Agroclimatologue et lanceur d'alerte, le chercheur de Montpellier se bat au quotidien contre les climatosceptiques qui remettent en question la réalité du réchauffement climatique et ses impacts sur notre environnement. Avec la sécheresse et la canicule, il est devenu ces derniers jours la cible de violentes critiques sur les réseaux sociaux.
"Ils sont sceptiques de tout, juste sceptiques et c'est leur seule raison d'exister." Serge Zaka ne décolère pas. Pour l'agroclimatologue et lanceur d'alerte héraultais, pas question de laisser dire tout et n'importe quoi sur le changement climatique. L'an passé, celui qui se veut avant tout un vulgarisateur a accordé pas moins de 500 interviews.
Très présent sur Twitter (le réseau social s'appelle désormais X, ndlr) où il compte 78 000 followers, il mène surtout une bataille quotidienne sur les réseaux sociaux face aux climatosceptiques. "Les scientifiques sont fatigués d'être contredits par des 'sachants' du dimanche mais il faut tenir bon, ne pas lâcher. Moi, je réponds surtout à leurs figures de proue, avec des faits, et ils reviennent en armée pour m'attaquer."
Mais parce qu'il lutte contre ceux qui s'emploient à semer le doute, il récolte une vraie tempête. "C'est un déferlement de haine, je reçois une centaine de messages d'insultes tous les jours", reconnaît l'ingénieur agronome. "On me surnomme Dr Zelda, Crocodile Dundee, Indiana Jones ou Zorro à cause de mon chapeau. Avant, ils critiquaient sur le fond mais depuis un an, face à la réalité du réchauffement climatique, ils n'ont malheureusement plus aucun argument. Donc ils s'en prennent à ma personne et c'est parfois très violent."
"On m'accuse de catastrophisme"
Comme ce Twittos qui conteste les chiffres avancés par Serge Zaka sur l'agriculture espagnole. De l'autre côté des Pyrénées, les producteurs de céréales ont en effet perdu 65 % de leur récolte en raison de la sécheresse hivernale. "Ce sont juste les chiffres officiels, je n'invente rien, mais on m'accuse de catastrophisme, c'est grave", s'étonne Sege Zaka.
Relevés météo contestés
Serge Zaka est monté aussi au créneau pour défendre Infoclimat, dont il est vice-président. Cette association à but non lucratif d'intérêt général a été créée en 2003. Son objectif est de rendre accessible les connaissances autour de la météo et du climat. Elle les partage sur son site Internet qui est visité par 4,5 millions de personnes chaque année.
"Ces gens remettent en question le fondement même des enregistrements météo et quand on ne va pas dans leur sens, ils nous accusent de manipulation et de trafic de données. Infoclimat s'appuie aujourd'hui sur 800 stations météo en France. Cela fait 20 ans qu'on en installe partout dans l'hexagone et qu'on collecte des données, cela nous donne quand même un peu de recul sur la situation !"
Infoclimat agrège en outre des données météorologiques provenant de nombreuses sources à l'international et dispose, dit-elle, d'une base de données de plus de six milliards d'enregistrements climatologiques.
#caniculemoncul
Avec la succession ces dernières semaines de vagues de chaleur mais aussi d'orages exceptionnels et de fortes précipitations, les esprits s'échauffent et les climatosceptiques redoublent d'agressivité selon le spécialiste. Comme en témoigne le hashtag #caniculemoncul devenu viral.
"On est de plus en plus dans l'ultracrépidarianisme", résume Serge Zaka. Un terme savant qui désigne un comportement consistant à donner son avis sur des sujets à propos desquels on n’a pas de compétence. "Certains ont l'impression de connaître le sujet en ayant lu un article sur un blog et trois posts sur Twitter, poursuit-il. Et j'ai remarqué que ce sont souvent les mêmes qui se proclament en même temps experts sur l'Ukraine, la Covid ou les vaccins."
L'agroclimatologue regrette surtout que les scientifiques aient aujourd'hui renoncé à porter la contradiction partout où ces idées s'expriment et qu'ils laissent d'autres parler à leur place. "Le danger pour moi, c'est que tout cela favorise l'inaction climatique, conclut avec inquiétude Serge Zaka. Que l'on puisse imposer des idées fausses et convertir des personnes qui n'ont pas les connaissances scientifiques suffisantes pour juger par elles-mêmes."