La Ligue des droits de l'homme et la Cimade alertent. Après l'évacuation du bidonville du Mas rouge fin août, celui du Zénith pourrait bientôt être lui aussi démantelé par les forces de l'ordre, sur l'initiative de la Préfecture de l'Hérault. Une centaine de personnes y vivent depuis 2010.
A l'entrée du camp, sur la route qui part du Zénith de Montpellier en direction de Mauguio, les traces de l'incendie sont encore visibles. Le mardi 31 août, un feu s'est déclaré dans ce bidonville, sans doute parti d'un branchement électrique hasardeux. De nombreuses habitations de fortune ont été ravagées.
Dix ans de vie réduits en fumée
Certains ont tout perdu, comme Carolu Danciu, 53 ans, et dix ans de vie dans ce campement. L'homme ne parle que très peu le français, c'est Gigi Maritescu, un roumain installé en France depuis de longues années, et qui s'investit auprès de ces populations, qui assure la traduction : "Il n'a plus rien. Là, il est hébergé, avec son petit-fils dont il a la charge, à gauche à droite par des voisins. Mais à partir du moment où la population du camp va être expulsée, ils vont s'éparpiller. Là, maintenant, il y a encore les autres gens qui le soutiennent, qui l'aident, donc il n'est pas tout seul. Si on les expulse, il va rester tout seul."
Car depuis une semaine, la rumeur court : après l'évacuation fin août du camp du Mas Rouge à Montpellier, ce serait bientôt au tour du bidonville du Zénith. Plusieurs associations, dont la Ligue des droits de l'Homme et la Cimade, ont improvisé une conférence de presse le lundi 06 septembre, devant l'Hôtel de Ville pour alerter l'opinion publique et mettre la pression sur les autorités, plus particulièrement sur la municipalité. Pour Sophie Mazas, avocate et membre de la LDH, cette expulsion serait ainsi "sans aucune base légale" :
"Pour expulser quelqu'un parce qu'il y a un jugement d'expulsion, pour l'expulser de chez lui, il faut que le propriétaire demande au Préfet le concours des forces de l'ordre. En l’occurrence, il n'y a pas eu de demande de la mairie, selon la position qu'elle nous a transmise. Et donc on se demande sur quelles bases le préfet va expulser. "
La mairie de Montpellier, dans un communiqué adressé aux rédactions, confirme ne pas avoir fait de demande auprès de la Préfecture pour l'évacuation de ce camp : "[La Ville] n’a pas formulé de demande d’expulsion de bidonvilles." Contactée, la préfecture de l'Hérault n'a pas souhaité faire de commentaires sur une éventuelle expulsion. Mais au lendemain de la conférence de presse improvisée, une vingtaine de policier s'est présenté au petit matin sur le bidonville du Zénith 2 pour relever l'identité des personnes y habitant, accréditant l'hypothèse d'une intervention prochaine. Une perspective qui inquiète les occupants du campement.
Jacob a vingt ans. Il est arrivé en France de Roumanie à l'âge de six ans et habite le camp du Zénith 2 depuis une dizaine d'annnées. Le travail des associations qui interviennent auprès des populations des bidonvilles lui a permis de suivre une scolarité jusqu'à la terminale. Il s'exprime dans un Français maitrisé, d'une voix calme :
"Tout le monde réfléchit où-est-ce qu'on va aller mais on n'a pas de solution en fait. C'est pour ça qu'on reste ici. Même si on sait dans notre tête qu'ils vont nous expulser, on reste quand même ici, car on n'a nulle part où aller."
Une expulsion, sans solution viable derrière : c'est aussi ce que dénoncent les associations, par la voix de Sophie Mazas : "C'est sûr que s'il y avait une évacuation du bidonville avec un relogement, avec de l'hébergement d'urgence, de l'accompagnement social... Mais là, on a je crois 40 000 demandes de logement social en souffrance dans l'Hérault, on a un dispositif d'hébergement d'urgence totalement saturé. a part ouvrir des gymnases, il n'y a pas de solution, et même ça, ca n'est pas prévu." Et les associations de rappeler qu'en 2010, le camp du Zénith 2 avait été créé par les personnes évacuées par la force quelques jours plus tôt d'un autre bidonville, dans le quartier des Sabines.