t-on parlé de Saint-Thomas ? Là je le retrouve non pas en chair mais en os en tout cas.
Jean-Louis Bruguès, archevêque dominicain
Une fois dévoilé, le crâne a été encensé à deux reprises par l'archevêque.
Une cérémonie de plus d'une heure et demie
Sous les chants liturgiques des Dominicains, la relique a ensuite été cousue à son socle pour "qu’il ne subisse pas de chocs". Deux parchemins viennent orner l'ossement : un daté de 1974 atteste de son authenticité et un deuxième daté de 2023. A chaque découverte de reliques, une lettre testimoniale s'ajoute au reliquaire.
Aucun dispositif particulier n'a cependant été mis en place pour assurer sa bonne conservation. Marie Bonnabel, directrice du couvent des Jacobins de Toulouse et conservatrice explique : "Dans la mesure où ce n’est pas un objet protégé au titre des monuments historiques il n’y a pas de nécessité absolue de garantir leur conservation mais effectivement c’est un souhait."
Le crâne a ensuite rejoint son nouveau reliquaire, conçu spécialement pour l'occasion.
1 an de travail pour la conception du nouveau reliquaire
Au total, quatre personnes ont participé à la réalisation du reliquaire, sous la direction artistique d'Augustin Frison Roche, artiste-peintre : un orfèvre, un lapidaire, chargé de la taille des pierres semi-précieuses, une couturière pour confectionner le coussin qui sert de support au crâne, un menuisier et un artiste-peintre.
Le reliquaire est composé d'une base en cuivre doré dans lequel est serti du cristal de roche qui laisse apercevoir le crâne. Les parois sont fabriqués à base de jaspe rouge.
"La forme reprend la représentation symbolique de la Jérusalem céleste donc du paradis. C’est un peu une manière de représenter la dernière demeure de Saint-Thomas d'Aquin. Dans les derniers chapitres de l'Apocalypse, le paradis est carré avec 12 portes", décrit Augustin Frison Roche.
L’objectif est que ça puisse servir de support à la prière donc la responsabilité est grande.
Augustin Frison-Roche, artiste peintre
Pendant trois ans, la relique du crâne de Saint-Thomas d'Aquin reposera au couvent des Dominicains. Ses os, eux, resteront aux Jacobins, pour que les "fidèles puissent venir se recueillir même pendant la pérégrination de 3 ans du crâne de Saint-Thomas entre les mains des Dominicains."