L'incendie qui a ravagé près de 1000 hectares de côtes catalanes entre Banyuls-sur-mer et Cerbère dans les Pyrénées-Orientales accroit l'inquiétude de la population comme celle des scientifiques. Le département affiche désormais un déficit d'eau de pluie digne d'un climat désertique.
Sécheresse, incendie précoce et maintenant pénurie de récolte ! Le département des Pyrénées-Orientales semble cumuler les fléaux depuis ces derniers mois, à cause du manque d'eau.
D'autant que selon Serge Zaka, agro-météorologue à Montpellier :"la probabilité d'une sécheresse estivale est encore plus importante qu'en 2022 pour tous les bassins agricoles français. Les prévisions saisonnières s'orientent vers des températures plus élevées que la normale".
Ce dernier tire la sonnette d'alarme en continu sur son compte Tweeter : "Depuis le début de l'année, le déficit est abyssal dans le sud-est. De nombreuses stations sont entre -80% et -90%. La saison culturale démarre sur une situation extrêmement tendue."
Répondant à un lecteur critique qui le traitait de "vendeur de malheur", ce scientifique féru de vulgarisation rétorque :
Je dois de vous ouvrir les yeux. La sécheresse du pourtour méditerranéen est INFAME. A Leucate, 156mm sur 1 an (déficit -73% !). C'est un climat désertique. La question n'est plus d'évaluer les pertes de rendement, mais plutôt si on va pouvoir récolter quelque chose.
Serge Zaka, agro-météorologue
Serge Zaka relaye également la publication sur tweeter de Daniel Trenado, agriculteur et consultant agricole qui affirme tout de go : "Je vais être direct : cette année, dans une grande partie de l'Espagne, pas un seul grain de céréales ne sera récolté."
Vers des sécheresses de plus en plus intenses
En fait, c'est toute l'Europe qui est concernée par ce phénomène de raréfaction d'eau. Il y a deux ans, des chercheurs ont publié une étude dans la revue Environmental Research Letters : selon leurs travaux, les pertes de récoltes liées aux épisodes de canicules et de sécheresse ont triplé au cours de ces cinquante dernières années en Europe.
Ils se sont appuyés sur les données de productions agricoles et sur les événements météorologiques extrêmes (sécheresse, canicule, inondations, mais aussi vague de froid) dans 28 pays européens (UE actuelle et Royaume Uni) entre 1961 et 2018.
Verdict : ce sont les sécheresses et les vagues de chaleur qui font le plus de dégâts. "Même si les rendements des cultures européennes ont augmenté de près de 150% entre 1964-1990 et 1991-2015, nous avons constaté que les sécheresses et les vagues de chaleur ont eu des conséquences plus graves au cours de la période la plus récente pour les différents types de cultures", a expliqué Teresa Bras, auteure principale de cette étude et qui travaille à la Nova School of Science and Technology, à Lisbonne au Portugal.
Les céréales en première ligne
Selon ces chiffres, les sécheresses, qui se multiplient, deviennent de plus en plus intenses. Elles pénalisent en premier lieu les céréales, denrée de base qui occupe près de 65% de la surface cultivée de l'UE et qui est principalement utilisée pour l'alimentation animale.
Chaque année marquée par un épisode de sécheresse, les pertes de céréales augmenteraient de 3%. Un phénomène d'autant plus inquiétant que ces épisodes extrêmes sont appelés à se multiplier avec le réchauffement de la planète.